En France, nous avons assisté en 2023 à un bond de 20 % de la puissance photovoltaïque installée. Or, plus de photovoltaïque, c’est aussi plus de production locale, et moins de revenus pour le réseau de transport et de distribution de l’électricité. Au point que certains envisagent un véritable effondrement du financement de cette infrastructure. Mais est-ce vraiment le cas ? C’est ce que nous allons vérifier dans cet article.
Depuis 2002, le secteur électrique est divisé entre sociétés de production et de commercialisation d’une part (EDF, par exemple), et sociétés de transport et de distribution de l’autre (RTE et Enedis). À la suite de cette séparation, le réseau est financé par un dispositif spécifique appelé TURPE, acronyme pour « Tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité ». Selon les typologies de consommateurs, il existe plusieurs TURPE, c’est pourquoi l’on parle le plus souvent « des » TURPE, au pluriel. Les TURPE ont pour finalité de rémunérer les entreprises ayant la charge du service public de transport et de distribution de l’électricité, à savoir :
- Réseau de transport d’électricité (RTE), gestionnaire du réseau haute tension supérieur à 63 kilovolts (kV).
- Enedis (anciennement ERDF), principal gestionnaire du réseau moyenne et basse tension,
- les Entreprises locales de distribution (ELD) dans certaines communes.
Les prix sont fixés par une autorité indépendante, à savoir la Commission de régulation de l’énergie (CRE), qui les révise régulièrement, aujourd’hui avec une périodicité de quatre ans.
Comment le TURPE est-il payé par le consommateur ?
Les TURPE sont calculés pour couvrir les coûts de construction, de développement et de maintenance du réseau. Ils couvrent également en partie les coûts de raccordement, ainsi que les coûts de recherche et développement. Les TURPE 6 sont les tarifs en vigueur depuis le 1ᵉʳ août 2021, et ils resteront en application jusqu’en 2025. Tous les consommateurs d’électricité payent le TURPE. Pour les petits consommateurs, le TURPE est collecté par le fournisseur d’électricité auprès de ses clients, directement sur leur facture. Son montant est ensuite intégralement reversé par le fournisseur aux gestionnaires des réseaux. Le montant peut figurer sur votre facture, c’est le cas, par exemple, pour EDF.
Dans l’exemple de facture ci-dessus, la contribution au réseau figure sous plusieurs formes. Une part fixe figure dans la section « abonnement » de la facture, et une part variable figure dans la section « consommation ». Ces contributions représentent environ un tiers ou la moitié de la facture hors-taxe. La dernière composante de la facture est appelée « Contribution Tarifaire d’Acheminement Électricité » (CTA), c’est une taxe destinée, elle aussi, à financer le réseau de transport et de distribution, ainsi que les retraites des agents du régime des industries électriques et gazières. Elle s’élève autour de 20 % du prix d’acheminement.
Les tarifs sont variables selon la situation du consommateur
Nous allons nous pencher sur plusieurs situations de consommateurs / autoproducteurs individuels (non collectifs), et ce pour des compteurs réglés à une faible puissance (< 36 kVA). Il y a trois cas à envisager :
- Un consommateur simple sans installation de production photovoltaïque
- Un autoproducteur sans contrat de revente
- Un autoproducteur bénéficiant d’un contrat de revente
Enedis édite un descriptif du TURPE HTA-BT, sur lequel nous allons nous baser. Pour les particuliers et les professionnels qui ont un abonnement inférieur à 36 kVA, trois composantes permettent de calculer le montant du TURPE : la composante de gestion, la composante de comptage et la composante de soutirage. Pour la première, la composante de gestion, son prix est différent selon la situation du consommateur :
- Pour un consommateur ou pour un autoproducteur sans contrat de revente, le coût est le même, à savoir 15,48 €/an,
- Pour un autoproducteur bénéficiant d’un contrat de revente, cette composante s’applique en principe dans les deux sens : pour l’injection et pour le soutirage. Toutefois, une règle est mise en œuvre pour conduire à un montant inférieur à la somme des deux contributions, à hauteur de 24,36 €/an.
Concernant la composante annuelle de comptage, elle est destinée à couvrir les frais liés au compteur, à savoir sa location, son entretien et sa relève. Elle est identique pour les trois situations, à hauteur de 19,92 €/an.
Concernant la dernière composante, la composante de soutirage, son calcul est plus complexe, car il dépend d’options de tarification et de classes de prix qui sont fonction de la saisonnalité. Ce qu’on peut toutefois retenir, c’est que la tarification est :
- D’une part proportionnelle à la puissance souscrite, avec une valeur pouvant varier selon l’option, mais de l’ordre de 10 €/kVA. Ainsi, avec un compteur à 9 kVA, le coût sera de l’ordre de 90 €/an,
- D’autre part, proportionnelle à l’énergie consommée, avec une valeur pouvant assez fortement varier, en fonction de l’option et du moment de consommation. Pour une option sans saisonnalité, il peut être, par exemple, de 4,37 c€/kWh. Si l’on considère une consommation de 2 MWh/an, le coût représente environ 87 €/an.
L’autoconsommation nuisible au réseau ? Le verdict
Comparons les trois cas dans le tableau ci-dessous, moyennant quelques hypothèses :
Situation | Consommateur en soutirage seulement | Autoproducteur sans contrat de vente | Autoproducteur avec contrat de vente |
Composante annuelle de gestion | 15,48 €/an | 15,48 €/an | 24,36 €/an |
Composante annuelle de comptage | 19,92 €/an | 19,92 €/an | 19,92 €/an |
Puissance du compteur | 6 kVA | 6 kVA | 6 kVA |
Consommation annuelle totale | 2 MWh | 2 MWh | 2 MWh |
Soutirage du réseau | 2 MWh | 1 MWh | 1 MWh |
Autoconsommation | 0 MWh | 1 MWh | 1 MWh |
Composante annuelle de soutirage | 147 €/an | 103 €/an | 103 €/an |
Prix total acheminement (hors-taxe) | 183 €/an | 139 €/an | 148 €/an |
Diminution | – | -24% | -19% |
Nous le voyons, dans ces cas fictifs, la diminution de la part de la facture électrique liée à l’acheminement est modeste, de l’ordre de 20 % (hors-taxes). Nous avons pourtant considéré une autoconsommation de 50 %, soit une diminution d’autant du soutirage d’électricité sur le réseau. Dit autrement, nous constatons que les autoproducteurs payent plus cher chaque kilowattheure d’électricité achetée au réseau. Nous sommes donc loin d’une situation pouvant amener à l’effondrement des revenus et du financement du réseau. La seule situation conduisant à une facture nulle serait celle d’une autonomie totale, avec un bâtiment complètement déconnecté du réseau. Mais dans ce cas, aucune électricité ne serait soutirée, et le réseau ne serait aucunement sollicité. Il serait alors bien entendu malvenu d’exiger un payement pour son usage.
Cet article est assez honteux et passe complètement à côté du sujet. Le problème de l’autoconsommation est que les économies (réelles, 20 à 25% d’après l’article) de taxes réseaux des autoconsommateurs se font au dépend des autres usagers puisque le coût du réseau est inchangé (le dimensionnement du réseau est le même, puisque le PV ne produit rien au moment où le réseau est justement le plus sollicité). D’ailleurs, dans la réalité, le solaire sur les toitures augmente même les besoins de réseau, puisqu’il faut renforcer le réseau BT/HTA. Où est la morale à faire des économies en reportant les… Lire plus »
quelle bureaucratie !!! franchement bravo !! il faut dire que l europe a interdit les compteurs reverses qui sont bien plus pratiques. ( quand le consommateur/producteur injecte de l electricite, le compteur electrique tourne en sens inverse et annule la consommation d electricite)
Il me semble qu’on paye aussi une part transport pour chaque kWh réinjecté. Ce n’est pas dans le tableau.
Et le fait que le solaire force les réacteurs nucléaires à ralentir presque tout les jours a 12h, donc à mécaniquement engendrer moins de revenu, alors que c’est le nucléaire qui tient le réseau à bout de bras tout l’hiver, vous n’en parlez pas, pourtant ils commencent à en parler en commission d’enquête sénatoriale. Il y un effet d’éviction, le solaire ramène les tarifs spot à zéro tout les jours a 12h, et c’est autant de fric en moins pour EDF. Quand on a déjà un système pilotable decarboné a coût fixe, inutile de rajouter du non pilotable à coûts… Lire plus »
L’article parle de l’autoconsommation, donc généralement de petites installations domestiques de moins de 6 kWc qui n’ont presque aucun impact sur le réseau mais un gros impact sur la facture des ménages. Pour les grosses installations PV de 100 MWc qui nécessitent de raser des forêts, c’est un autre sujet ! Devrait-on interdire les potagers au motif que ça risque de tuer le business des maraichers espagnols !??? On marche sur la tête…
Si l’on concentre la production, électriques ou de légumes, c’est la solution pour baisser les coûts de production. Si vous ne voulez pas que les prix montent, ne faites pas de concurrence au grand maraîcher qui vous garantissait les prix les moins chers d’Europe… Si le maraîcher ne produit pas proche de 100% en permanence il perd de l’argent et à 19h au pic de consommation vous êtes bien contents d’avoir EDF quand vos panneaux ne fonctionnent plus ? Donc vous remunerez moins le grand maraîcher mais vous restez 100% dépendant de lui à certaines heures de fortes demande. La… Lire plus »
Et si ça me plait de faire pousser mes tomates en été… C’est un passe temps pas plus idiot que d’aller faire du jet ski a Ibiza… Je continuerai a le faire meme si ça fait chuter les ventes du maraicher. Idem pour le PV. Ca me plait de produire mon électricité et je ne vois pas qui pourrai m’en empêcher ! Et a 19h, mes batteries alimentent le four sans problème… C’est ainsi.
Je ne suis pas contre le fait que les gens achètent des panneaux solaires et des batteries (regarde la durée de vie, le bilan exécrables en co2 par kwh des batteries et la rentabilité totale par rapport à de la sobriété branché sur le réseau) je suis contre les subventions et soutien, contre le fait que l’on oblige le grand maraîcher à tout racheter à des prix énorme, et contre le fait de permettre aux ménages aisés en maison d’acheter du PV chinois pour le mettre sur leur toi, et au final ce sont les ménages modestes en appartement qui… Lire plus »
Si les centrales pouvaient fournir la demande en hiver il n’existerait pas l’abonnement Tempo. Abonnement qui redevient abordable la nuit quand la consommation baisse. La demande d’électricité explose les journées d’hivers. Par conséquent les capteurs PV sont utiles ainsi que les éoliennes pour compléter les besoins en kw. Ce mixte permet de ne pas surdimensionner les futurs centrales qui sont financées avec nos impôts. Et, chose qui n’est jamais évoqué, le talon d’Achille quelles représentent en cas de conflit, ce qui se passe en Ukraine devrait faire réfléchir nos décideurs car 70% d’électricité consommée provient du nucléaire, c’est mettre pour… Lire plus »
Je pense pas que le PV complète grand chose en hiver !
Le nucléaire fournit tout ce qu’il pendant les pics de consommation mais ça ne suffit pas toujours.
Dans ces cas , c’est quasiment presque toujours des centrales à gaz ou charbon qui sont mises en route pour compléter.
Je pense que beaucoup de pays aimerait bien avoir 70% de leur électricité provenant du nucléaire, ça leur éviterait de GROSSES factures de gaz !!!
C’est exact pour les PV mais pas pour les éoliennes, elles peuvent tout à fait fournir le complément qui permettrait d’équilibrer le réseau.
Le monde des bisounours n’est pas le notre, avec 70% d’électricité fournie en grande partie par nos centrales nous avons un vrai talon d’Achille en cas de conflit. Un taré qui détruirait 2 ou 3 centrales verrait les Français s’entretuer pour survivre.
Et un taré qui détruirait les centrales charbon d’un pays qui produit son électricité avec du charbon ? C’est différent ?
Et un taré qui détruirait les centrales gaz d’un pays qui produit son électricité avec du gaz ? C’est différent ?
Reconstruire une centrale gaz ou charbon détruit peut être fait dès que la main-d’œuvre est disponible. Avec une centrale nucléaire détruite, le coeur radioactif provoque un site complètement invivable pour des centaines d’années…
Pour retrouver un site favorable et construire une nouvelle centrale (15 ans mini) bon courage, en attendant les Français ont intérêt à relancer l’élevage de canard pour confectionner de très bonnes couettes.
Ne jamais oublier que EDF et enedis sont public et presque monopole il est donc très tentant pour l’état d’avoir une gestion rémunératrice pour l’électricité sans compter les agents qui bénéficient de largesse sans véritable contrepartie avec syndicat ayant le doigts dans la confiture.
Cela n’a pas grande importance si le réseau est nickel les centrales au top la technologie de pointe et la dette a zéro.
Pour ceux qui ont la chance ou la volonté d’agir, une forte installation solaire plus batterie et un zeste de sobriété les fera se défaire du réseau ou presque.
Je pense qu’il faut voir un peu plus loin.
Des foyers qui consomment 2MWh annuel, ce ne sera pas la norme dans un futur sans fossile pour le chauffage/ECS.
Avec PAC et ECS thermo, on peux tripler la consommation annuelle.
L’autre soucis qui se profile, c’est l’immense différence de consommation sur le réseau entre l’été et l’hiver, surtout hors ville où la densité est plus faible.
On se retrouve avec une forte consommation pendant 3 mois, et une forte surproduction fin printemps et début été.
« On se retrouve avec une forte consommation pendant 3 mois, et une forte surproduction fin printemps et début été. »
Stockage chimique (ammoniac = du travail pour les salariés des électrolyseurs+raffineries) ou air comprimé injecté dans les anciennes nappes de gaz naturel en mer du nord (avec perte de rendement dû à la compression/décompression).
Autre solution : nous allons tous vivre sous les tropiques pendant l’hiver.
Oui, tout à fait d accord. On est un foyer de 3,5 personnes , en maison individuelle RT2012, avec chauffage pac, chauffe eau resistif, 2 radiants dans les chambres, et complément poêle à bois pour les jour tempo rouge. Et 2 VE efficients aui cumulent à eux 2 35 à 40000km/an. On consomme 7500kwh/an, dans le sud est. Et on fait plutôt attention et on a pas d équipement particulier, genre piscine qui augmenterait la note . Donc l hypothèse de départ des 2000kwh/an est franchement bancale, et peut même fausser les résultats et conclusions. Il faudrait refaire tous les… Lire plus »