Illustration : Getty, modifiée par RE.
Sur le marché de gros de l’électricité, les prix sont loin d’être stables, reflétant la fluctuation constante de l’offre et la demande en énergie. Dans cette dynamique, il arrive parfois que ces tarifs descendent en dessous de zéro, comme c’était le cas durant les fêtes. Bien qu’étonnante, une telle situation est relativement fréquente au cours de l’année.
En décembre, plusieurs pays européens tels que la France, l’Angleterre, la Belgique, l’Allemagne, les Pays-Bas, et la Suisse ont vu le prix de leur électricité baisser jusqu’à atteindre des chiffres négatifs. Durant ce mois festif, la majorité de ces nations ont enregistré leurs prix les plus bas durant le jour de Noël, selon les données sur le site éCO2mix. En France, par exemple, ils étaient ce jour devenus négatifs entre minuit et 8 heures du matin, plongeant jusqu’à -11,93 €/MWh. Pourtant, en début de mois, les prix dépassaient les 230 €/MWh. Mais qu’est-ce qui se cache derrière une chute aussi importante ?
À gauche : exemple de période à prix négatifs la nuit du 25 décembre 2023. À droite : exemple d’écrêtement de la puissance éolienne suite à des prix nuls ou négatifs la nuit du 3 janvier 2024 / Captures du site RTE eco2mix.
Pourquoi des prix négatifs ?
En Europe, la principale raison des prix négatifs sur les marchés de gros est le déséquilibre entre la production et la demande d’électricité. Pendant les fêtes, plusieurs facteurs ont accentué ce déséquilibre. Il y a eu effectivement les conditions météorologiques douces. Un hiver clément signifie moins de chauffage, donc une consommation d’électricité réduite.
En parallèle, comme chaque année, les congés et les jours de fêtes ont marqué une pause dans de nombreuses activités économiques et industrielles. Les usines ralentissent ou ferment, les bureaux sont désertés, et globalement, la consommation électrique des secteurs commerciaux et industriels plonge. Tout cela a contribué à une baisse significative de la demande en électricité. Pendant ce temps, les éoliennes, ayant bénéficié de vents forts, n’ont pas connu de répit. Cette production continue, combinée à une demande réduite, a créé un surplus d’électricité disponible sur le réseau.
Or, lorsque la production d’énergie dépasse la demande, cela peut créer une surcharge pour le réseau électrique. Les prix négatifs interviennent ainsi comme un signal du marché. Ils indiquent essentiellement aux producteurs qu’il y a trop d’énergie et qu’ils risquent de payer pour se débarrasser de leur excédent. Face à cette situation, ils sont donc confrontés à un choix. Ils peuvent soit arrêter temporairement leur production, ce qui entraîne des coûts, soit continuer à produire et « vendre » leur énergie à un prix négatif. Pour décider, ils sont amenés à comparer les coûts relatifs à l’arrêt des centrales et les pertes potentielles en continuant la production.
Il est parfois plus économique pour les producteurs de vendre leur surplus d’électricité à des prix négatifs plutôt que d’interrompre temporairement leurs centrales. Autrement dit, ils préfèrent indirectement rémunérer les consommateurs pour qu’ils utilisent cet excédent de production.
Une tendance croissante vers les prix négatifs ?
Certains analystes du marché de l’électricité anticipent une augmentation de la fréquence des prix négatifs en Europe en raison de l’essor de l’éolien et du solaire. Ces sources d’énergie, qualifiées de non pilotables, voient leur production varier en fonction des conditions météorologiques et s’arrêter pendant la nuit pour le solaire. À mesure que leurs parts dans le mix augmentent, le risque de déséquilibre entre la production et la demande s’accroît, pouvant rendre les prix négatifs plus fréquents. Par ailleurs, le phénomène risque d’être particulièrement prononcé dans des pays comme l’Allemagne où le bouquet énergétique comporte une part élevée de renouvelables. En 2022, la bourse de l’électricité Epex Spot y a enregistré 69 heures de prix négatifs sur 22 jours.
La situation met en lumière un autre défi majeur de l’ère de la transition énergétique : le besoin en solutions de stockage d’énergie. Le développement de technologies de stockage efficaces devient crucial pour gérer les excédents et garantir un approvisionnement énergétique stable et fiable. Sans les systèmes adéquats, les réseaux électriques seront de plus en plus confrontés à des défis en termes de régulation et de maintien de l’équilibre entre l’offre et la demande.
Commentaires
Bonjour,
Ce qui est surprenant c'est qu'en reprenant les données CRE sur cette journée du 3 janvier au niveau du décrochage de la production éolienne on peut observer qu'il y a toujours des centrales au fioul et au gaz en train de fonctionner, ce qui semble assez contre-intuitif pour des centrales dites pilotables
Il peut rester des endroits où la production renouvelable n'est pas suffisante et les interconnexions ne permettent de combler le déficit.
Qu’attend l’Europe pour imposer l’équipement en V2G sur tous les véhicules électriques neufs ?
Aucune anticipation et après on s’étonne.
L'idée paraît séduisante sur le papier. Toutefois pour que cette idée fonctionne il faut que cela soit intéressant financièrement pour le Titulaire d'un véhicule électrique. En effet tout cycle de charge décharge réduit d'autant la durée de vie de la batterie électrique.
Or le prix d'un véhicule électrique est fortement dépendant du prix de sa batterie de puissance.
Déjà qu'actuellement on estime à seulement dix ans la durée de vie d'une batterie de véhicule électrique les cycles supplémentaires viendraient encore réduire cette durée de vie.
La batterie représentant la moitié du prix du véhicule, cela voudrait dire qu'il faudrait réinvestir dans son véhicule plus de 50 pour cent de son coût au bout d'une durée inférieure à 10 ans pour les véhicules dotés de véhicules to grid.
Économiquement cela freinerait le développement des véhicules électriques
Il doit y avoir des constructeurs qui mènent un lobbying important pour que cela ne se fasse pas.
Le principal problème serait comme souvent : qui va payer et combien seront payés les automobilistes qui fourniraient des services de véhicule to grid ?
Les producteurs d’ENRi s’en fouttent des prix négatifs... ils ont pour la plupart une garantie de prix plancher sur 20ans. (>80€/MWh en 2023) Plus ils produisent et plus ils gagnent, même si on n’en a pas besoin. Et c’est l’état ou nous, au travers de la CSPE qui payons la différence.
Prix plancher et prix plafond, ce qui a permis à l'État de faire rentrer quelques milliards lorsque nos réacteurs nucléaires étaient en rade.