L’intégration des véhicules électriques sur le réseau électrique français passera nécessairement par une optimisation de celui-ci, et surtout un fonctionnement synchronisé entre ces véhicules et les bâtiments. Comment cet avenir électrique optimisé va-t-il se matérialiser ?

L’électrification progressive du parc automobile français va avoir des répercussions massives sur le réseau électrique, et sur la manière de le gérer. Dans son scénario de référence Futurs énergétiques, RTE estime que les véhicules électriques légers pourraient représenter 67 TWh d’électricité par an, soit davantage que les besoins électriques du secteur résidentiel qui devraient atteindre 65,3 TWh. Un futur qui peut être vu comme une contrainte colossale sur le réseau électrique, ou comme une opportunité de réfléchir à une nouvelle manière de gérer l’électricité.

L’association Équilibre d’Énergie (EdEn), qui œuvre pour la décarbonation de l’économie française et européenne, s’est penché sur la question et en a tiré plusieurs enseignements et recommandations.

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Faire du pilotage tarifaire statique un standard

Si on ne comptait qu’environ 1 million de véhicules 100 % électriques en 2023, ce chiffre devrait rapidement grimper pour atteindre 7,3 millions dès 2030, puis 15,6 millions en 2035. De ce fait, il est important de prendre dès à présent la mesure des contraintes que l’arrivée de ces véhicules pourrait causer au réseau. Sans optimisation spécifique, la recharge de ces véhicules à des moments de la journée similaires pourrait notamment causer des appels de puissance difficiles à satisfaire. Dans le même temps, le développement massif de l’énergie photovoltaïque pourrait engendrer des pics de production potentiellement difficiles à répartir, en l’absence de mécanismes incitatifs de consommation durant ces périodes.

C’est pourquoi, le pilotage tarifaire statique doit être systématisé en prenant en compte les spécificités des véhicules électriques. Le pilotage tarifaire statique repose sur la même idée que l’option heures pleines / heures creuses : son principe consiste à inciter les utilisateurs à préférer certaines plages horaires pour recharger leur véhicule grâce à des tarifs préférentiels.

La systématisation de cette solution nécessitera tout de même la connexion directe de la borne de recharge au compteur communicant, pour que la recharge démarre automatiquement au moment des heures « creuses ».

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Avant d’ouvrir la voie à la recharge bidirectionnelle

Si le pilotage tarifaire statique constitue une avancée, il n’est qu’une première étape vers une bien plus grande synergie entre les véhicules électriques et leurs environnements. L’avenir est plutôt recharge bidirectionnelle, appelée V2H (Vehicle-to-Home) ou V2G (Vehicle-to-Grid).

La V1G, ça existe aussi

La recharge bidirectionnelle, qui est encore contrainte par de nombreux sujets techniques, sécuritaires et législatifs, pourrait passer, dans un premier temps, par le développement du pilotage dynamique monodirectionnel. Celui-ci consiste à moduler les périodes de recharge des voitures électriques en fonction de paramètres évolutifs ou d’événements extérieurs. Il peut s’agir d’un signal tarifaire, mais également de la puissance maximale qu’un bâtiment peut délivrer, ou encore de la météo.

Plus simple à mettre en œuvre que les V2H et V2G, la V1G nécessite tout de même la commercialisation de bornes de recharges capables de communiquer avec le véhicule, sans compromettre les données privées de l’utilisateur de la borne, ou de la voiture.

La recharge bidirectionnelle de type V2H pourrait permettre aux utilisateurs d’optimiser leur facture d’électricité en rechargeant la batterie de leur voiture électrique quand les prix sont faibles, et d’utiliser cette électricité lorsque les prix sont plus élevés. L’avantage est double : en plus de permettre aux utilisateurs de moins dépenser, ce mécanisme soulagerait le réseau électrique lorsque la demande est la plus élevée. Enfin, le V2H optimiserait une installation photovoltaïque en stockant sa production dans la batterie de la voiture.

Ce système a pour principale limite la capacité d’absorption maximale du bâtiment. Pour aller plus loin, le V2G irait plus loin en utilisant l’électricité stockée dans les batteries des véhicules électriques pour alimenter le réseau en cas de forte demande.

Des enjeux à adresser avant la démocratisation de la recharge bidirectionnelle

Si les synergies entre bâtiments et véhicules électriques ont un fort potentiel, la route est longue avec leur pleine exploitation. D’un point de vue technique, il faut d’abord permettre la généralisation de bornes compatibles avec cet aspect bidirectionnel. Comme pour la V1G, il est également indispensable que les bornes en question puissent communiquer avec les véhicules rechargés, sans toutefois compromettre la sécurité des données des utilisateurs.

Des V2H et V2G performantes passeront également par la mise en place d’un protocole de communication sûr et efficace entre la borne et la maison connectée, à la manière du protocole Matter. Enfin, EdEn note qu’il faut la démonstration qu’une telle utilisation des batteries n’entament pas leur durée de vie, et pénalisent ainsi leurs utilisateurs.

Pour finir, le déploiement de la V2G passera par la gestion de problématiques réglementaires et économiques sur le sujet, notamment pour la caractérisation de l’origine de l’électricité réinjectée ou la fiscalité de celle-ci.