Illustration : Révolution Énergétique.
Plusieurs professeurs d’universités allemandes ont lancé une pétition contre l’abandon du nucléaire outre-Rhin. Les scientifiques estiment la filière indispensable dans le contexte actuel de crise énergétique et climatique.
L’Allemagne a décidé de sortir de l’atome avant de se débarrasser des énergies fossiles. Si la dernière centrale nucléaire doit être fermée au printemps 2023, le pays promet d’abandonner le charbon à l’horizon 2030. Il n’a pas prévu de sortir du gaz fossile pour la production d’électricité.
L’électricité reste très carbonée en Allemagne
Une stratégie surprenante sur le plan climatique. Car, malgré l’essor remarquable des énergies renouvelables (64,9 GW d’éolien et 62,5 GW de solaire installés à ce jour), notre voisin allemand produit une électricité toujours très carbonée : 330 g eqCO2/kWh en 2021, selon Electricity Maps.
Ses émissions déclinent année après année, mais demeurent élevées au regard de ses voisins plus nucléarisés. La France a par exemple émis 64 g d’eqCO2/kWh en 2021 (67 % de nucléaire dans son mix électrique), la Belgique 163 g (46,6 % de nucléaire) et l’Espagne 163 g (20,6 % de nucléaire).
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L’abandon de l’atome ralentirait donc la baisse des émissions de gaz à effet de serre en Allemagne. Pour ne rien arranger, il contribuerait aussi à fragiliser son approvisionnement électrique dans le contexte actuel de crise énergétique, selon 19 professeurs en fonction au sein d’universités allemandes.
Dans une pétition lancée le 25 juillet 2022 sur le site du Bundestag, ces scientifiques exigent « l’abrogation immédiate des paragraphes sur la sortie du nucléaire [contenus dans la loi allemande, NDLR] » et « un examen de l’autorisation d’exploitation liée à la sécurité afin de permettre aux centrales nucléaires allemandes de continuer à fonctionner ».
À lire aussi L’électricité nucléaire française serait incroyablement bas-carbone selon EDF« En mettant unilatéralement l’accent sur le soleil, le vent et le gaz naturel, l’Allemagne a manœuvré vers la pénurie d’énergie. La hausse des prix de l’énergie et la baisse de la sécurité d’approvisionnement compromettent la compétitivité et la prospérité. La sortie du nucléaire allemand exacerbe ces dangers et, avec la production d’électricité actuelle au charbon, ralentit la protection du climat mondial » affirme la vingtaine de professeurs.
L’éolien et le solaire, alliés du nucléaire
« Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) décrit l’énergie nucléaire comme un instrument de protection de climat. L’Union européenne classe l’énergie nucléaire comme une source durable. Sur cette base, nous préconisions la poursuite de l’exploitation des centrales nucléaires allemandes en tant que troisième pilier de la protection climatique, aux côtés du soleil et du vent » déclarent-ils dans l’argumentaire de la pétition.
La liste des 19 professeurs à l’origine de cette initiative peut être consultée sur ce document. Pour qu’elle puisse être examinée par la commission des pétitions du Bundestag, la requête doit récolter au moins 50 000 signatures. Un objectif qui ne sera probablement pas atteint à temps. Alors qu’elle sera clôturée le 14 octobre, la pétition comptait un peu moins de 24 000 signataires au 3 octobre.
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Commentaires
Prolonger les 3 centrales permettrait à l'Allemagne d'économiser au plus entre 1 et 2% du gaz total consommé, donc ça ne peut pas être considéré comme une solution à la pénurie de gaz russe actuelle. Par contre si les particuliers baissaient par exemple leur consommation de gaz de 10%, cela entraînerait une baisse de 5% de la consommation totale, donc bien plus efficace que de prolonger ces 3 centrales.
En tout cas on aurait la même puissance installée en France qu'en Allemagne sur les ENR (Eolien, Solaire, Step) et bien on ne consommerait plus de gaz et on aurait pas un prix de l'elec qui grimpe en flèche !
Oula, vous êtes sûr?
Qu'est-ce qui définit le prix de l'élec sur le marché européen?
C'est la quantité d'élec disponible versus la demande attendue à une certaine date dans le futur (plus ou moins lointain selon les contrats d'achats).
Et donc les prix sont fixés sur les quantités d'élecs qui peuvent être garanties disponibles à la période visée.
Par exemple, quelle quantité d'élec sera disponible en Février 2023?
On ne peut que compter sur les sources pilotables à cette date puisque la météo est imprécise.
Celles-ci font défaut (nucléaire en faible prod en France et centrales à charbon fermées).
Du coup, les prix s'envolent.
Notez que les sources intermittentes n'interviennent pas dans le calcul.
Sur le marché de gros immédiat (spot), c'est un peu pareil même si les renouvelables jouent beaucoup plus: si peu de vent et de soleil, ce sont les sources pilotables qui font le prix.
Celles-ci manquent en Europe en général et donc les prix s'envolent encore.
La garantie des prix dans une certaine fourchette ne peut être offerte que par des sources piltoables (Hydraulique, nucléaire de préference, mais surtout charbon et gaz en Europe)
J'ai bien compris la problématique du prix actuel de l'elec, mais mes propos prenaient pour hypothèse que nous avions la production ENR de l'allemagne, STEP comprise.
Il est vrai que pour cet hivers si on ne rallume pas les réacteurs prévus ce sera compliqué.
Mais en partant du principe que les remises en route sont effectuées normalement...
Si on prend ces derniers mois la production ENR allemande est supérieure à notre consommation de gaz qui est de l'ordre de 5 GW. Donc cela permettrait d'économiser l'eau (hydraulique classique) et de remplir les STEP. En Allemagne ils ont 10GW de Step.
Ces réserves (hydraulique + STEP) pilotables pourraient nous permettre de limiter énormément l'usage du gaz car de toute façon nous n'avons que 12GW de capacité (Gaz).
Bon même s'il est difficile de se projeté pour cette hivers, cela aurait été vrai en septembre.
Et il me semble bien que les centrales à charbon ne soient pas fermées, même si elles ne produisent pas actuellement.
C'est évident que les ENRs effacent des fossiles dans la production électrique. Ce qui sera encore le cas en France jusqu'en 2050-60.
Par contre, les ENRs ne garantissent pas le prix de l'élec et ne permettent pas de maintenir le prix dans une fourchette contrôlée.
Parce qu'elles sont imprévisibles.
Ce qui permet un contrôle des prix: ce sont les contrats de longs termes (sur plusieurs années à prix fixe) qui n'est possible que pour les centrales pilotables qui peuvent garantir une puissance fournie à date.
Donc oui, des ENRs comme en Allemagne réduiraient notre dépense de gaz.
Mais non, les prix ne seraient pas beaucoup différent de ce que nous avons aujourd'hui puisque l'appel de puissance pilotable serait toujours en déficit.
C'était le propos de mon premier message. Désolé s'il n'etait pas clair.
On ajouter en soutien à mes arguments le fait que l'Allemagne vient de mettre 200G€ de budget pour limiter leur inflation qui atteint 10% cette année.
En plus de réouvrir 27GW de centrales à charbon et de prioriser les trains transportant du charbon sur ceux qui transportent des passagers.
Avec 200G€, on fait 10 EPRs au prix du prototype de Flamanville. Et c'est seulement sur 1 an.
À quoi servent donc les 500G€ investits dans les renouvelables depuis 20 ans en Allemagne?
Qu'ont-ils sécurisé?
Les milliards investis par les Allemands dans le renouvelable ont permis d'une part de sérieusement diminuer leurs émissions de GES et d'autre part de faire chuter les coûts de l'éolien, ce qui nous permet maintenant d'avoir une transition énergétique abordable (voir le rapport de RTE).
Sans compter qu'ils ont prouvé par l'expérience qu'on peut très bien avoir un réseau qui tourne avec une très forte proportion de sources intermittentes, ce qui n'était pas accepté par tout le monde il y a encore quelques années.
Les 200G€, c'est sur 2 années et c'est pas encore sur que ça arrive vraiment comme prévu: l'Europe pourrait bien bloquer le plan pour distortion de concurrence. La réouverture des centrales en réserve actuellement ne veut pas dire qu'elles vont tourner à bloc tout le temps. Pour l'instant sur l'année 2022, les renouvellables ont une part plus importante que l'année dernière et se rapprochent de leur record de 2020.
Pour le prix, ce n'est effectivement pas certain du tout étant donné le fonctionnement aberrant de ce marché. Par contre, on n'aurait aucun risque black-out cet hiver et on n'aurait pas besoin d'importer de l'électricité fossile de partout (y compris d'Allemagne) comme on le fait cette année.
Ben en fait, vous ne pouvez pas le savoir: cela dépend de la météo.
S'il fait doux avec du vent et du soleil, vous avez raison.
S'il fait froid à cause d'un anti-cyclone d'hiver (donc sans vent et très peu de soleil), ben les prix s'envolent et nous devront importer du charbon allemand.
Ce qui manque, ce sont les capacités pilotables.
RTE, l'ASN et mëme EDF le disent depuis longtemps. Plus de 10 ans pour l'ASN.
Il faut noter que ce qui fait la robustesse du réseau électrique allemand, c'est justement qu'ils ont maintenus leur capacités pilotables. Un peu de remplacement de charbon par du gaz, des centrales sous cocons qu'ils redémarrent maintenant (+27GW quand même).
En France, nous avons fermé autour de 12 GW de capacité pilotable (principalement charbon et mazout, et Fessenheim). Ce sont ces capacités qui font défaut aujourd'hui puisque nous n'avons plus de marges pour compenser un aléa sur nos moyens de productions pilotables.
Cet aléa est aujourd'hui sur le parc nucléaire puisque c'est l'essentiel de nos moyens pilotables, mais il pourrait être sur d'autres centrales (par exemple, barrages hydrauliques) dans une autre configuration. Ce sont les marges pilotables qui font la robustesse du système électrique.
Nous payons cette absence d'anticipation aujourd'hui.
Si en fait, on peut le savoir à peu près, puisque RTE a fait le boulot dans son rapport « futurs énergétiques 2050 ».
Même avec un grand nombre de réacteurs en rade comme maintenant, on se trouverait avec des capacités nucléaires de l'ordre de celles du scénario N2 dans lequel 2TWh de production thermique sur l'année devraient pouvoir assurer la sécurité d'approvisionnement avec 5GW de capacité. Elle est à l'heure actuelle de près de 50TWh, c'est à dire qu'au lien de devoir des économies de bout de chandelle pour baisser de 10% notre conso, on aurait bien de la marge.
J'ai du mal avec votre calcul: L'appel de puissance d'été française est typiquement comprise entre 40 et 50GW et en hiver entre 70 et 90 GW.
Du coup, je vois mal comment les 5GW d'appro thermique pourraient compenser les variations de 20GW en hiver.
La réponse est bien dans les scénario RTE: les "appels de flexibilités de la demande". En gros, accepter de fermer des usines pour passer la pointe.
Dans N2, c'est 15GW prèts à s'effacer sur demande qui s'ajoutent bien aux 5GW de capacités thermique que vous citez.
Bref, le plantage économique garanti si en plus on souhaite réindustrialiser ou populariser le train (ca prend quelle forme un effacement de la demande à la SNCF qui est le premier consommateur d'élec en France?).
Mais même le scénario N03 necessite 13GW de "flexibilités".
Réindustrialisation ou décarbonation, j'ai peur qu'il faille choisir.
Ce ne sont pas mes calculs, mais les chiffres du rapport de RTE.
J'ai pour le coup beaucoup de mal à vos calculs qi se basent sur une différence été/hiver, alors que ce la question est de combien de thermique nous aurons besoin en hiver. La gestion ne se limite naturellement pas au thermique. Nous avons de l'hydro, des STEP et la gestion de la consommation. Les scénarios de RTE gardent une capacité d'effacement du même ordre que ceux d'aujourd'hui. Et imaginer qu'on va se planter économiquement parce que 'on arrête une usine quelques heures n'est pas très sérieux (litote).
mm, j'ai du mal à vous comprendre sur ce dernier message: mes 15GW d'effacements/flexibilités viennent du rapport RTE ; en plus des steps, hydro et thermique à flamme.
En 2022, la capacité d'effacement est de 2GW et passera à 2,7GW en 2023, encore loin des 15GW à viser.
Je maintiens donc mon argument sur le risque que cette flexibilisation x5 ou x7 exerce sur une réindustrialisation souhaitée.
Le rapport RTE mentionne d'ailleur dans son "enseignement #11" que ce besoin de flexibilités par gestion de la consommation est un pari risqué si il vient en supplément d'une forte pénétration d'ENRs qui accroissent la probabilité de les mobiliser. Et donc dépasser les "quelques heures".
Enfin, dans l'industrie quelques heures sans énergie egale plusieurs jours sans production.
Je repose ma question d'un autre commentaire: À quoi ressemble un appel de flexibilité (litote là aussi) pour la SNCF de "quelques heures?
Sans doute 2 jours de gros bazar sur le réseau. Une illustration.
J'aimerais que vous m'indiquiez d'où viennent ces ces 15GW d'effacement, car dans le rapport, ils partent de 3GW actuels et estiment pouvoir les augmenter en proportion de la hausse de l'électrification du secteur industriel. La grosse différence vient ensuite de l'effacement des électrolyseurs.
Quant à la SNCF (votre tournure n'est pas une litote, mais ce n'est pas capital), ça doit ressembler à peu près à un jour de grève, ou une semaine de confinement.
Sur le rapport RTE, page 17, "LES SCÉNARIOS DE MIX DE PRODUCTION
À L’HORIZON 2050", je lis 13-15GW selon les scénarios près de l'icône légendée "Flexibilités de la demande (hors V2G)".
Ensuite, ces flexibilités ont un coût: On compense les effacement pécunièrement.
L'ancien président de RTE était un fan de cette méthode pour introduire plus de renouvelables.
C'est comme tout: à petites doses, pas de soucis. À plus grande échelle, les impacts augmentent et l'acceptabilité d'une technologie devient un problème (nucléaire, éoliennes, etc.)
...et concernant les coûts, il y a aussi un chapitre dédié. Ils sont passablement proches de l'un à l'autre, le scénarios nucléarisés étant environ 10% moins chers avec des hypothèses financières favorables à celui-ci.
Ah, mais vous parlez donc simplement du petit résumé avec les principaux résultats ?
Ils prennent donc aussi la flexibilité des électrolyseurs en compte. J'étais vraiment étonné. Pour avoir une meilleure idée, consultez vraiment le chapitre dédié (le 7eme intitulé sécurité d'approvisionnement du réseau).