Qu’il s’agisse de chaleur ou d’électricité, le stockage est un moyen efficace pour augmenter l’intégration des énergies renouvelables et bas-carbone dans notre mix. La chaleur est toutefois plus facile à accumuler que l’électricité. Elle peut être stockée dans une grande variété de matériaux, comme la céramique. Une jeune entreprise française en a fait sa spécialité et voit son carnet de commande exploser.
L’humanité stocke déjà de grandes quantités d’énergie. Partout, nous accumulons hydrocarbures, gaz et charbon sans trop de difficultés. Pour se débarrasser de ces énergies fossiles, il faut toutefois développer de nouvelles technologies de stockage. S’il existe d’immenses réserves stratégiques de produits pétroliers et de méthane, aucune ne permet aujourd’hui d’accumuler autant de chaleur et d’électricité « bas-carbone ».
Des solutions émergent depuis quelques années, poussées par la transition énergétique. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la plupart de ces technologies n’ont rien de révolutionnaire, certaines sont même redoutablement « low-tech ».
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Il y a par exemple la « STEP » (station de transfert d’énergie par pompage-turbinage), qui utilise de l’eau pour stocker de l’électricité. L’eau est également le moyen le plus économique pour accumuler de la chaleur renouvelable, produite par des centrales solaires par exemple.
Le sable, la roche, la poudre de fer et même le sol sous nos pieds peuvent être utilisés tels quels pour stocker de la chaleur, de quelques heures à plusieurs mois. Chaque matériau dispose de propriétés adaptées à différentes applications.
L’eau est idéale pour les températures dites « basses », de 60 à 150 °C tout de même, suffisantes pour chauffer des logements. Le sable quant à lui peut stocker de la chaleur jusqu’à 500 °C. Mais qu’en est-il des températures bien plus élevées, celles indispensables aux processus de fabrication les plus lourds ?
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Les grands fours industriels peuvent compter sur… la céramique. Ce matériau tout simple peut stocker de la chaleur jusqu’à 1 000 °C, promet Antoine Meffre, le fondateur et directeur d’Ecotech Ceram. Fondée en 2014, la société basée à Balma en banlieue toulousaine est spécialisée dans le stockage et valorisation de chaleur haute température dans de la céramique.
« On peut attaquer le monde de la sidérurgie, du ciment, de la céramique, toute l’industrie lourde qui utilise du pétrole, du gaz naturel et du charbon », assure le dirigeant, qui a créé sa société peu après avoir soutenu une thèse sur le stockage thermique.
Un fonctionnement très simple
Ecotech Ceram se concentre pour l’instant dans la récupération de « chaleur fatale » issue de processus industriels. Il s’agit la plupart du temps de chaleur produite par des fours et rejetée dans les cheminées. Pour capter cette énergie perdue, l’entreprise installe des cuves remplies de « céramiques réfractaires ».
Le principe de fonctionnement est très simple : les fumées brûlantes sont injectées dans les cuves, chauffent les céramiques à leur passage et ressortent froides dans la cheminée, explique le dirigeant-ingénieur. La chaleur stockée peut ainsi être réutilisée plus tard, insufflée directement dans le four selon les besoins de l’industriel.
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La première application commerciale de cette technologie est opérationnelle depuis septembre 2019. Ecotech Ceram a équipé un premier site industriel : la petite usine de tuiles « Tegulys-Céramique » située à Meymac (Corrèze). Elle y a installé deux cuves d’environ 6 m³ capables de stocker 2 MWh d’énergie thermique (MWth) chacune, à une température maximale de 600 °C.
La densité énergétique de ce dispositif serait donc d’environ 323 kWhth/m3, calcule rapidement Antoine Meffre. Ces cuves pourraient conserver la chaleur sur plus d’une semaine, à hauteur de 5 à 10 % de perte chaque jour.
Le système de récupération et stockage de chaleur par céramique installé dans l’usine Tégulys / Image : Ecotech Ceram.
Concrètement, la chaleur est récupérée du four, accumulée, puis réinjectée dans le séchoir lorsque nécessaire. Le procédé afficherait un rendement de 90 %, élevé, mais habituel dans les transferts thermiques sans conversion.
La chaleur sauvée du gaspillage serait 180 fois moins émettrice de CO2 que si elle avait été produite à partir de gaz fossile, assure le dirigeant, qui se base sur la valeur officielle de l’ADEME pour le méthane (221 kg CO2/MWh). Elle éviterait le rejet de 100 tonnes de CO2 chaque année par l’usine.
45 kWh récupérés pour 1 kWh dépensé
« Il faut 4 mois pour rentabiliser la totalité de l’énergie utilisée pour fabriquer le système » assure-t-il. Son taux de retour énergétique (appelé TRE ou EROI) serait de 45. Cet indice évalue le rapport entre l’énergie dépensée et celle obtenue dans un processus d’extraction, production ou valorisation d’énergie.
Lorsque le TRE est à 1, cela signifie qu’1 kWh a été dépensé pour obtenir 1 kWh : le gain est nul et le gisement n’a donc aucun intérêt. Par exemple, le pétrole affiche un EROI de 1,5 à 100 selon les gisements, l’hydroélectricité se situe entre 50 et 250, l’éolien entre 5 et 80, le photovoltaïque autour de 8.
De la chaleur bas-carbone 2 à 3 fois moins chère
Au-delà de l’intérêt environnemental, le stockage de chaleur avec des céramiques permettrait aux industriels de réaliser d’importantes économies sur leur facture d’énergie. D’autant que la solution est installée gratuitement par Ecotech Ceram. La société (via sa filiale ETC Invest) se rémunère en facturant la chaleur délivrée, à un tarif 2 à 3 fois moins élevé que celle achetée par l’industriel.
« Vous ne payez rien, vous achetez seulement de la chaleur moins chère que d’habitude » assure Antoine Meffre. « Alors que le gaz va dépasser 200 €/MWh l’année prochaine, nous sommes capables de proposer de l’énergie à partir de 50 €/MWh, voire moins » promet-il. « C’est le nerf de la guerre ! Si on veut que les industriels fassent la transition bas-carbone, il faut s’assurer qu’ils n’aient pas de risque à prendre » explique le dirigeant.
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L’envolée des prix de l’énergie est une aubaine pour le jeune société, qui verrait actuellement son carnet de commande « exploser ». « On a signé un accord-cadre avec un métallurgiste qui dispose d’une centaine de fours en France » s’enthousiasme Antoine Meffre.
La société se prépare également à récupérer « plusieurs centaines de GWh par an » issus des torchères situées dans les aciéries ArcelorMittal de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) et Dunkerque (Nord). Elle va aussi déployer sa solution sur une tuilerie du fabricant Wienerberger à Pontigny (Yonne).
Au-delà de la valorisation et du stockage stationnaire de chaleur industrielle, Ecotech Ceram espère devenir un géant de la fourniture de chaleur renouvelable, sous tous ses aspects. L’entreprise développe de nouveaux projets, comme le transport de chaleur par conteneur.
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Le système baptisé « Eco Stock » pourra être rechargé en chaleur à partir de n’importe quelle source : chaleur fatale industrielle, chaleur renouvelable (à partir de centrales solaires thermiques) ou électricité renouvelable (convertie en chaleur par des résistances).
Un camion transportera le conteneur jusqu’au consommateur : une usine, un réseau de chaleur urbain, une centrale électrique (qui convertira la chaleur en électricité via une turbine), une unité de dessalement d’eau de mer et même un système de production de froid industriel. Ce mode de transport provoquerait « 5 à 15% d’économies de CO2 en moins » veut rassurer Antoine Meffre.
Si le transport de chaleur par camion peut paraître surprenant, ce n’est finalement pas si différent du transport d’hydrocarbures. L’essence, le diesel, le fioul, le kérosène et le GPL prennent chaque jour la route pour être transformés en chaleur dans nos voitures, avions et chaudières.
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Vive l’intelligence et attention aux mirages et aux miracles si l’énergie thermique peut faire de l’électricité avec un bon rendement autant la faire et éviter les camions.
Une info manque quel pourcentage d’énergie arrive t’il a récupérer par rapport à la conso de départ.