Avec le nécessaire développement des énergies renouvelables, dont la production est irrégulière dans les cas du solaire et de l’éolien, se pose la question du stockage. Si les batteries sont toujours davantage mises en avant dans ce rôle, les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) en constituent l’alternative. En France, EDF qui compte 6 sites de ce type, – dont celui de La Coche, en Savoie, en cours de rénovation -, peine à envisager de nouvelles ouvertures.
Batteries, STEP et microgrids
« Stocker l’énergie pour les jours où la nature n’en produit pas, c’est aussi ça notre engagement », assure EDF dans une actuelle campagne de communication destinée à présenter le « Plan stockage électrique » qui vient d’être lancé. Avec un investissement de plus de 8 milliards d’euros, le fournisseur historique d’électricité en France ambitionne de « développer 10 GW de nouveaux moyens de stockage dans le monde d’ici à 2035 en plus des 5 GW déjà exploités par le groupe ». EDF mise sur 3 architectures pour stocker l’énergie : les batteries, les stations de transfert d’énergie par pompage, et les microgrids.
Coup de pompe
En marge des centrales gravitaires, les stations de transfert d’énergie par pompage, possèdent, selon le schéma classique, deux bassins. Celui du haut reçoit par pompage l’eau du bassin inférieur (qui peut être un lac ou la mer), grâce aux turbines réversibles couplées à des alternateurs qui se font ici moteurs. Pour produire de l’électricité, à condition que le bassin supérieur soit suffisamment rempli, il suffit de laisser chuter l’eau sur les turbines. Comme il ne faut que quelques minutes pour les mettre en route, les Step sont souvent utilisées en tampon, afin de réagir au plus près des brusques variations de la demande en électricité. On imagine très bien tout l’intérêt d’une telle architecture en soutien de certaines sources renouvelables : acheminement de l’eau dans le bassin supérieur en périodes de pleine surproduction d’énergie solaire ou éolienne, puis exploitation lors des pics de consommation. C’est un des scénarios qu’EDF souhaite mettre en avant à travers son « Plan stockage électrique ».
6 stations
EDF est à la tête de 6 STEP en France : Montezic (12), Revin (08), Superbissorte (73), Le Cheylas (38), Lac noir (68), et La Coche (73). Cette dernière est en pleine rénovation depuis 2014. Mais la progression des travaux a permis de la maintenir en service jusqu’à l’été dernier. Lorsqu’elles sont toutes en action, ces centrales peuvent rendre disponible pas loin de 5 GW supplémentaires. En 2017, leur part dans la production hydroélectrique de l’Hexagone a été d’environ 10%. L’énergéticien ne prévoit pas de nouvelles ouvertures prochaines, même si, en cherchant bien dans les cartons, des projets ont existé, hélas enterrés. Le potentiel en France est pourtant important. Il dépasserait les 5 GW, c’est-à-dire de quoi doubler les chiffres actuels. Combien d’implantations de fermes solaires ou de parcs éoliens pourraient alors y être associés ?
La Coche
Le chantier dit de « La Coche Pelton » (https://www.edf.fr/la-coche), – un nom qui identifie de suite le type de turbine ajoutée -, devrait augmenter la puissance du site de tout juste 20% afin de la porter à environ 400 MW, pour une production envisagée de 650 GWh par an, contre 550 avant sa fermeture pour cause de travaux. La centrale disposait jusque-là de 4 turbines réversibles, qui resteront en place et seront soutenues par la nouvelle turbine Pelton de 240 MW de puissance. Ce type de d’appareil est réservé aux chutes d’eau les plus importantes (200 à 1.800 m). C’est bien le cas ici, avec 900 mètres de hauteur entre le bassin supérieur et la nouvelle usine de turbinage. Une enveloppe de 150 millions a été allouée à ce projet qui devrait s’achever fin 2019 par la remise en production du site.
Ouverture à la concurrence
Qu’est-ce qui bloque EDF dans la création de nouvelles centrales STEP ainsi que dans la puissance ajoutée aux installations existantes lors des rénovations ? Tout simplement l’ouverture des concessions hydroélectriques à la concurrence, imposée par l’Europe depuis 2010. Les gouvernements français successifs depuis lors se sont battus pour obtenir des dérogations. Depuis février 2018, en revanche, celui actuellement en place s’est déclaré favorable à cette contrainte. Pour toute nouvelle ouverture de centrales hydroélectriques, – dont les STEP font partie -, ou pour toute augmentation de puissance supérieure à 20%, EDF serait mis en concurrence avec d’autres entreprises à la suite d’un appel à projets obligatoirement passé par l’Etat. On comprend l’extrême frilosité de l’énergéticien historique à plancher sur le sujet ! Surtout quand il est possible de stocker l’énergie d’une autre manière, via des solutions qui s’annoncent à terme de moins en moins coûteuses et de plus en plus faciles à mettre en place !
« via des solutions qui s’avèrent de plus en plus faciles à mettre en oeuvre ». Les steps représentent quand même 99% du stockage au niveau mondial:
https://www.prnewswire.com/news-releases/une-etude-destorage-montre-un-tres-large-potentiel-exploitable-de-stockage-denergie-par-pompage-turbinage-en-europe-577386391.html
La capacité maximale de pompage utilisée est de 3,3 GW. Donc, c’est apparemment la puissance maximale, pour un turbinage qui serait de 5 GW maxi.
Ces 3,3 GW (pendant 56 heures) sont peu par rapport aux 18 GW d’éolien, qui produisent entre (presque 0 et 14 GW).
Deja il faudrait comparer le prix du stockage à celui de la production.
Si le premier est plus élevé que le deuxième, il vaudrait mieux produire plus et d’énergie et jeter le surplus en été que de le stocker au triple du prix.
Vous écrivez » Le potentiel en France est pourtant important. Il dépasserait les 5 GW, », pourriez-vous fournir un lien justifiant ces 5 GW?
https://cedricphilibert.net/lenorme-potentiel-du-pompage-hydraulique/
p37: https://www.voix-du-nucleaire.org/wp-content/uploads/2023/06/RAPPORT_Scenario-TerraWater_Futurs-Energetiques-France-2050_V1.21.pdf
https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=https%3A%2F%2Fwww.lenergieenquestions.fr%2Fles-projets-de-step-marines-pilotes-par-edf%2F#&
https://iopscience.iop.org/article/10.1088/2516-1083/abeb5b/meta
6 STEP ? et le barrage de Grand’Maison, en Isère, avec ses 1 800 MW de puissance installée (ie. le plus puissant groupe hydroélectrique de France) ? L’article mériterai un ajustement…
Les concessions sont une explication. Une autre est la tarification que RTE applique à chaque utilisation du réseau pour pomper ou pour turbiner. Le système économique mis en place n’est tout simplement pas adapté à ce type d’équipement qui est insuffisamment rémunéré pour les services rendus par ailleurs. Avec l’augmentation des moyens intermittents de production, il est urgent de corriger ce point. Espérons que la PPE y contribuera.
Pouvez vous faire une étude sur le stockage de 9 KW d’énergie produite par du photovoltaïque en vue de stockage sous forme d’hydrogène gazeux accompagné d’une pile à combustible correspondante??? En sachant que ces 9 KW représente environ 12000 KWh par an de production.
9 kW, ce n’est pas de l’énergie mais de la puissance.
12000 kW.h par an, envoyés dans un électrolyseur vont produire 2400 NM3 d’hydrogène par an (un balon de 17 m de diamètre), soit 213 kg d’hydrogène.
Ces 213 kg d’hydrogène gazeux non comprimés (2400 m3) pourons produire dans une pile à combustible 4260 kW.h d’électricité.
Pourriez faire un article sur le stockage via des volants d’inertie ? Je trouve cela génial comme solution. Est ce déjà utilisé ? Merci
L’énergie contenue dans un volant est: 1/2*I*w²
I étant l’inertie en kg.m²
w étant la vitesse de rotation en rad/s.
un disque (ou un cylindre) ont une inertie de 1/2*M*R²
avec R en m et M en kg.
exemple: un cylindre d’acier de 2 m de diamètre et 2 m de haut (6,28 m3, 49 tonnes), a une inertie de 24500 kg.m²
si tournant à 6000 t/min (628 rad/s),
il stocke une énergie de 1/2*24500*628² = 4830 MJ soit 1342 kW.h
La concurrence a EDF, c’est a quelle date ?
Tiens Total souhaite racheter « direct energie » avant la fin de l’année si l’administration et divers contrôleurs ne les bloques pas. Outre le coût actuel d’un step, c’est plutôt les freins à l’installation de ceux-ci (écologie , occupation des sols, etc ) qui semblent prépondérant. La vision de réduire EDF a la gestion du nucléaire n’aide pas celui-ci vis-à-vis des autres moyens de production.
Pour mieux comprendre les steps : ces vidéos ( http://natureandpeoplefirst.com ) voir intermittence
Pouvez-vous faire une analyse de projets tel que celui de Marseille sur la faisabilité de pompes à chaleur maritimes. Vu la concentration urbaine sur les côtes, cette idée me parait à creuser, surtout pour les pays nordiques et le nord de la France.
Sans aller vers des projets gigantesques et coûteux (exagération très française…), pourquoi ne pas envisager de mettre des micro-turbines sur chaque écluse ayant 3 m de dénivelé. Elles sont nombreuses sur nos canaux et les travaux ne seraient pas colossaux. Les hydroliennes sur nos fleuves ne seraient également pas de trop !
Ben…
1) Parce que ça pose des vrais problèmes en terme de continuité écologique des cours d’eau, 2) parce qu’on achète déjà l’électricité super cher (182 € / MWh l’hiver en H16), 3) parce que en tout cas c’est pas du stockage… 4) parce que les possibilité de production restent très modestes en regard de notre consommation d’électricité, des puissances hydroélectriques déjà installées et des possibilités offertes par le photovoltaïque et l’éolien ! Pour rappel, notre consommation d’énergie est gigantesque et couteuse…
on pourrait aussi mettre des micro turbines dans nos descentes de goutières pour les jours de pluie.