Le silicium règne toujours en maître sur le monde de l’énergie solaire. Mais les cellules photovoltaïques organiques pourraient enfin réussir une percée. Des chercheurs, en effet, viennent de comprendre comment doper leur rendement.

La technologie photovoltaïque organique a fait son apparition il y a plusieurs décennies maintenant. Elle compte sur des matériaux à base de carbone pour absorber la lumière du soleil et la transformer en électricité. Elle permet de fabriquer plus facilement et à moindres frais, des cellules solaires plus fines, plus légères, plus flexibles, plus résistantes et même translucides. Elle peine pourtant à s’imposer sur le marché. Notamment parce que son efficacité reste faible. Alors que les cellules photovoltaïques à base de silicium affichent un taux de conversion d’environ 25 %, celui des cellules solaires organiques — aussi appelées polymères — a longtemps été inférieur à 10 %.

À lire aussi Comment fonctionne un panneau photovoltaïque ?

Le fonctionnement complexe des cellules photovoltaïques organiques

Puis sont arrivés des semi-conducteurs organiques que les scientifiques qualifient d’accepteurs non fullerènes (NFA). Ils ont permis de faire grimper l’efficacité des cellules photovoltaïques organiques pour se rapprocher peu à peu de la barre des 20 %. Comment ? Les scientifiques l’ignoraient.

Aujourd’hui, dans la revue Advance Materials, une équipe de l’université du Kansas (États-Unis) présente enfin une explication. Les physiciens ont en effet découvert un mécanisme microscopique qui permet de comprendre pourquoi les NFA surpassent ainsi les performances des autres semi-conducteurs organiques.

Pour comprendre, rappelons le principe de fonctionnement d’une cellule photovoltaïque. Lorsque le rayonnement solaire frappe une telle cellule, les électrons des semi-conducteurs qui la constituent vont se trouver excités et se mettre en mouvement vers les électrodes. C’est ce qui génère l’électricité. Mais dans un semi-conducteur organique, les choses ne sont pas aussi simples. Parce que l’électron excité reste généralement lié à son homologue positif que les scientifiques appellent « trou ». Ainsi, trop souvent, pour qui veut générer de l’électricité, l’ensemble produit une quasi-particule neutre, un « exciton ». Pour séparer l’électron de son trou, un autre matériau intervient. Un matériau dit « accepteur d’électrons ». Un matériau qui attire tellement l’électron que ce dernier finit par abandonner son trou. Le tout de joue à l’échelle du nanomètre, soit du milliardième de mètre.

À lire aussi 25,2 % : rendement record pour ce panneau solaire commercial

La physique quantique à la rescousse

Maintenant que les choses sont posées, revenons à nos physiciens de l’université du Kansas. Ils sont parvenus à suivre l’énergie des électrons excités dans leur cellule photovoltaïque organique avec une résolution temporelle inférieure à la picoseconde, soit à un millionième d’un millionième de seconde. Et ce faisant, ils ont observé qu’au lieu de très classiquement — comme une tasse de café refroidie lorsqu’elle reste sur la table — perdre de l’énergie dans leur environnement, certains électrons excités dans l’accepteur non fullerène peuvent en gagner.

Pour expliquer le phénomène, les chercheurs invoquent un comportement quantique des électrons. Ils semblent alors exister sur plusieurs molécules simultanément. Et lorsque ces molécules sont organiques et disposées dans une structure nanométrique spécifique, l’entropie totale du système augmente — c’est ce qu’exige la deuxième loi de la thermodynamique — non pas, comme dans le cas classique, quand un objet chaud transfère de la chaleur à son environnement froid, mais quand les excitons neutres récupèrent de la chaleur de leur environnement. Ils se dissocient alors en charges positives et négatives qui peuvent produire un courant électrique.

Si vous vous demandez pourquoi tant d’effort pour comprendre le phénomène alors qu’il suffisait de l’exploiter, les chercheurs vous expliqueront que maintenant qu’ils savent ce qui se passe au cœur des NFA, ils vont pouvoir concevoir de nouvelles nanostructures qui permettront de tirer le meilleur parti du flux d’énergie et améliorer ainsi un peu plus les performances des cellules photovoltaïques organiques. Accessoirement — ou pas —, la découverte pourrait aussi être exploitée pour la production de carburants organiques grâce à des photocatalyseurs plus efficaces à convertir le dioxyde de carbone (CO2) grâce à la lumière du soleil.