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Ce gigantesque projet de stockage d’électricité que la France a mis de côté

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Par Hugo LARAPublié le 16 septembre 2022, modifié le 11 septembre 2023
La galerie d'accès à la future usine hydroélectrique souterraine de la STEP de Redenat / Image : Révolution Énergétique.

Le chantier de la station de transfert d’énergie par pompage-turbinage (STEP) de Redenat (Corrèze) a été brutalement stoppé en 1982. Seuls témoins du projet : deux tunnels complètement noyés qui s’arrêtent en plein milieu de la montagne. Depuis près de 40 ans, EDF attend des politiques plus favorables aux systèmes de stockage d’électricité de grande ampleur afin de le relancer.

Les systèmes de stockage sont un atout considérable pour les réseaux électriques. Ils permettent de stabiliser la fréquence, d’éviter des blackouts, d’accumuler la production variable de l’éolien et du solaire et de rendre les centrales nucléaires encore plus rentables.

Plusieurs techniques existent pour stocker efficacement l’électricité : la batterie, l’air comprimé en cavité souterraine et la STEP (station de transfert d’énergie par pompage-turbinage), qui relève de l’hydroélectricité. Cette dernière est la plus employée à travers la planète, car elle permet d’accumuler de très grandes quantités d’énergie sur de longues périodes.

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La France dispose de 6 STEP pour une puissance installée de seulement 5 GW, soit 3,6 % des 139 GW du parc de production électrique national. Parmi les projets de nouvelles STEP, celui de Redenat (Corrèze) est le plus abouti. Tout est prêt : l’emplacement est parfaitement délimité, le réservoir inférieur existe déjà, les caractéristiques techniques ont été définies et les terrains sont réservés et inhabités.

Caractéristiques du projet de STEP de Redenat
Puissance installée1 100 MW
Hauteur de chute270 m
Capacité de stockage (estimation RE)~ 20 GWh
Production annuelle1 400 GWh
Débit pompage109 m3/s
Débit turbinage130 m3/s
Volume lac supérieur (total)36 millions m3
Volume lac supérieur (utile)32,6 millions m3
Superficie lac supérieur300 ha
Volume lac inférieur187 millions m3
Marnage lac supérieur21 m (hiver) 3 m (été)
Marnage lac inférieur5 m (hiver) 1 m (été)
Source

Un chantier arrêté brutalement

Le chantier a commencé au début des années 80 par le percement de deux galeries de 700 m, depuis lesquelles devaient être creusées l’usine hydroélectrique, véritable cathédrale souterraine, et les conduites reliant les deux lacs. Mais EDF, opérateur du projet, l’a subitement interrompu en 1982.

Le contexte n’était pas favorable : faibles coûts de l’électricité à l’époque, coût de rabot sur le budget et remise en question des concessions hydroélectriques sur la « cascade » de barrages le long de la Dordogne.

En 40 ans, personne n’a pu ou réellement voulu relancer la STEP de Redenat. Pas même François Hollande, ex-président du conseil départemental de la Corrèze devenu chef d’État, qui avait pourtant manifesté son intérêt pour le projet.

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La STEP, un système pas suffisamment rentable ?

Interrogé à ce sujet, EDF ne s’est pas exprimé spécifiquement sur le projet de Redenat. L’énergéticien national nous a simplement expliqué que « le cadre réglementaire et le modèle économique actuels en France métropolitaine peinent à faire émerger de nouveaux projets de STEP, en l’absence notamment de rémunération spécifique de la flexibilité. » En clair, investir dans ce moyen de stockage d’électricité de grande capacité ne serait pas assez rentable, faute de rémunération suffisante.

« Néanmoins, nous progressons pour qu’un cadre propice au développement de cet outil de stockage et de flexibilité émerge, comme en témoigne la loi « Climat résilience » du 22 août 2021 qui introduit la possibilité d’appels d’offres en soutien au développement du stockage. » indique l’opérateur.

EDF avait repris l’entretien des galeries en 2008 en les asséchant, selon le journal local La Montagne. Toutefois, lors de notre visite, ces deux tunnels étaient entièrement noyés jusqu’à la voute et donc impraticables. Ils plongent en effet à un niveau inférieur au lac du Chastang, qui constitue le réservoir bas de la future STEP.

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