La startup allemande Sinn Power a parachevé avec succès les tests de sa petite centrale houlomotrice installée à Héraklion, en Crète. Pour l’alimentation électrique des îles isolées, elle envisage maintenant le développement de plateformes marines combinant l’énergie des vagues à celles du soleil et du vent.
Selon l’industrie européenne des énergies marines, 100 GW de capacités utilisant l’énergie des vagues et des courants marins pourraient être déployés en Europe d’ici 2050. Un potentiel capable de couvrir 10 % des besoins en électricité de notre continent.
L’énergie des vagues, appelée aussi énergie houlomotrice, présente notamment un atout intéressant : comme celle du vent, elle est surtout abondante en hiver, pendant la période au cours de laquelle la consommation est la plus forte.
Bien que de nombreuses startups s’activent au développement de cette technologie, celle-ci n’est toutefois pas encore arrivée à maturité : à l’exclusion des projets de recherche et développement, aucune centrale houlomotrice dans le monde ne produit encore de l’électricité pour les réseaux.
Sur base des données communiquées en 2018 par l’association Ocean Energy Europe, 24 projets houlomoteurs étaient testés à cette date sur les côtes de 9 pays de l’Union européenne. Cette année-là, 8 nouveaux prototypes ont été immergés dans les mers, en Italie, au Royaume-Uni, en France, au Danemark et en Grèce, pour une puissance cumulée de 444 kW.
Des soucoupes flottantes houlomotrices
Parmi ces projets, celui de la startup bavaroise Sinn Power nous semble un des plus prometteurs. La jeune entreprise a récemment annoncé la finalisation de son programme d’essais entamé en 2015 à Héraklion, en Crète. Elle y a installé contre la levée du port, une petite centrale houlomotrice constituée de 4 flotteurs en forme de soucoupe. En montant et descendant avec les vagues, ils entraînent des tiges de 10 mètres de long, lesquelles actionnent des générateurs d’électricité. Chaque module peut développer une puissance maximale de 24 kW. Mais en moyenne ils fournissent 2,5 kW, du moins avec les petits flotteurs actuellement montés dans la centrale. « En utilisant des soucoupes « flottantes » d’un diamètre de 3 mètres, la puissance pourrait être doublée » nous confie Simon Krüner, ingénieur chez Sinn Power. Des flotteurs de cette dimension seront d’ailleurs utilisés dans la prochaine génération de modules.
Une centrale constituée de 21 modules de ce type pourrait produire 550.000 kilowattheures par an et fournir de l’électricité à 150 ménages, explique Philipp Sinn, fondateur et directeur de la startup.
Pendant les deux ans qu’ont durés les essais du prototype, la petite centrale a survécu aux tempêtes sans dégâts majeurs. « En janvier 2020, nous avons connu une des tempêtes les plus violentes de ces dernières années » précise Philipp Sinn, « mais grâce aux prévisions météo et à l’expérience des intempéries précédentes, nous avons pu relever les flotteurs à temps et nous avons évité les dommages. Seuls quelques petits composants électroniques ont dû être remplacés ».
Une plateforme marine hybride
Après ces résultats encourageants, Sinn Power développe maintenant un concept de plateforme marine « multi-énergie ». Outre les flotteurs houlomoteurs, elle sera équipée de panneaux photovoltaïques et de petites éoliennes. La combinaison de ces trois énergies complémentaires la rendra plus indépendante des conditions météo. « Quand il y a beaucoup de soleil, il y a souvent moins de vent et vice-versa », nous rappelle Simon Krüner, « et le long des côtes, les vagues sont omniprésentes ».
Capable de résister à des vagues de 6 mètres, cette plateforme sera modulaire : en fonction du potentiel énergétique local, son futur exploitant pourra choisir les éléments qui l’équiperont pour exploiter le soleil, le vent ou les vagues, ou encore une combinaison de ces 3 énergies.
Avec ce projet, Sinn Power vise le marché des petites îles et des communautés côtières isolées qui en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud notamment, ont un accès compliqué à l’énergie. Leur production d’électricité est souvent assurée par des groupes électrogènes alimentés en fioul ; une solution coûteuse et polluante. « Nos plateformes hybrides exploitant le vent, le soleil et les vagues peuvent être installées le long de la côte et constituer une alternative propre et peu onéreuse pour ces communautés locales » conclut Philippe Sinn.
Commentaires
Difficile de capter l'énergie houlienne avec une plateforme flottante qui bouge au gré de la houle. Pour que les flotteurs puissent alterner, il leur faut une référence fixe, comme le quai pour l'expérience décrite. Au-delà de la "réussite technique" rapidement constatée, il faut voir la durabilité. D'innombrables protos houlomoteurs ont fonctionné "un certain temps" puis ont tous fini par être détruit par les éléments. Corrosion, tempêtes, déferlantes... La mer, c'est plus fort que toi!
Je ne comprend pas bien cette dernière proposition de plateforme multi énergie...
Il n'est plus à démontrer que le petit éolien ne fonctionne pas de façon satisfaisante, là on le met à coté de panneaux solaires qu'ils vont venir ombrer, en mer ce qui va encore complique la maintenance.
Pour l'instant il n'existe pas de projet de solaire flottant en mer (même si certain y réfléchissent), là on envisage de le faire sur des sites particulièrement exposés aux vagues.
Je ne comprend pas pourquoi cette startup se disperse hors de son domaine de compétence, si ils réussissaient à développer un système houlomoteur efficace ça serait déjà une très belle réussite.
Toutafé. Cela ressemble à un inévitable "package commercial" destiné à rassurer des "investisseurs". Souhaitons-leur déjà la réussite (durable) de la captation d'énergie des vagues, ce serait déjà un grand pas en avant susceptible de pérenniser l'entreprise. Le reste n'est que détails.
Si Seb, il y a déjà plusieurs installations photovoltaïques flottantes en mer et nous y avons consacré un article : https://www.revolution-energetique.com/le-photovoltaique-gagne-le-large/
Du houlomoteur efficace, c'est antinomique, énergie beaucoup trop diffuse. Ça fait juste plaisir aux étudiants ingénieurs qui peuvent faire un projet sympa, mais ça ne fournira jamais assez d'énergie pour alimenter une ville.
Et le photovoltaïque en mer c'est pareil, avec le sel qui va se déposer sur les panneaux et réduire le rendement, plus la maintenance très cher puisque nécessitant un bateau pour intervenir...