Illustration : Pixabay, modifiée par RE.
Le Diagnostic de performance énergétique (DPE) est-il un outil réellement pertinent pour estimer la consommation énergétique d’un logement ? Dans le contexte de la transition écologique du secteur du bâtiment, le DPE, instauré en 2006 et réformé en 2021, fait foi pour l’achat ou la location d’un bien immobilier. Son efficacité et sa fiabilité sont cependant de plus en plus critiquées.
Le Crédit Mutuel Alliance Fédérale et le Conseil d’analyse économiques viennent de publier une étude portant sur le lien entre le diagnostic de performance énergétique d’un logement et sa consommation énergétique réelle. Les résultats de cette étude, menée sur près de 180 000 ménages, tendent à montrer que la différence de consommation énergétique, en fonction de la classe de performance énergétique d’un logement, est beaucoup moins importante dans la réalité qu’en théorie.
Cette étude montre, en effet, que l’écart de consommation entre un logement classé A ou B et un logement classé G est 6 fois plus faibles que ce qu’indique le DPE. Et ce n’est pas tout. Les consommations relevées pour les bâtiments performants sont, en moyenne, 80 % plus élevées que les consommations prédites dans le DPE. À l’inverse, les consommations réelles d’un logement mal isolé sont environ 50 % inférieures aux consommations théoriques indiquées dans le DPE.
C'est quoi le DPE ?
Le DPE a pour objectif d’informer un potentiel acheteur ou locataire à propos des dépenses énergétiques d’un bâtiment, de l’efficacité du chauffage, de la climatisation et de la production d’eau chaude sanitaire. Il est généralement exprimé en kWh d’énergie primaire et en euros. Il est calculé grâce à la technique du Calcul de la consommation conventionnelle d’un logement (3CL), qui vise à limiter tout facteur subjectif comme les habitudes de consommation.
Des différences de comportement notables
Si les consommations réelles montrent tout de même une réduction de la consommation en fonction des performances énergétiques d’un logement, l’écart se veut bien plus faible dans la réalité, pour la simple et bonne raison que le comportement des habitants d’une maison bien isolée ou d’une maison mal isolée est différent.
Du fait, principalement, de contraintes budgétaires, les habitants de passoires énergétiques n’auront d’autre choix que de faire des compromis sur leur confort en réduisant l’utilisation de leur chauffage. Une étude conduite par l’Observatoire national de la précarité énergétique illustre parfaitement ce sujet : durant l’hiver 2022 – 2023, 26 % des Français déclarent avoir souffert du froid au moins 24 heures dans leur logement.
À l’inverse, les personnes les plus aisées, et dont le logement offrent des performances énergétiques supérieures, auront tendance à augmenter leur température de consigne pour gagner en confort. C’est ce que l’on appelle aussi « l’effet rebond ». Or, toujours selon la même étude, une surconsommation de 5 % de la part des 5 % les plus aisés correspond à une différence de 2 classes dans le DPE. En d’autres termes, pour les personnes les plus aisées, une hausse de 5 % de la consommation dans leur logement fait passer l’étiquette énergétique de celui-ci, de A à C.
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Si les différences de comportement peuvent, en partie, expliquer les incohérences obtenues entre la théorie du DPE et la réalité des consommations, le DPE est aussi pointé du doigt pour son manque de fiabilité. Selon une étude commandée par le conseiller en énergie HelloWatt, près de 71 % des notes de performances énergétiques seraient fausses. En 2022, le magazine 60 millions de consommateurs l’avait également démontré en faisant effectuer à 4 propriétaires 5 DPE différents chacun. À l’issue des diagnostics, chaque logement avait reçu au moins deux notes différentes.
Et pour cause, malgré une nouvelle révision en 2023, l’analyse des performances énergétiques d’un bâtiment est d’une grande complexité, qui nécessite une formation accrue des diagnostiqueurs pour obtenir des valeurs constantes. De plus, les méthodes de calcul du DPE ont naturellement tendance à dévaluer les petits logements ainsi que les vieux bâtiments.
Décorréler consommation et isolation
Pourtant, le DPE est d’une importance cruciale, car la rénovation énergétique des bâtiments est un enjeu majeur pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. À l’heure actuelle, la consommation énergétique des bâtiments représente 12 % des émissions de CO2 à l’échelle nationale.
Il est donc essentiel qu’un outil comme le DPE permette d’obtenir des données fiables sur la consommation réelle d’un logement. Si le DPE, dans sa forme actuelle, permet de considérer certains aspects essentiels à la performance énergétique d’un logement, il convient de le faire évoluer pour qu’il autorise chacun de se rapprocher réellement du zéro carbone. Pour cela, la prise en compte de la consommation réelle dans des conditions spécifiques appréhenderait certains aspects d’une construction qui ne sont aujourd’hui pas pris en compte dans le DPE.
Par exemple, pour une isolation donnée, la prise en compte de la consommation réelle verrait la différence entre une pose effectuée dans les règles de l’art, et une pose mal réalisée générant des ponts thermiques. Cette consommation réelle prendrait également en compte la conception de la maison. Une maison dont le salon est orienté au nord-est et dont les chambres sont situées au sud-ouest consomme nécessairement plus de chauffage qu’une maison dont la disposition est opposée (les chambres au nord et le salon au sud), car la température de confort de ces deux pièces aux usages différents n’est pas la même.
Ces aspects ont une importance considérable sur la consommation énergétique, et donc les émissions de CO2 d’un bâtiment ou d’un logement, mais ne sont aujourd’hui pas pris en compte par le DPE. Les prendre en compte, c’est permettre des rénovations thermiques plus en phase avec la réalité de consommation d’un bâtiment.
Commentaires
J'ai lu la note du CAE et je trouve la présentation des résultats curieuse. Dans la théorie du DPE, les consommations énergétiques s'échelonnent de 83 kWh/m2/an (classes AB) à 548 (classe G), soit 6,6 fois plus. Dans les comptes réels des clients du Crédit mutuel, ces consommations s'échelonnent de 148 kWh/m2/an (classes AB) à 276 (classe G), soit 1,86 fois plus. L'écart ne serait donc 'que' d'un facteur 3,6 (et non pas "divisé par 6", comme présenté par le CAE). Bon passons, c'est déjà très impressionnant. D'une part, tous les logements quasi-passifs théoriquement (AB) semblent très loin de l'être en réalité (cela ne dit rien de bon de l'intérêt de l'objectif d'un parc passif à l'horizon 2050). D'autre part, les ménages des classes E, F et même pour l'essentiel G "se comportent" déjà de façon sobre, ramenant leur consommation au dessous du seuil théorique de la classe F qui définit les passoires thermiques (ce qui ne dit rien de bon quant à l'objectif d'éradiquer lesdites "passoires"). L'écart, selon les auteurs, peut s'expliquer pour les 2/3 par le comportement des ménages (OK, on peut trouver des fondements théoriques à cela, notamment, selon les auteurs, le rôle des revenus) et pour 1/3 "à des erreurs de mesure et de modélisation, en particulier au moment du calcul du DPE" ! Autant, on peut comprendre que les difficultés sur le terrain du diagnostic (rassemblement des très nombreuses données nécessaires attendues par les équations traduisant les lois de la physique, compte tenu du peu de temps dont disposent les diagnostiqueurs, et du coût de ce temps) confèrent aux résultats du calcul du DPE une grande volatilité (ça tout le monde connaît), autant on a du mal à admettre que la méthode 3CL est biaisée, de fait, à la hausse (et pourquoi à la hausse ?), en surestimant systématiquement les quantités d'énergies consommées (indépendamment du comportement des ménages). Les logiciels qu’utilisent les diagnostiqueurs sont pourtant certifiés ou validés d’une façon ou d’une autre. Et là, cela ne dit rien de bon sur le calage macroéconomique de la politique publique qui en dépend. Enfin, quelles qu’en soient les causes, cette erreur de parallaxe dans l’évaluation de la rentabilité des "gestes de rénovation énergétique" est de nature à biaiser les décisions des acteurs économiques, alors que cette rentabilité attendue sera, pour un temps encore, un facteur central de la décision.
Pour mon logement le dpe est correct, mon logement est A et j’ai la conso par m2 annoncée pour du A dans le sud est. Mais bien sur je chauffe à 19! Clairement le dpe qui planifie chauffe à 17 degrés la nuit ne correspond pas du tout à la réalité des gens
Tant mieux pour vous. Votre logement A dans le sud-est correspond à un (même) logement C ou D à Pais. Simplement parce qu'il y a 10 degrés d'écart en permanence....et deux fois plus de soleil.
Tous à Perpignan (ou à Nice)!
Les DPE sont une escroquerie inventé par nos énarque pour créer des emplois bidons vu qu'ils en détruisent tellement du fait des normes et des contraintes que seuls assurent ceux à qui ont les imposent ! J'ai pour ma part fait l'expérience qu' après avoir refait totalement une ancienne habitation, le DPE à trouvé .....du plomb ? On se demande bien ou ? Toutes les canalisations avaient été refaite en PER et PVC ! Mais c'est quand même ce torchon qui fait force de loi ?
Vous avez demandé des explications au diagnostiqueur ?
Bonjour le DPE tien compte de la consommation électrique général et une moyenne est gardé pour le chauffage une moyenne ESTIMÉ une famille qui fera fonctionner son four (electrique ) pour cuir des repas consistent régulièrement consommera beaucoup plus qu' une famille qui restera a faire des petit plat a la casserole pour cuir un plat 2 a4 h au four a 200 degré. exemple simple (le mien) pompe a chaleur renfort poêle a bois mais considérer comme chauffage électrique ; étant passé aujourd'hui a un poêle cuisinière a bois qui utilisait régulièrement le four je vois une grosse différence sur ma facture donc le DPE est bien loin de la réalité
J'ai pas bien saisi... puisqu'on est censé caler la consommation réel sur la théorie pour avoir la note énergétique. Comment peut-il y avoir un écart entre le réel et la théorie ?