Le Bangladesh, connu pour ses blackouts à répétition, met le cap sur le nucléaire et l’éolien pour fiabiliser un réseau électrique capricieux et extrêmement carboné. Malgré des investissements considérables pour ce pays en voie développement, il n’est pas sûr que cela suffise à approvisionner ses 167 millions d’habitants.
Le réseau électrique du Bangladesh va-t-il enfin sortir la tête de l’eau ? Le pays où la densité de population est la plus élevée au monde vient de recevoir ses premières livraisons de combustible pour sa centrale nucléaire flambant neuve de 2 400 MW, dont le premier réacteur devrait être mis en service au plus tard l’année prochaine. Dans le même temps, le pays vient d’accepter un accord de principe pour le développement, par un groupement composé de deux entreprises danoises et d’une entreprise bangladeshie, d’un parc éolien offshore de 500 MW au large de Cox’s Bazar, au sud du pays.
À lire aussi Imbattable, le prix de l’électricité produite par le solaire flottant dans ce pays ?Ces nouvelles témoignent de la volonté du Bangladesh d’augmenter sa capacité de production d’électricité tout en sortant de sa dépendance aux énergies fossiles. Le pays doit, en effet, faire face à l’augmentation constante de ses besoins en électricité dans un contexte international de réduction des émissions de CO2. En 2022, le pays n’avait produit que 85,23 TWh d’électricité, dont 98,05 % étaient issus d’énergies fossiles (58,9 % de gaz naturel, 24,2 % de produits pétroliers et 15 % de charbon) selon les données de l’Ember Global Electricity Review. Cela représente seulement 510 kWh de consommation par an et par habitant, contre, par exemple, 4 679 kWh pour la France.
Le pays dispose actuellement d’un réseau vétuste, et en mauvais état, en témoigne l’immense panne générale d’octobre 2022 qui a touché 130 des 167 millions d’habitants du pays. En 2014, une panne similaire de 10 heures avait eu lieu, touchant 100 millions d’habitants. Dans ce contexte, les systèmes photovoltaïques hors-réseau se sont, d’ailleurs, grandement développés, représentant, en 2020, 233 MW sur les 397 MW de puissance photovoltaïque totale installée.
Priorité au nucléaire et à l’éolien
Pour faire face à cette demande croissante en électricité et pour fiabiliser sa production électrique, le pays a décidé, dès 2009, de construire une centrale nucléaire. C’est l’agence atomique russe Rosatom qui s’est chargée du développement des deux réacteurs de 1200 MW pour un montant total de 12,65 milliards de dollars, que le Bangladesh devra rembourser durant les 28 prochaines années.
Six ans après le début de construction du premier réacteur, celui-ci devrait être mis en service dans les prochains mois. Le second réacteur devrait, lui, être mis en service en 2026. Et ce n’est pas tout, Sheikh Hasina, Première Ministre du pays, avait déclaré en 2021 qu’une deuxième centrale pourrait voir le jour dans le sud du pays.
À lire aussi Enrichir davantage d’uranium pour ne plus en importer de Russie ?Le Bangladesh ne compte pas que sur le nucléaire pour décarboner son mix électrique. Outre la volonté de multiplication des centrales photovoltaïques flottantes, le pays compte beaucoup sur l’éolien. Le parc éolien de 500 MW, dont l’étude de faisabilité détaillée devrait bientôt commencer, ne serait, en effet, que le premier d’une longue liste. Le SREDA (l’Autorité du Bangladesh pour développer les énergies durables et renouvelables) a fixé l’objectif ambitieux d’installer 5 GW d’éolien terrestre et marin d’ici à 2030. Actuellement, malgré un potentiel intéressant, la capacité de production n’atteint pas les 3 MW, dont 2 MW ne sont même pas intégrés au réseau national.
Malgré ces efforts de décarbonation, la dépendance du pays envers les énergies fossiles n’est pas près de se terminer. Contraint de sécuriser sa production énergétique, le Bangladesh vient d’inaugurer avec l’Inde la centrale thermique de Maitree, d’une puissance colossale de 1 320 MW. Cette centrale devrait brûler, chaque année, près de 4,75 millions de tonnes de charbon. Plus tôt dans l’année, le pays a également conclu un accord d’approvisionnement en gaz naturel liquéfié avec le Qatar sur une durée de 15 ans. Selon Qatar Energy, le volume de gaz pourrait atteindre 1,8 million de tonnes par an.