La centrale nucléaire de Civaux / Illustration : Wikimedia.
La crise climatique n’attend pas et certains pays comme la France misent notamment sur le nucléaire pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Mais la complexité et la lenteur de mise en œuvre des projets de nouveaux réacteurs ne sont-ils pas un obstacle pour atteindre rapidement leurs objectifs climatiques ?
Concernant le changement climatique, tous les experts s’accordent à dire qu’il y a urgence à intervenir. Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publié en 2023 constate que le réchauffement au niveau mondial a déjà atteint 1,2 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Nous devons prendre des mesures immédiates pour contenir ce réchauffement sous la barre des 2 °C à l’horizon 2100, afin de préserver nos conditions de vie sur Terre.
Six nouveaux réacteurs nucléaires en France : suffisant pour le climat ?
La France a choisi de miser sur le nucléaire pour décarboner sa production électrique et atteindre ainsi ses objectifs climatiques. D’ailleurs, le mix électrique français est déjà dominé par l’atome, mais face à l’électrification massive des usages qui va naturellement entraîner une hausse de la demande, la construction de six nouveaux réacteurs de type EPR2 est prévue. Par la suite, la possibilité de construire huit nouveaux réacteurs sera étudiée.
Mais avons-nous le temps de construire ces nouveaux EPR ? Ne sera-t-il pas trop tard pour le climat lorsqu’ils entreront en service ? Récemment, le PDG du constructeur de réacteurs à l’uranium non enrichi, AtkinsRéalis, a déclaré au Financial Times que « nous devenons tous trop optimistes » en ce qui concerne les chantiers de réacteurs nucléaires. Selon lui, il faudrait « ralentir un peu, passer plus de temps sur la phase de planification ».
Ralentir sur le calendrier des EPR, n’est-ce pas risqué pour le climat ?
Mais avons-nous le temps de ralentir ? En France, les six nouveaux réacteurs, prévus pour être installés sur des sites existants, n’entreront pas en service avant 2035 pour la première paire et 2042 pour la troisième paire, si tout se passe comme prévu. Or, on l’a déjà vu avec le chantier de Flamanville : quand on parle d’EPR, il peut toujours y avoir des surprises et des retards.
Or, compte tenu de l’urgence climatique, on peut se demander si l’atome constitue un bon outil. En réalité, les six prochains EPR ne seront qu’une des clefs permettant de répondre aux enjeux environnementaux. Et ce ne sera pas la seule. La France compte déjà un parc nucléaire de 56 réacteurs dont il est question de prolonger la durée de vie jusqu’à 80 ans pour certains. Parallèlement, les énergies renouvelables vont progresser pour permettre de produire une électricité décarbonée, dans un temps plus rapide que les nouveaux réacteurs. Ainsi, la construction de nouveaux réacteurs, au rythme actuel, ne permettrait pas de répondre à elle seule aux objectifs environnementaux de la France. C’est la raison pour laquelle elle est accompagnée d’autres solutions comme la prolongation du parc nucléaire existant et les énergies renouvelables telles que l’hydroélectricité, le stockage, le solaire photovoltaïque, l’éolien et la biomasse.
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Même si la construction de grands barrages hydroélectriques parait compliquée sur le territoire, il n’en va pas de même pour les autres énergies renouvelables. Ainsi, les panneaux solaires fleurissent un peu partout sur les toitures, que ce soit chez les particuliers, mais également sur les grands bâtiments. Une loi a même prévu une obligation pour doter les grands parkings d’ombrières photovoltaïques. Les projets d’éolien sur terre et en mer se multiplient aussi et le législateur a assoupli les règles pour accélérer l’aboutissement de ces projets.
Pour autant, l’affirmation précitée du PDG d’AtkinsRéalis invitant à prendre davantage de temps sur la phase de conception des projets de réacteurs n’est pas dénuée de bon sens. Prendre le temps d’approfondir l’étude des projets permettrait peut-être de mieux les chiffrer, que ce soit en termes de coût et de délai, voire de choix technologique, évitant ainsi les déconvenues ultérieures. Pour prendre un exemple récent à ce sujet, le montant des six prochains EPR a déjà explosé. Initialement évalué à 51,7 milliards d’euros, il est passé à 67,4 milliards d’euros. Une augmentation qui s’expliquerait par l’allongement des délais d’élaboration des plans génériques du réacteur.
Commentaires
Construire des réacteurs dans l'urgence c'est augmenter les risques d'accident !
Au niveau des risques ce qu'il faut comprendre, c'est que plus vous allez développer des systèmes dangereux plus vous avez besoin de compétences. Hors avoir des compétences demande du temps et des expériences multiples. C'est donc pas à la sortie d'une école d'ingénieur qu'on aura acquit les compétences qui conviennent à la surveillance des multiples problèmes que posent la complexité de ces réacteurs.
La solution à la production d'énergie réside dans le stockage des Enr.
Puisque chacun peut voir qu'à certains moment Rte doit arrêter ou ralentir la production électrique pour ne pas faire sauter le réseau ? Alors qu'à d'autres on doit acheter du pétrole, du gaz ou du charbon pour assurer les besoins. On est donc une sorte d'organisation schizophrène, qui appauvrit les pays Européens ne possédant pas d'énergie autre que celle du soleil et du vent, en prévoyant de développer des énergies ,sans être capable d'apporter une solution de stockage, qui permettrait le pilotage de l'électricité produite, essentielle à la lutte contre le réchauffement et à l'indépendance énergétique..
. Le prix de l’uranium s’envole. Le cours de ce combustible a atteint 85,75 dollars (79 euros) la livre (environ 450 grammes) en décembre 2023, son plus haut niveau depuis 2007, a indiqué France info mardi 23 janvier. »
Actuellement, pour faire fonctionner ses 56 réacteurs nucléaires, répartis sur 18 centrales, EDF a besoin de 8 000 à 10 000 tonnes d'uranium naturel en moyenne chaque année.24 janv. 2022
85 / 450 X 1000 = 188 € /kg x 1000 = 188 000 €/ tonne x 7000 = 13 160 000 dollar /an
Avec ces 13 milliards chaque année combien pourrions nous construire d'éolienne de PV et de stockages ? Qui nous seraient plus utiles que d'abonder le panier percé des nucléairocrates !
Voilà la réalité !
Depuis des années on nous raconte qu'avec le nucléaire la France est indépendante en énergie ? Une indépendance qui nous coûte quand même 148 milliards ?https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/148-milliards-deuros-la-facture-des-importations-energetique-de-la-france-a-triple-en-trois-ans/
Or chacun peu constater ce qu'il en est réellement et ce que l'uranium va devenir du fait de la multiplication des centrales partout dans le monde !
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_r%C3%A9acteurs_nucl%C3%A9aires_en_construction
En réalité la France à développée ses centrales pour se doter der la bombe lorsque l'uranium ne valait pas grand chose. Mais il n'est pas nécessaire d'être un grand prophète pour comprendre qu'à mesure que se développe le nucléaire, le prix du combustible va continuer de se multiplier rapidement jusqu'à entrainer le pays vers les mêmes déboires que lors du premier choc pétrolier !
La prudence devrait donc inciter nos décideurs, pour peu qu'ils leurs reste encore un cerveau - s'ils ne l'on pas trop usé sur les banc de l' ENA , l'école des ânes,-pour favoriser la filière renouvelables en réouvrant nos usines à la fabrication des panneaux solaires et aux moteurs d'éoliennes .Qui même s'ils sont plus chers que les Chinois crée des emplois dans le pays plutôt que des chômeurs qu'on indemnisent ensuite , par des prélèvements sur la production de richesse dans le pays, ce qui incite nos entreprises à se délocaliser et appauvrir le pays et ses travailleurs, en plus de devoir acheter à d'autres ce que nous savions parfaitement faire avant !
Parce que la production éolienne et le solaire pourraient parfaitement être stockés en utilisant les STEP par exemple, l'air comprimé ou les batteries et ainsi on pourrait réduire la part du nucléaire gros émetteur de chaleur fatale et énorme consommateur d'eau dans un pays qui souffre déjà de la chaleur et parfois du manque d'eau !
A Toulouse on parle de changer le tarif de l'eau en fonction des saisons ? Tout est bon bon assommer le petit peuple, qui de toute façon ne comprend rien à rien !
Pendant ce temps de discussion, Macron se promene au Bresil pour negocier l achat d uranium. Il paraitrait qu on ait ete expulse du Niger....par les wagner...
Alain,
"Prendre davantage de temps dans la conception des projets de réacteur"
" Le montant a déjà explosé qui s'explique par l'allongement des délais d"élaboration des plans générique du réacteur" c'est totalement contradictoire, plus on attends plus ça coûte cher !
1) Il n'est pas anormal d'avoir des surcoûts en cours d'études sur des projets de cette importance au fur et a mesure que les études progressent.
2) Une fois que les études sont terminées, normalement les coût doivent être connus.
3) La réalisation doit être suivie de très près par les responsables des études
4) Compte tenu du temps de réalisation, il n'est pas anormal qu'il puisse y avoir des changements d'options en cours de réalisations pour tenir compte des progrès techniques.Ce qui entraine des coûts
supplémentaires qui ne sont pas anormaux pour autant.
5) Pour ceux et celles qui tiennent absolument à connaître ces coûts totaux dès la conception des projets, il y a une solution. Multiplier par X10 les coûts du projet au départ de façon à pouvoir se féliciter d'avoir économiser X5 à la fin de la réalisation!
D'autres part nous sommes d'accord que le nucléaire n'est pas la seule solution pour produire de l'énergie décarbonée. Il n'empêche qu'o,n le veuille ou non, que c'est la principale capable de fournir les quantités colossales nécessaires pour subvenir aux besoins futurs en augmentation exponentielle.
Donc, d'une part l'étude de l'EPR de Flamanville n'est pas terminée et d'autre part Macron à passé commande de six trucs dont il ne sait pas ce qu'ils sont !
"Principale", mais avec une part ridicule de 1,8% de l'énergie mondiale...
Heureusement qu'il y a les ENR pour compenser la division par 2 en 30 ans de la part du nucléaire
Le Giec (fig7 dernier rapport) dit exactement le contraire de ce que vous dites : le potentiel de decarbonation du nucléaire est très faible et hors de prix
Celui des ENR est ÉNORME et à coût dérisoire "inférieur au coût de référence", c'est à dire qu'investir dans les ENR coûte moins cher que de ne pas le faire.
L'AIE table sur 90% ENR en 2050
Sauf en France, bien sûr.
https://www.ipcc.ch/report/ar6/syr/figures/summary-for-policymakers/figure-spm-7/
Bonjour 430 milliards par réacteur,
Je ne comprends pas la réponse que vous m'avez faite.
Principale " mais avec une part ridicule de 1.8%de l'énergie mondiale.
D'une part je parlais prioritairement de la France puisque nous (je) n'avons pas notre mot à dire sur la décision des autres pays.
D'autre part les 1.8% de nucléaire mondial selon vos dires, vont évoluer, augmenter puisque rien que la Chine a en projet ou déjà en construction 60 réacteurs nucléaires.
Eux ils ont compris que les besoins futurs sont absolument colossaux.
L'Inde va suivre.
Ce n'est pas parce que les pays nucléaires ont arrêté leurs investissements pendant 30 ans qu'ils ne peuvent pas changer d'avis et les reprendre.
Je suis d'accord avec vous que les investissements dans le nucléaire sont ou devraient être énormes, mais si vous investissez 10 milliards dans le nucléaire qui peut produire 80% du temps, en tenant compte des arrêts techniques, vous devez investir 40 milliards dans les ENR pour produire la même quantité, puisque les ENR ne produisent que 20 à 25% du temps.
Vous dites que le GIEC dit que le potentiel de décarbonation du nucléaire est très faible ?
C'est là que je ne comprend pas ce que vous voulez dire ?
évidemment que le potentiel de décarbonation est faible puisqu'il,le nucléaire, est déjà quasiment décarboné dès la mise en route (hors construction).
Toutefois je suis d'accord sur le fait que puisqu'il faut 15ans pour construire une centrale nucléaire,un parc, nous n'avons pas d'autre choix que de construire des productions ENR en parallèle à la construction de centrales nucléaires pour assurer la production pendant 15 ou 20 ans.
Il faudra bien coordonner les 2 secteurs car la durée de vie d'un parc éolien n'est que d'une vingtaine d'années !
Salutations.
Vous faites rire avec vos supposés développement colossaux du nucléaire en Chine qui investi 14 fois plus dans les renouvelables que dans le nucléaire....les français n'arrétent pas de se regarder le nombril en pensant aux chiffres qui concernent la Chine.
https://www.boursier.com/actualites/economie/nucleaire-trop-lent-lourd-et-couteux-pour-sauver-le-climat-42257.html
Vous y lirez les promesses du nucléaire en Chine et depuis 2018 rien a changé si ce n'est que l'écart entre les investissements respectifs s'est encore creusé : :
La Chine a consacré 91 milliards de dollars au développement des énergies renouvelables en 2018 et seulement 6,5 milliards au nucléaire.
Petit complément sur la durée de vie du parc éolien :
- la plus vieille éolienne en service au Danemark est plus vieille que la plus vieille centrale nucléaire
- pour faire durer 40 ou 60 ans un réacteur nucléaire, il faut à peu près changer tous les éléments, sauf la cuve (ce qui pose un vrai problème car la cuve est fragilisée par le rayonnement neutronique, ce qui augmente le risque d'accident majeur), et ça coûte cher.
Si vous changez tous les éléments d'une éolienne tous les 30 ans, elle sera éternelle
- le prix des ENR est divisé par 10 tous les 10 ans, donc renouveler un parc ENR après 30 ans est quasiment négligeable alors que le grand carénage est estimé à 100 milliards par la cour des comptes (50 d'après EDF)
Bonjour Servière,
Nous n'avons pas notre mot à dire en France non plus. En 2017, macron disait dans son programme qu'il triplerait les ENR et baisserait le nucléaire et on voit le résultat...
L'AIEA espère depuis des années que la part du nucléaire augmente. La réalité est tout autre : ça baisse tous les ans.
En effet, les Chinois vont construire des centrales, mais il est très peu probable que la part du nucléaire augmente car le nucléaire ne représente que 2% des montants investis dans la transition énergétique. Donc les renouvelables vont augmenter bien plus vite (les ENR devraient être la 1ère source d'électricité au MONDE dans moins d'un an, d'après l'AIE)
L'enjeu de la décarbonation est URGENT si on veut garder un monde vivable : 2040 d'après L'ONU.
Donc la question est : si on a 10 milliards, comment les utiliser pour décarboner le plus possible d'ici 2040, soit 16 ans.
Et la, il est évident que ça ne peut pas être le nucléaire, avec 15 ans pour la construction d'un réacteur en moyenne dans le monde et beaucoup plus en France.
Le même montant dans les ENR réduira nettement plus les émissions GES.
Le calcul est détaillé dans ce rapport :
https://cdn.greenpeace.fr/site/uploads/2023/10/Rapport-lenteur-du-nouveau-nucleaire-vs-triptyque-SEENR-1.pdf
C'est d'ailleurs ce que dit le Giec, figure 7 de son dernier rapport.
https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/figures/summary-for-policymakers/figure-spm-7/
On voit clairement que le potentiel de décarbonation du nucléaire est très faible et hors de prix alors que celui des ENR est ÉNORME et à coût dérisoire :
Le Giec nous dit que le solaire et l’éolien peuvent contribuer à réduire d'environ 10 GteqCO2 les GES d'ici 2030 alors que le nucléaire ne pourrait réduire que d'environ 0,9 GteqCO2.
Et la plus grande partie de la réduction liée aux ENR serait "inférieure au coût de référence", c'est à dire qu'investir dans les ENR coûte moins cher que de ne pas le faire (tous ceux qui ont installé des panneaux solaires chez eux le savent).
A contrario, la plus grande partie de la réduction liée au nucléaire coûterait entre 50 et 200$ la t CO2 évitée.
Donc, entre une solution qui vous fait faire des économies et qui décarbone 10 GteqCO2 et une autre qui vous coûtera très très cher et qui ne décarbone que 0,9 GteqCO2, (+déchets, +dépendance à la Russie ou au Kazakhstan, risques accident ou terroriste ou guerre...), qu'est-ce que vous choisissez ?
On peut résumer cela :
1€ investi dans le nucléaire fera PEUT-ÊTRE baisser UN PEU les émissions APRÈS 2040 (sauf panne pendant 1 an comme à Taishan ou accident ou retard).
1€ investi dans les ENR fera AVEC CERTITUDE baisser BEAUCOUP PLUS les émissions TOUT DE SUITE.
Cette article rappelle des évidences que les nucléocratres refusent d'entendre.
Ça les énerve, alors qu'il est très modéré, puisqu'il cite 2035 pour le 1er EPR2 alors que tout le monde sait qu'EdF n'y arrivera pas.
Même le gouvernement table sur 2040-43, à cause du pb de vibrations du circuit primaire (qui a mis taishan au tapis pendant 1 an) qui oblige EDF à revoir la conception.
Il ne précise pas non plus que le Giec nous implore d'avancer la neutralité carbone en 2040 pour espérer garder un monde vivable.
Alors remplacer les 80% d'énergie fossile d'ici 2040 avec du nucléaire (aujourd'hui à 1,8% de l'énergie mondiale) et des réacteurs qui prennent 15 ans à construire, il faut vraiment avoir la foi pour y croire.
L'objectif de Macron est d'essayer d'éviter la faillite de Framatome et EDF, pas le climat.
Il n'y arrivera pas.