Vous souhaitez installer une éolienne sur le toit de votre domicile ou dans votre jardin ? Attention ! De nombreux particuliers déchantent peu après l’achat d’une éolienne domestique, faute d’avoir minutieusement étudié la pertinence de l’installation. Il est impératif de vérifier certains aspects afin d’éviter les mauvaises surprises.
Il n’est pas difficile d’épater un client potentiel dans un domaine aussi mal connu que l’éolien domestique. Chacun d’entre nous a la sensation qu’il y a toujours eu du vent, et que celui-ci fera toujours tourner les pales d’une éolienne. Certes, mais combien de braves citoyens ont une idée précise du potentiel venteux de leur site, et peuvent évaluer la puissance de la turbine à installer pour couvrir leurs besoins propres ? S’il est clair que les caractéristiques techniques sont un élément important à connaître, de même que la vitesse de démarrage, le prix de la machine, ou les coûts des fondations en béton, il faut avant tout partir des notions de base.
À lire aussi Il construit sa propre éolienne et l’associe à des panneaux solaires1 – Analyser le gisement de vent
C’est la question de base : quel est le gisement de vent à l’emplacement exact de la future éolienne ? Et il faut éviter d’y répondre par des impressions. Au même titre que le pétrole sera exploité là où il y a un gisement, tout comme le cuivre, l’or ou le lithium, il faut exploiter le vent là où il est prouvé que le vent souffle de façon régulière.
D’abord parce que, selon un principe universel (loi de Betz), une éolienne ne pourra jamais convertir en énergie mécanique plus de 59 % de l’énergie cinétique contenue dans le vent. Ensuite parce que chaque site présente des caractéristiques différentes. Les vents ne soufflent pas de la même manière selon l’altitude, les obstacles, la végétation environnante, selon que le site est en bord de mer, ou dans un couloir de vent. Tout cela peut varier fortement d’un site à l’autre, même à quelques mètres d’intervalle.
Une petite étude de vent auprès d’une société spécialisée viendra bien sûr gonfler quelque peu la facture, mais avant d’investir dans une éolienne, il semble prudent de dépenser entre 2 000 et 5 000 € de plus afin de s’assurer que le site est balayé par des vents suffisants. De trop nombreux citoyens ont dépensé 30 000 € voire 50 000 € pour une éolienne installée dans un creux de vallée et dont le rotor n’a jamais fait un tour complet.
Méthode 1 : le mât de mesures
Pour une éolienne de petite puissance, seul un mât de mesure enregistrera les vitesses de vent réelles. La « rugosité » du sol (l’influence du relief et de la végétation sur la vitesse du vent) étant plus sensible à faible hauteur, le mât de mesure rendra un rapport plus fiable que la modélisation numérique. Les inconvénients principaux du mât de mesure sont : un coût élevé, la longueur des délais qu’il nécessite (une étude s’étale au minimum sur 6 mois, idéalement sur une année complète pour capter les vents en toute saison), et son manque de fiabilité (une tempête violente peut créer une panne ou une rupture de l’enregistrement).
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Pour ces raisons, il est conseillé de demander à un bureau spécialisé une mesure de vent en micro-siting par modélisation informatique. Grâce à cette technique, qui ne nécessite pas d’ériger un mât de mesure, vous obtiendrez pour une somme modique la distribution statistique des vitesses de vent sur 2 ou 3 hauteurs différentes. Et en quelques jours seulement !
En multipliant simplement la production de l’éolienne en fonction de la vitesse du vent par la distribution des fréquences observées de ces vitesses, on peut aisément calculer le productible annuel, c’est-à-dire la production théorique que l’éolienne devrait fournir chaque année.
Le fabricant doit vous fournir la courbe de puissance de l’éolienne (tableau qui indique le nombre de kWh que produira la turbine à chaque niveau de vitesse du vent). Assurez-vous que celle-ci est fiable, car les courbes de puissance présentant des chiffres farfelus sont légion !
2 – Choisir une éolienne aux normes en vigueur
Au-delà de ce que vous racontera le délégué commercial, il existe un critère objectif sur lequel on peut s’appuyer les yeux fermés : la conformité à la norme IEC 61400-2. Ici encore, le choix pour une machine certifiée entraînera un surcoût. Mais la qualité se paie. Avec une machine « certifiée IEC », votre tranquillité est assurée. Veillez simplement à ce que l’éolienne soit bel et bien certifiée, et non pas « en cours de processus de certification », une astuce dont certains fabricants abusent pour tromper le chaland.
La norme IEC 61400-2 (International Electrotechnical Commission) est une norme européenne reconnue dans une centaine de pays qui s’applique à toutes les éoliennes de petite puissance. Elle couvre des domaines aussi variés que la résistance des matériaux, la solidité des composants électriques et électroniques, la fiabilité de la génératrice, la qualité du béton à utiliser, etc.
Une éolienne certifiée conforme à la norme IEC 61400-2 a dû subir toute une série de tests dans des conditions extrêmes pour s’assurer qu’elle résistait aux pires intempéries : au niveau des pales, de la turbine, des fondations, des mécanismes électriques, qu’elle respectait les niveaux de bruit, et, surtout, que sa production d’électricité était conforme à la courbe de puissance annoncée. Une éolienne « certifiée IEC » offrira donc infiniment plus de garantie de fiabilité.
Ce processus de certification a néanmoins un coût pour le fabricant. Estimé entre 200 000 et 300 000 € voire davantage, celui-ci se répercute inéluctablement sur le prix de vente. D’autant plus qu’il s’agit de marchés restreints, aux volumes de vente encore très limités.
3 – Choisir le meilleur emplacement
Méthode 1 : sur un mât fixé au sol
Visez toujours plus haut ! La hauteur du mât est sans nul doute le second critère le plus important. Il s’agit d’un principe universel : plus haut vous hisserez la turbine, et plus celle-ci captera des vents forts, laminaires et constants. Observez les parcs éoliens construits dans nos campagnes : si la hauteur totale des machines culminait à 100 mètres (pale à son apogée comprise) il y a 20 ans, ce sont à présent des turbines de 180 mètres, voire plus de 200 mètres de hauteur totale que l’on installe. Et les premières demandes de permis pour implanter des éoliennes atteignant les 240 mètres sont déjà introduites en Flandres.
L’État français a cru bien faire et pouvoir stimuler l’autosuffisance énergétique en exonérant de permis de construire les petites éoliennes inférieures ou égales à 12 mètres de haut. C’est une grave erreur ! Car s’il est vrai qu’à 12 mètres de haut, les nuisances visuelles pour l’environnement sont relativement faibles, le souci est qu’à une telle hauteur, le vent est quasi inexistant. Ou plutôt, la « rugosité » du sol et les obstacles naturels qui s’y trouvent, tels que les bâtiments, les poteaux ou les arbres atténuent fortement sa force. Il est dès lors très difficile de rentabiliser une petite éolienne, quelle que soit sa puissance.
De nombreux projets seront ainsi écartés naturellement : un mât plus élevé implique non seulement un surcoût, mais aussi un terrain plus vaste et des fondations en béton plus volumineuses.
Méthode 2 : à proscrire, l’éolienne en toiture ou façade
Les éoliennes placées en toiture, au prétexte qu’elles bénéficieront de l’effet tremplin créé par le toit, sont à proscrire. Malgré des performances annoncées souvent très attirantes, mais toujours fallacieuses, aucun modèle d’éolienne en toiture n’a produit de résultats satisfaisants.
La raison est simple à comprendre : le vent évite les obstacles, et au lieu de s’engouffrer dans l’orifice placé pour capter le vent, crée une sorte de bulle au sommet de l’immeuble. À l’intérieur de cette bulle se forment des turbulences inexploitables, car de faible intensité, et avec un faible potentiel énergétique. De plus, les vibrations émises par l’éolienne sont susceptibles d’endommager la structure de votre maison à long terme, outre l’amplification des nuisances sonores.
4 – Choisir comment écouler la production électrique
Méthode 1 : l’autoconsommation sans batteries
En France, celui qui installe une éolienne domestique chez lui a tout intérêt à autoconsommer au maximum l’électricité produite. En effet, le prix auquel vous pouvez vendre l’électricité produite est très inférieur à celui de l’électricité achetée. Vous devez donc l’autoconsommer « en direct » de la même façon qu’une installation photovoltaïque. Il vous faudra connaître la puissance générée par l’éolienne en temps réel afin d’adapter la mise en route de vos appareils. Ces opérations peuvent être automatisées par des relais et dispositifs connectés, dont vous pouvez étudier l’installation avec le professionnel en charge du déploiement de votre éolienne. Il est ainsi possible de synchroniser le fonctionnement d’un ballon d’eau chaude ou la recharge d’une voiture électrique avec la production éolienne.
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Si votre habitation se situe en dehors d’une ZDE, vous pourrez quand même revendre votre électricité à un fournisseur agréé comme par exemple Enercoop, mais ces fournisseurs n’y sont pas contraints, et les tarifs appliqués ne sont pas réglementés.
Méthode 2 : l’autoconsommation avec batteries
Pour davantage de flexibilité, vous pouvez choisir de stocker la production de votre éolienne dans une batterie. Cela permet d’autoconsommer l’intégralité de votre production sans aucune contrainte. Un jour très venteux permettra de recharger entièrement la batterie, pour l’utiliser ensuite les jours de vent nul ou faible. Le seul obstacle aux batteries est leur coût, entre 700 et 800 €/kWh en 2022, ce qui les rend difficilement rentables même à long terme. À moins de disposer d’une installation photovoltaïque en parallèle, d’un gisement de vent exceptionnel ou d’habiter dans un logement non raccordé au réseau public, l’intérêt économique d’une batterie est souvent faible.
6 – Réaliser les démarches administratives
6.1 – Permis de construire et voisinage
Une demande de permis de construire auprès de la commune concernée ou de la préfecture du département est nécessaire pour les éoliennes dont la hauteur du mât est supérieure à 12 mètres. Attention, pour de petites machines de 12 mètres ou moins, il faudra quand même déposer à la mairie une déclaration préalable de travaux avant d’entamer le chantier. Mais avant d’entreprendre ces démarches, vérifiez d’abord que vous ne vous trouvez pas dans une zone où les éoliennes sont interdites par les militaires, ou une zone protégée ou classée par le Plan Local d’Urbanisme (PLU), lequel est consultable dans votre mairie. Par ailleurs, avant de vous lancer dans le projet, nous vous conseillons vivement d’en discuter avec vos voisins pour prévenir tout conflit lié au bruit ou à la vue de l’installation.
6.2 – Les aides
L’acquisition d’une éolienne domestique représente un coût important. En fonction de la puissance de la turbine, comptez entre 10 000 et 90 000 €, installation comprise. Les revenus générés par la vente de l’électricité produite excédant rarement plus de 1 000 € par an, il faudra généralement plus de 15 ans avant d’avoir totalement amorti l’investissement. Il s’agit là du meilleur des cas, c’est-à-dire dans les endroits les plus venteux.
En France, les éoliennes domestiques sont exclues de la liste des travaux éligibles au crédit d’impôt et à Ma Prime Rénov’. Il n’existe donc aucune aide à l’achat ni à l’installation de mini-éoliennes à ce jour.
6.3 – Éviter les arnaques
Enfin, sachez que le petit éolien domestique est un marché régulièrement visé par les escrocs. Les éoliennes de toit et de pignon, notamment, font souvent l’objet d’un démarchage très agressif alors que, comme nous l’expliquons plus haut, il n’est quasiment pas possible de les rentabiliser.
Selon les services de répression des fraudes, « le domaine de l’énergie éolienne ne semble pas maîtrisé par les professionnels contrôlés ». Certaines entreprises produisent des études fantaisistes, surévaluées, ne reposant sur aucune documentation scientifique sérieuse. Elles induisent les consommateurs en erreur sur les économies d’énergie réellement possibles.