Les projets contemporains de dirigeables n’ont généralement pas abouti. Il s’agit pourtant d’une solution sobre en énergie et élégante pour le transport de charges lourdes et volumineuses dans les endroits enclavés. Mais ce projet-ci semble bien parti.
À l’origine, une start-up fondée en 2012. Son nom : Flying Whales, littéralement « Baleines Volantes ». Son fondateur : Sébastien Bougon, un ingénieur qui a entamé sa carrière dans le secteur de la construction, avant de la poursuivre dans la gestion de fonds d’investissement. Son projet : en partenariat avec l’Office National des Forêts (ONF), étudier une solution aérienne pour transporter du bois entre les lieux de coupe et la scierie, et ce, sans besoin de construire de route ou piste d’atterrissage.
Puis le projet grandit. Il est retenu parmi les 34 projets du programme Nouvelle France Industrielle, lancé par Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif. Puis les investissements s’enchaînent : le constructeur aéronautique chinois AVIC, Bpifrance, une levée de fonds en 2019 de 30 millions d’euros dont Investissement Québec, la société du gouvernement québécois. Si bien que l’entreprise a réussi à boucler en 2022 son plan de financement de 450 millions d’euros.
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L’entreprise vise à désenclaver les zones isolées en proposant une offre de transport aérien. Cette offre peut concerner le transport des infrastructures lourdes, notamment énergétiques (réseau électrique, composants d’éoliennes), l’aide humanitaire, l’aide humanitaire et les installations médicales d’urgence, le transport et la logistique (transport exceptionnel), ainsi que l’exploitation forestière.
Le cheval de bataille de Flying Whales est son dirigeable baptisé LCA60T, pour « Large Capacity Airship 60 Tons », que l’on pourrait traduire par « Dirigeable de Grande Capacité 60 Tonnes ». Il s’agit d’un engin à structure rigide, gonflé par 180 000 m3 d’hélium. Ce gaz a l’avantage d’être non inflammable – à la différence de l’hydrogène qui remplissait les dirigeables du milieu du XXᵉ siècle et avait conduit à des accidents dramatiques, comme la catastrophe de l’Hindenburg en 1937.
Le dirigeable sera de très grande taille : 200 m de long et 50 m de diamètre. Sa baie cargo mesurera 96 m, aura une largeur de 7 m et une hauteur de 8 m. Il pourra soulever 60 tonnes de charge utile et pourra se déplacer jusqu’à 100 km/h, à une altitude de 10 000 pieds (3 000 m). Dans un premier temps, sa propulsion sera hybride thermique – électrique, et la société indique des émissions réduites par rapport au transport par route. Quoi qu’il en soit, Flying Whales prévoit à terme une propulsion 100 % électrique, par le biais de piles à combustible qui consommeront de l’hydrogène.
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L’enveloppe a été testée en 2018 au cours d’une campagne d’essais en soufflerie dans les installations de l’ONERA à Lille. L’objet d’étude était une maquette à l’échelle 1/150ᵉ et les essais ont permis ensuite de valider les calculs de mécanique des fluides (CFD) du véhicule à sa vraie échelle.
Plus récemment, ce sont les moteurs électriques qui ont été testés. Ces derniers fonctionneront lors des phases de manœuvres du dirigeable, ainsi que pour assurer la stabilité lors des phases de chargement et de déchargement. Les moteurs peuvent déployer chacun une puissance de 200 kW, et ils font tourner des hélices à trois pales de plus de 4 m de diamètre. Et ce ne sont pas moins de 32 d’entre eux, répartis sur la coque, qui permettront de réaliser ces manœuvres.
Les projets contemporains de dirigeables se sont heurtés à des difficultés importantes, notamment l’accessibilité à l’hélium, rare et coûteux. Mais Flying Whales apparaît bien lancé. La société envisage de démarrer la production du premier exemplaire du LCA60T en 2024. Puis, après les étapes nécessaires de certification, elle vise une mise en exploitation commerciale pour 2026.
Question technique: Imaginons un dirigeable de 70 tonnes (structure) + 30 tonnes d’Helium (180.000 m3) + 60 tonnes de charge utile. Normalement, l’ensemble devrait être à peu près à l’équilibre par rapport à la poussée d’Archimède dans l’air.
Comment fait-on quand l’appareil revient à vide? On « se débarrasse » de 10 tonnes d’Helium ? J’imagine qu’on peut en comprimer et en stocker en bouteilles super denses, mais que fait-on des (60.000 m3) ainsi libérés dans la structure ? merci d’avance aux experts !
Pour l’hélium, nos grands amis du Qatar pourront fournir : l’hélium fait partie des « déchets » valorisables de l’exploitation du gaz naturel. Le Qatar est un des plus grands producteurs mondiaux. Dans les années 1920/1930 , les USA premier producteur mondial, avaient décrété un embargo contre l’Allemagne sur l’hélium. C’est pour cette raison que les Zeppelins ont été chargés en hydrogène. Par ailleurs l’hydrogène n’est pas la seule cause du désastre. L’armature des Zeppelin était recouverte d’une poudre d’aluminium extrêmement inflammable. Un coup de foudre (orage) sur le Hindenburg et…boum. Même sans hydrogène, la catastrophe aurait eu lieu de la même… Lire plus »
Je pense que c’est bien l’hydrogéne qui flambe dans le Zeppelin mais assez doucement (vue la quantité stockée). Pour pouvoir bruler rapidement (ou mieux exploser), il faudrait qu’il trouve à proximité une quantité phénoménale d’oxygène bien trop diluée dans l’atmosphère.
Je trouve dommage cette phobie sur l’hydrogène qui est bien plus abondant que l’hélium et dont tout le monde pourra disposer.