Cette semaine, le cabinet de la ministre de la Transition énergétique a mis en circulation un projet non définitif de loi « d’accélération de la transition énergique », afin de compléter les mesures réglementaires déjà annoncées. Il comprend quatre titres : deux sont de portée générale, deux autres visent spécifiquement le photovoltaïque et l’éolien maritime.
Certaines mesures s’appliqueront à toutes les énergies renouvelables. Par exemple, le ministère veut relever temporairement les seuils au-dessus desquels les projets sont soumis à une « autorisation environnementale » spécifique, qui ouvre la porte à d’innombrables contentieux. En Espagne, un projet éolien y est soumis à partir de dix mats, en Allemagne à partir de vingt mats, en France un mat unique suffit…
Les centrales photovoltaïques au sol y sont soumises dès 250 kW, ce qui est ridiculement bas. Autre mesure, la création possible de zones prioritaires pour le renforcement de réseaux, sans attendre la réalisation des projets renouvelables. On sait combien ce type de mesure a aidé le Texas à s’équiper rapidement d’éoliennes.
Ces mesures sont excellentes, mais elles seront seulement temporaires, comme si la Ministre était effrayée par sa propre audace… D’autres mesures, permanentes celles-là, faciliteront les contrats d’achats d’électricité par des entreprises, ou organiseront un meilleur partage des revenus des projets avec les « ménages résidents » via leurs factures d’électricité. On ne jurerait pas que cela suffira, mais tout ça va dans le bon sens.
À lire aussi Comment l’État va donner un coup de fouet aux énergies renouvelablesDes objectifs incohérents
L’éolien terrestre en bénéficiera comme les autres. Mais si le projet inclut quelques mesures spécifiques pour le photovoltaïque et l’éolien offshore, il n’en propose aucune pour l’éolien terrestre. Comme s’il n’y avait rien à faire de ce côté-là…
L’explication, on la trouve, hélas, dans l’exposé des motifs. Celui-ci renvoie constamment au discours de Belfort du président de la République – mais semble ignorer la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), la Programmation pluriannuelle des investissements (PPI), ainsi que les lois qui ont défini des processus démocratiques pour les élaborer et les réviser.
Le texte évoque des « investissements massifs dans notre parc nucléaire avec le lancement d’un programme de six EPR2 et le lancement d’études pour la construction de huit EPR2 supplémentaires », ajoutant que « un milliard d’euros du plan France 2030 seront également consacrés au développement de SMR » (petits réacteurs modulaires). Et un objectif de 40 gigawatts (GW) d’éolien terrestre en France à l’horizon 2050.
À lire aussi L’éolien, nouvelle machine à cash de l’État ?Une loi de ralentissement plutôt que d’accélération ?
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) nous fixe déjà un objectif entre 33,2 GW et 34,7 GW d’éolien terrestre d’ici 2028 – et 24 GW dès l’an prochain, soit 5 GW de plus qu’aujourd’hui… Considérer un objectif de 40 GW en 2050, c’est remettre subrepticement en cause l’objectif à court terme de la PPE, ou alors accepter qu’au-delà de 2028 on ne construise plus que 5,3 à 6,8 GW d’éolien terrestre en vingt ans…
Inutile, avec de tels stop-and-go, d’espérer consolider une industrie française de l’éolien terrestre. En ce qui le concerne, ce projet de loi devrait plutôt s’appeler « loi d’accélération du ralentissement ».
Comme le montre le rapport de RTE Futurs énergétiques 2050, on ne fournira assez d’électricité sans carbone au pays en 2050 que si toutes ces capacités nucléaires et renouvelables sont construites et mises en service dans les temps voulus (scénario N03). Sinon, il faudra des capacités renouvelables plus importantes, ou même beaucoup plus importantes, sans nouveau nucléaire ou avec un objectif nucléaire plus modeste (scénarios M0, M1, M23, N1 et N2).
Au vu des difficultés actuelles du nucléaire, qui touchent largement des réacteurs récents en plus des EPR, c’est prendre un énorme risque : celui de devoir manquer d’électricité d’ici à 2035, ou d’augmenter nos consommations d’énergies fossiles, et les émissions associées.
À lire aussi Voici les 5 meilleures cartes pour localiser les éoliennes en FranceL’éolien terrestre, une pièce maîtresse de la transition
Supposons que l’industrie nucléaire réussisse pourtant à construire d’ici 2050 ces 14 EPR2 – réacteur qui n’existe pas encore – et que l’on ait construit toutes les énergies renouvelables du scénario 100% – 208 GW de photovoltaïque, 74 GW d’éolien terrestre et 62 GW d’éolien maritime. Nous pourrions revenir à notre situation d’exportateurs d’électricité décarbonée pour tous nos voisins, accélérer la réduction de leurs émissions et l’élimination des hydrocarbures russes.
Il n’y a aucun inconvénient à cette accélération, seulement des avantages écologiques et économiques, c’est une stratégie sans regrets. L’éolien terrestre en est une pièce maîtresse, qui rapporte dès aujourd’hui des milliards aux finances publiques. Il est plus rapide à déployer que l’éolien maritime, davantage disponible en hiver que le photovoltaïque, fait appel aux financements privés et non publics (et donc pas à la dette publique), contrairement au nucléaire.
Sa puissance garantie est peut-être assez faible, mais aujourd’hui notre production électrique manque d’énergie et pas seulement de puissance.
À lire aussi « Futurs énergétiques 2050 » : les leçons de l’étude RTE (1/2) À lire aussi « Futurs énergétiques 2050 » : les leçons de l’étude RTE (2/2)
Je ne suis pas scientifique et, dieu m’en préserve, encore moins expert, mais l‘état n’a pas besoin de freiner sur l’éolien terrestre. Avec la relance du nucléaire et des objectifs à 2050… aucune collectivité territoriale (frileuse par nature) va se lancer dans un parc éolien et bientôt solaire et ne développera aucun projet de stockage type STEP, encore moins barrages ou autres. Un mot sur l’Europe, cette vaste c………..e, où chaque pays arrange sa sauce de son coté: Autorisation environnementale (ce qui peut aussi s’appeler chez nous « usine à gaz » (on est les champions)) à partir d’1 mat…contre 10 en… Lire plus »
La réalité c’est que l’éolien et le nucléaire sont des énergies concurrentes puisque que toutes deux ont des capacités productives importantes et que donc les abonnements affectés à l’une, ne profitent plus à l’autre. Ce qui au bout du compte mettra tout le monde d’accord ? Puisqu’un des deux ayant perdu l’essentiel de sa source de financement, les coûts de fonctionnements deviendront insoutenables……s’ils ne le sont pas déjà ?
L’article indique dans son titre « L’Etat » , et dans on texte on s’aperçoit que « L’Etat c’est moi ! », affirmation attribuée au « Roi soleil » . Mr Macron n’est ni roi ni le soleil ! : Ne sommes nous pas en République ? : Déjà, avant toute décision, il devrasaisir la commission du Débat Public . Et à cette occasion , un RIP ( article 11 de la Constitution) pourra émerger un plan global contre le réchauffement climatique, au mieux élaboré par la société civile. Si voté, démocratie oblige, il s’imposera à tout gouvernement, et même le parlement, même si, en l’occurrence, c’est contradictoire avec « le discours de Belfort ».
On est tombé sur la tête!
On peut s’attendre à des coupures d’électricité très fréquentes dans un avenir assez proche et pour de nombreuse années.
Pour enfoncer le clou, d’après un article de France Info, 31% de l’eau douce de surface est perdue en France du fait des centrales thermiques (principalement nucléaires). Quant sera-t-il en 2035 et en 2050 vu l’été qu’on vient de passer ?
31% de l’eau « perdue » à cause des centrales nucléaires… Ca parait beaucoup.
Je pense que c’est plutôt la quantité d’eau qui passe dans des centrales, nucléaires, hydrauliques ou thermiques, mais qui est à plus de 99% restituée au milieu (souvent un peu plus chaude, des fois avec un peu d’anti algues, mais elle n’est pas « consommée » comme celle qui arrose un champ de mais.