Illustration : Getty, montage : RE.
La transition énergétique n’est pas un long fleuve tranquille, car elle se heurte à la difficulté fondamentale de la rentabilité des moyens de production. Et ce, en dépit des subventions parfois très généreuses des instances publiques. En l’espèce, Enel abandonne un second projet de production d’hydrogène vert en Italie.
Enel est le géant italien de l’énergie. Fondé en 1962 à la suite de la nationalisation massive des producteurs d’électricité, il est resté une entreprise publique nationale jusqu’à sa privatisation en 1999. L’entreprise fournit aujourd’hui de multiples services dans le monde entier : non seulement de l’électricité, mais aussi de l’eau et du gaz naturel.
Fait notable, Enel est l’un des plus importants producteurs d’énergie géothermique mondial, dans la lignée historique de l’Italie, qui a été le premier pays à produire de l’électricité grâce à cette source d’énergie. De plus, Enel détient les plus importantes centrales photovoltaïques du pays. Dans ce contexte, l’entreprise s’est bien sûr lancée dans de nombreux projets liés au déploiement de la filière hydrogène.
À lire aussi Tout savoir sur l’hydrogène, ses bons et ses moins bons usagesDes financements publics nombreux et généreux pour l’hydrogène
En avril 2023, Enel a reçu pour près de 4 milliards d’euros de financements publics prévus dans le cadre du Piano Nazionale di Ripresa e Resilienza (NRPP, en français : « Plan National pour la Reprise et la Résilience ») ayant fait suite aux mesures prises pour la gestion de la Covid-19. Ce plan vise à assurer la relance, en finançant des projets destinés à moderniser et à rendre plus propre l’économie italienne. Parmi eux, trois projets liés à la production d’hydrogène ont réuni un total de 38 M€ (millions d’euros). Il s’agit des projets liés à la reconversion des centrales de Corigliano Rossano en Calabre, de Frédéric II à Brindisi dans la région des Pouilles, et d’Eugenio Montale à La Spezia en Ligurie.
En effet, le Piano Nationale Integrato per l’Energie et il Climat 2030 (PNIEC, en français « Plan National Intégré pour l’Énergie et le Climat ») prévoit notamment l’abandon du charbon pour 2025, et donc la fermeture de la centrale. Cela implique la recherche d’une reconversion pour le site de façon entre autres à assurer un avenir à l’emploi local.
Dans ce cadre, pour la centrale de La Spezia, un appel d’offre national a été lancé par la Région, en coopération avec le ministère de l’Environnement, pour un financement total de 14 M€. Cet appel d’offre avait conduit à sélectionner le projet « Hydrogen Valley » d’Enel, à hauteur de 13,72 M€, c’est-à-dire la quasi-totalité du financement disponible. Ce financement s’ajoute à ceux du NRPP cité plus haut, et confirme bien la volonté publique de transformer d’anciennes centrales au charbon en plate-forme de production d’hydrogène vert.
À lire aussi L’hydrogène est un gaz à effet de serre deux fois plus puissant qu’on ne le pensaitDeux abandons coup sur coup
Mais les mauvaises nouvelles se sont accumulées. En août 2023, Enel abandonne le projet de Corigliano Rossano. Cet abandon aurait conduit au remboursement des subventions publiques reçues par Enel, à hauteur de 14 M€, mais cela n’a en rien réduit la colère des autorités locales, notamment la commune. En effet, il reste toujours l’enjeu des emplois, remis en cause par la fermeture de la centrale.
Et novembre 2023, Enel a ensuite communiqué aux autorités de la région de Lugurie son intention d’abandonner son projet hydrogène de La Spezia. Les raisons évoquées sont un manque de rentabilité, et ce, en dépit des subventions publiques, ainsi que le manque de perspectives concernant la clientèle susceptible d’acheter l’hydrogène. Enel a toutefois annoncé poursuivre ses autres projets de production d’hydrogène vert. Nous verrons ce qu’il en est, notamment dans un contexte de forte hausse des taux d’intérêts. Ces hausses constantes rendent en effet beaucoup plus difficile l’accès à des financements pour des projets à la rentabilité difficile.
Commentaires
On sait très bien que l'H2 n'est pas facile à manipuler, mais tant qu'il y a des subventions juteuses déversées par des ignares, il faut pas rater ça !
Bravo vous avez résumé en 1 phrase le contexte actuel, mais qui paye? C'est nous! Au détriment de solutions pragmatiques....