Transport maritime : la Bretagne mise sur le vent
Tous les acteurs embarqués dans le lancement de cette nouvelle filière du transport maritime à propulsion par le vent étaient réunis à Lorient pour réussir leur coup d’envoi.
160 acteurs
En présence de Loïg Chesnais-Girard, président de la région Bretagne, les porteurs de la nouvelle filière avaient investi le Palais des Congrès de Lorient (56) ce mercredi 10 novembre 2021. Plusieurs objectifs étaient visés par le programme : faire le point sur le marché et les projets en cours, s’informer sur l’étude menée par l’agence Bretagne développement innovation, évaluer les atouts de la chaine de valeur du territoire régional, envisager les synergies à créer, recenser les besoins d’accompagnement, etc.
Les 20 intervenants qui ont animé la journée ont su se montrer convaincants devant les 160 acteurs embarqués dans cette filière émergeante, dont la plupart sont issus de la construction navale, de la compétition en mer et des énergies. Quelques-uns sont des noms de l’alimentaire ou du transport maritime. Ainsi Loïc Henaff, qui dirige la célèbre entreprise de production de pâtés et rillettes, et Olivier Barreau, président co-fondateur de Grain de Sail.
Une parfaite illustration
S’il est bien une entreprise bretonne qui illustre au mieux ce que la voile peut apporter au transport maritime de marchandises, c’est bien Grain de Sail. L’entreprise installée à Morlaix depuis 2010 est connue pour son commerce de chocolats, de café et de vins bio. Sa notoriété s’appuie aussi sur son usage d’un voilier-cargo qui limite de beaucoup les émissions de CO2 liées à ses activités. « Chaque année, notre bateau fait 2 boucles transatlantiques d’environ 3 mois chacune : une au printemps et une à l’automne », explique Grain de Sail
Un voyage type se déroule en 4 étapes. Le bateau commence par quitter le port de Saint-Malo (35), chargé de 15 000 à 20 000 bouteilles de vins biologiques produits en France. Poussé par le vent pendant 3 à 5 semaines, il arrive à New York où la cargaison est déposée. Le voilier file ensuite en Amérique latine récupérer du cacao et du café vert. Le retour à la Cité corsaire s’effectue via Saint-Nazaire, un passage obligé pour importer des produits biologiques dans l’Hexagone.
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Doit-on évoquer l’épisode des marins de l’île de Sein rejoignant le général de Gaulle en 1940 pour rappeler de quoi sont capables les Bretons lorsqu’ils se mobilisent pour une cause ? Gavin Allwright est le secrétaire général de l’IWSA, l’association internationale qui soutient le développement des navires propulsés par le vent. C’est lui qui a eu pour mission de définir le rôle que peut jouer la région dans la décarbonation des transports au niveau mondial en exploitant cette solution.
Son interview a été suivie de l’intervention de Lise Detrimont. La représentante de la branche française de l’organisme est venue dresser un panorama du marché du transport maritime propulsé par le vent. Si les voiliers existent depuis des centaines d’années, des systèmes se développent avec de nouvelles technologies déjà disponibles, prêtes à être lancées ou en cours de certification.
« Les solutions de propulsion par le vent apportent une puissance importante pouvant dans certains cas couvrir jusqu’à 90 % des besoins pour les nouveaux navires, et déjà 5 à 30% pour les navires existants », assure Wind Ship.
Les nouveaux cargos à voiles
Autre entreprise phare, TOWT (Transoceanic Wind Transport = Transport par delà les océans avec le vent) s’est spécialisée en 2011 dans le transport de marchandises à la voile. Elle a ouvert 20 routes maritimes. Les 19 voiliers affrétés ont parcouru quelque 64 000 milles, soit plus de 118 000 kilomètres. Ce trafic a permis de prendre en charge plus de 1 000 tonnes de produits, parmi lesquels du vin, du rhum, de l’huile d’olive, de la bière, du thé, du chocolat, mais aussi des appareils électroniques.
TOWT poursuit le projet de réaliser un voilier-cargo du futur, avec le soutien de l’Ademe. Le navire devra répondre à certaines exigences en matière de coût, de fiabilité, de capacité et de vitesse. « Le Voilier-Cargo moderne est un formidable vecteur d’innovation. Il permettra de mettre en application de nouvelles technologies, notamment en architecture navale, et aussi de nouveaux usages commerciaux et logistiques respectueux de l’environnement », justifie la société implantée à Douarnenez, dans le Finistère.
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Maintenant que les nouvelles technologies pour la transport maritime à la voile apparaissent mâtures ou près de l’être, ceux qui semblaient n’être que de doux rêveurs il y a encore quelques années sont devenus des pionniers recherchés.
A l’organisation de la journée de lancement de la propulsion maritime par le vent dans la région, l’agence Bretagne Développement Innovation a mis au jour un écosystème complet qui ne demande qu’à se rassembler et s’activer pour réussir un pari. Ce pari, c’est celui de mobiliser les entreprises de la construction navale, du nautisme et de la voile de compétition d’une région pour ouvrir à travers le monde de nouvelles voies pour le transport décarboné de marchandises. Plus de 150 sociétés sont prêtes, qui convergent vers Lorient.
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Commentaire
"les nouvelles technologies pour la transport maritime à la voile apparaissent mâtures..."
Je ne sais pas si le jeu de mot est intentionnel, mais très bon !