AccueilSolaireBlackout en Espagne : voici la vertigineuse perte de puissance électrique suite à la méga panne

Blackout en Espagne : voici la vertigineuse perte de puissance électrique suite à la méga panne

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Par Hugo LARAPublié le 29 avril 2025
Illustration générée par IA.

Si l’origine de la gigantesque panne d’électricité qui a touché l’Espagne puis le Portugal le 28 avril n’a toujours pas été déterminée, l’on peut déjà observer les données publiées par le réseau lors de cette folle journée. Des courbes de production et consommation électriques ahurissantes, que certains experts de l’énergie plus ou moins partisans tentent d’analyser pour dégager des hypothèses sur cet évènement.

C’est un effondrement de la consommation comme il s’en est rarement produit en Europe. Alors que l’Espagne consommait 25 184 MW d’électricité le 28 avril à 12h30, la demande a brutalement chuté à 14 185 MW cinq minutes plus tard, avant d’atteindre un plancher à 10 480 MW à 13h35. Le pays de 48 millions d’habitants affichait à cet instant une consommation semblable à celle de la Belgique (11,8 millions d’habitants). En conséquence, le trafic ferroviaire a été totalement interrompu, comme la plupart des infrastructures nécessitant de l’électricité et dépourvue de groupe électrogène. Les centrales nucléaires espagnoles se sont également « îlotées » en se déconnectant du réseau et assurant leur alimentation avec des générateurs diesel de secours.

Ce blackout a été causé par un évènement toujours inexpliqué sur le réseau électrique ibérique, et a rapidement contaminé le Portugal ainsi qu’une petite partie du Pays Basque français. Il aura fallu un peu plus de 18 heures pour que le gestionnaire du réseau, Red Eléctrica de España (REE), parvienne à rétablir 99,5 % de la demande. Les courbes de puissance de cette journée noire, publiées par REE, sont particulièrement déconcertantes. On y voit la soudaine dégringolade de la consommation en plein milieu de journée, à un moment où le pays connaissait un important pic de production solaire. À 12h30, il assurait 55 % de son alimentation à partir des centrales solaires photovoltaïques et 11 % d’éolien. Le réseau espagnol fonctionnait donc en grande majorité (66 %) grâce aux énergies renouvelables non pilotables, et se permettait même d’exporter 4 311 MW vers ses voisins, notamment le Portugal (2 652 MW).

L’éolien et le solaire accusés

Alors que la piste de la cyberattaque est écartée et celle du sabotage explorée, de nombreux experts et passionnés ont rapidement pointé les énergies solaires et éoliennes. « Les causes ne sont pas encore connues. Mais un réseau saturé d’ENR (énergies renouvelables, NDLR) qui ne permettent aucune régulation de fréquence peut entrainer ce type de panne générale » a par exemple affirmé Aurélien Derrier, un employé d’EDF dans la filière nucléaire, très actif sur le réseau social Linkedin.

« À 13 h, le mix électrique espagnol produisait avec 70 % d’énergie intermittente solaire ou éolienne au moment de collapser ! STOP OU ENCORE » lançait sur son compte X Fabien Bouglé, un opposant notoire aux énergies renouvelables particulièrement sollicité par les médias. Selon André Merlin, président du gestionnaire du réseau français RTE entre 2000 et 2007, la panne aurait pu être causée par le passage d’une supposée dépression météorologique, qui aurait fait brutalement chuter la production photovoltaïque et entraîné une dérégulation du réseau.

Certains évoquent un éventuel déséquilibre dans les interconnexions, notamment celles entre la France et l’Espagne. « Alors que la France importait 1 GW d’électricité depuis l’Espagne à 12h15, l’interconnexion s’inverse et elle exporte 400 MW à 12h30, quelques minutes avant le black-out. Cette inversion de l’interconnexion a-t-elle contribué aux oscillations de fréquence du réseau ibérique ? «  soupçonne Nicolas Meilhan, un ingénieur et consultant en énergie.

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Pas d’originalité visible au moment du blackout

Pourtant, le mix du réseau ibérique, à l’instant de son effondrement, ne comportait aucune originalité nettement visible sur les courbes de REE. Le pays est habitué à intégrer un forte part de production intermittente et a même couvert à plusieurs reprises la totalité de sa demande électrique à partir des énergies renouvelables. Par ailleurs, les images satellites ne montrent pas non plus de couverture nuageuse significative sur l’Espagne durant la journée du 28 avril, qui expliqueraient une chute de la production solaire. D’autres experts en énergie se sont ainsi montrés plus prudents.

« Une radio m’a invité à commenter cet événement. N’ayant aucune idée de ce qui s’est passé, j’ai décliné et leur ai dit que la seule entité qui me semblait éventuellement pouvoir avoir des choses pertinentes à dire à ce stade était RTE » explique Maxence Cordiez, un ingénieur nucléaire et vulgarisateur en énergie. « Quand je vois certains militants (notamment anti-EnR) autoproclamés experts profiter de l’occasion pour prendre la lumière sur les plateaux télé sans même savoir si les EnR sont ou non à l’origine de la panne, je me dis qu’il y a un problème » s’est-il agacé sur son compte Linkedin.

Le gestionnaire du réseau français RTE indique que « la séquence des événements est en cours d’analyse ». « Ce qui aujourd’hui est certain, c’est que l’Espagne a connu une perte de production de 15 GW en quelques secondes, conduisant au black-out. Dans le même temps, la péninsule ibérique s’est déconnectée du réseau européen » précise la filiale d’EDF.

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