Selon une nouvelle étude publiée par l’ONG américaine Environmental Defense Fund (EDF), la production à grande échelle d’hydrogène vert pourrait avoir des conséquences importantes sur le climat en raison de la relative facilité avec laquelle ces toutes petites molécules peuvent fuiter des réservoirs qui les stockent ou des canalisations qui les transportent.
Composé de 2 atomes, le dihydrogène (H2) est la plus petite des molécules. Elle est 8 fois plus ténue que celle du méthane, le gaz fossile (injustement qualifié de « naturel »). Les risques de fuites sont donc plus importants qu’avec n’importe quel autre gaz. Il est en effet difficile de rendre complètement étanche les réservoirs et les canalisations contenant de l’hydrogène, surtout lorsque celui-ci est comprimé à très haute pression : il peut s’échapper par des ouvertures microscopiques. Ainsi, même les meilleurs réservoirs ne sont jamais complètement étanches pour le dihydrogène.
Or il apparait que l’hydrogène est un puissant gaz à effet de serre, plusieurs équipes scientifiques nous ayant déjà alerté sur son action néfaste pour le climat. En réalité, l’impact de l’hydrogène est indirect : il prolonge la durée de vie dans l’atmosphère du méthane, dont on sait que le potentiel de réchauffement global[1] est élevé. En outre, les réactions de l’hydrogène dans la troposphère avec les autres gaz qui la composent, participent à la formation d’ozone et de vapeur d’eau, et ces molécules accroissent aussi l’effet de serre.
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Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Atmospheric Chemistry and Physics par Ilissa Ocko et Steven Hamburg, 2 scientifiques de l’ONG américaine EDF (Environmental Defense Fund), la production à grande échelle d’hydrogène vert pourrait avoir des conséquences plus graves que celles qui avaient été estimées précédemment.
« Nos résultats indiquent que les émissions d’hydrogène peuvent considérablement compromettre les avantages climatiques des stratégies de décarbonisation basées sur l’utilisation d’hydrogène vert, en particulier au cours des décennies qui suivent immédiatement leur développement », expliquent ces chercheurs. « Pour que l’hydrogène soit efficace en tant que stratégie de lutte contre les changements climatiques, il importe de réduire drastiquement les risques de fuites, mais aussi les émissions incontrôlées ou accidentelles, par exemple lors des purges », précisent-ils encore.
Limiter les fuites à moins de 1%
Si l’ONG avoue que les émissions d’hydrogène dans l’atmosphère ne sont actuellement pas connues avec précision, ils estiment que le scénario le plus optimiste les chiffre à 1 % des volumes produits, mais que dans certains cas elles pourraient atteindre 10%.
Selon ces chercheurs, un taux de fuite moyen limité à 1 % n’ajouterait qu’environ 0,025 °C au réchauffement climatique d’ici 2050, mais des fuites de l’ordre de 5 % ou 10 % pourraient élever les températures mondiales moyennes de plus de 0,1 ou 0,4 °C respectivement.
En conclusion, Ilissa Ocko et Steven Hamburg conseillent d’utiliser pour le stockage et le transport d’hydrogène, des installations nouvelles conçues à cet effet, au lieu de « rétrofiter » d’anciens systèmes prévus à l’origine pour contenir du méthane.
[1] Le potentiel de réchauffement global ou PRG est un facteur de conversion qui permet de comparer l’influence de différents gaz à effet de serre sur le réchauffement climatique.
Commentaires
Comme rappelé dans l’article : « les fuites d’hydrogène ne sont pas connues actuellement avec précision ». L'article , au cas où l'effet de l'hydrogène dans l'atmosphère proche et lointaine, serait avéré par des observations /mesures, mets simplement en garde, de façon justifiée par le fait que « ces toutes petites molécules peuvent fuiter des réservoirs qui les stockent ou des canalisations qui les transportent » : a priori logiquement avec des précautions particulières ceci peut être sinon évité du moins réduit au minimum. ( ce qu'indique d'ailleurs l'article).Pour cela d’’abord il faudrait établir l’importance des fuites suivant la qualité du réservoir : cela parait simple, en mesurant son poids au cours du temps.
C’est l’aspect tactique de la question. Stratégiquement, il conviendrait d’utiliser l’hydrogène le plus vite possible, avant qu'il s'échappe : localement, avec un réseau de distribution réduit. A noter néanmoins que TEREGA, l’équivalent pour le gaz de RTE pour l’électricité, veut construire une nouvelle canalisation entre Toulouse et Albi, qui servira à l’utilisation de l’hydrogène, mais seulement pour ~5 %. Pour 100%, ne pourrait-on pas examiner l’efficacité de la canalisation entourée par une autre remplie d’azote sous pression ? Si c’est positif on pourrait utiliser les canalisations actuelles sur toute la France en introduisant dedans un tuyau plus fin pour l’hydrogène.
De toute façon on s’abstrait du problème de la taille de l’hydrogène en utilisant l’ammoniac qui en dérive ( réaction Haber-Bosch).
Avouez qu'il est cocasse pour l'hydrogène, dont l'unique avantage face aux batteries est la capacité de stockage à moyen terme, de devoir être consommé "le plus vite possible" pour éviter de trop grosses fuites de GES et pertes de rendement...
En dehors du remplacement de l'hydrogène consommé par les industries, actuellement fossile, je ne vois pas trop où est l'intérêt de cette technologie largement sous-optimale, surtout si c'est pour l'utiliser dans des domaines où d'autres alternatives sont infiniment plus efficaces, comme le transport ou le chauffage.
La question de l'hydrogène est en évolution accélérée, qui échappe de ce fait à bien des gens : je vous renvoie donc à l' "exposé participatif" de la SEPRA81, qui se tient à Rabastens (Tarn) depuis 6 ans ( sauf les deux dernières années à cause des restrictions imposées). Le prochain se tiendra le 9 septembre à 20h15. Il sera enregistré et le lien de son passage sur "you tube"sera mis sur les deux sites de l'association.