L’industrie solaire européenne renaît : une nouvelle gigafactory s’installera dans le port de Séville
La start-up espagnole Greenland annonce la construction d’une nouvelle gigafactory solaire dans le port de Séville. D’ici 2 ans, elle devrait produire 5 GW de cellules et de modules photovoltaïques. Le Fraunhofer Institute for Solar Energy Systems (ISE), renommé pour son expertise en la matière, participera à la production en apportant son support technique. Après les giga projets lancés notamment par Energetica en Autriche, REC Solar en Lorraine, et Meyer Burger en Saxe, nous assistons bel et bien à une résurrection de l’industrie solaire en Europe.
Dans l’usine andalouse projetée par Greenland, la fabrication sera intégrée sur l’ensemble de la chaîne de valeur, de la production du silicium aux modules, en passant par les wafers[1] et les cellules.
Si la capacité annuelle annoncée de 5 GW en fait le projet européen actuellement le plus ambitieux, il reste relativement modeste par rapport aux usines asiatiques. En Chine, deux unités de respectivement 30 et 60 GW sont en cours de construction.
Mais en Europe, les économies d’échelle ne sont pas les seuls critères de rentabilité face à la concurrence asiatique. Les coûts de production des panneaux solaires étant de plus en plus réduits, ceux du transport depuis l’autre bout du monde pèsent de plus en plus dans la balance. Ils représentent désormais environ 10 % des coûts totaux. En outre, le blocage du canal de Suez par le porte-conteneurs d’Evergreen en mars dernier a révélé la fragilité des voies d’acheminement des produits asiatiques.
Des critères environnementaux
L’importance grandissante accordée par les clients européens aux critères environnementaux et aux émissions de CO2 tout au long de la chaîne de production, joue aussi en faveur de nos fabricants.
C’est du moins ce qu’à démontré une enquête menée par l’Institut Fraunhofer ISE, partenaire de Greenland dans le projet de Séville. Les chercheurs allemands ont établi que la tarification des émissions de carbone pendant le processus de fabrication pouvait avantager les producteurs européens dont les usines sont alimentées principalement par des énergies renouvelables. Cette donnée est à la base du modèle commercial du projet espagnol.
Les deux partenaires ont également mis au point un système de production fortement automatisé réduisant les coûts de la main d’œuvre et susceptible de rentabiliser le projet, à condition de voir grand. D’où la capacité annoncée de 5 GW.
Tous ces arguments et le cadre politique favorable du Green Deal européen ont convaincu la Communauté autonome d’Andalousie et la ville de Séville de soutenir le projet d’une gigafactory intégrée de modules photovoltaïques.
Pour Andreas Bett, le directeur de l’Institut Fraunhofer, le projet de Séville est un nouveau signe de la relance d’une production industrielle de modules en Europe. « Les technologies solaires les plus avancées au monde sont actuellement en cours de développement dans les centres de recherche européens. Par exemple les cellules solaires tandem qui atteignent les plus hauts rendements et conduisent ainsi à des économies d’espace et de matière. Mais aussi les technologies de production durables basées sur l’économie circulaire et le recyclage », souligne-t-il.
La renaissance de l’industrie photovoltaïque européenne
Il ne s’agit pas d’une première en Europe. En 2019 déjà, le fabricant autrichien Energetica a mis en service une gigafactory solaire à Liebenfels, près de Klagenfurt. Cette entreprise avait déjà compris l’importance d’associer un projet d’industrie 4.0[2] à une production durable et respectueuse de l’environnement. L’usine couvre une grande partie de ses besoins énergétiques par une centrale photovoltaïque de 2,7 MW installée sur son site. Le solde de ses consommations électriques est en grande partie d’origine hydroélectrique. la technologie hétérojonction brevetée par le CEA-Liten.
Les projets de l’industriel suisse Meyer Burger témoignent également d’une renaissance de l’industrie photovoltaïque sur notre continent. La société a racheté les anciennes usines Solarworld situées à Arnstadt et Freiberg en Allemagne. Victime de la concurrence chinoise, cette entreprise qui a été déclarée en faillite en 2017, était l’un des plus importants producteurs mondiaux de modules solaires.
Meyer Burger compte lancer la production le mois prochain avec une tranche de 400 MW. Les premiers panneaux seront disponibles chez les grossistes en juillet de cette année. La capacité des usines sera ensuite progressivement augmentée pour atteindre une capacité de 5 GW par an d’ici 2026.
A Sarreguemines, en Moselle, une autre gigafactory de 2 GW est projetée par le groupe norvégien REC Solar, avec possibilité de doubler la capacité. Pour ce projet, il a adopté la technologie hétérojonction brevetée par le CEA-Liten.
Le bilan de la concertation publique et la décision finale d’investissement sont attendus en juin.
[1] Un « wafer » est une fine tranche d’un matériau semi-conducteur comme le silicium. C’est le composant de base des cellules photovoltaïques.
[2] Portée par l’émergence des nouvelles technologies, l’industrie 4.0 désigne une nouvelle génération d’usines connectées, robotisées et intelligentes.
Commentaires
Bonjour, J'ai toujours de la difficulté à lire les petits bouts de phrases écrits en bleu pale, il me semble que si vous les écriviez en noir foncé, ils seraient plus facile à lire et je suis certain que vous atteindriez quand vos objectifs d'en souligner l'importance.
Merci à l'avance de votre attention.
Je crains que, pour être rentables, ces nouveaux producteurs européens ne fassent imposer de nouvelles taxes aux panneaux importés d Asie, engendrant une sérieuse augmentation du coût du PV pour l investisseur européen. Tout cela alors que la technologie n est presque plus subsidiee et plutôt même taxée de plus en plus.
Le fait local est une constante pour le renouvelable. Faire sa propre électricité annule son transport, espérons que produire les PPV localement annulent le besoin de les transporter depuis la Chine et on sera 100% autosuffisant énergétique, contrairement au nucléaire dont on importe 100% du combustible.
L'article nous apprend qu'il y a un port maritime à Séville, à 80 km de la mer accessible via le fleuve Guadalquivir. Des bateaux de 160 m de long et 25 m de large peuvent être accueillis, voire plus encore après accord des autorités portuaires. Les bateaux remontent aisément le fleuve en profitant de la marée montante qui se fait sentir jusqu'à Séville. Le mouillage garanti (ou tirant d'eau maxi) varie donc selon les marées.
L'Europe installe un ordre de grandeur de 20 GW de PV par an alors qu'elle devrait en installer bien plus pour atteindre la neutralité carbone dans un avenir raisonnable.
Il y a donc de la place pour bien d'autres gigafactories.
Par exemple, en Allemagne, la production électrique de 5GW de PV supplémentaires par an avec 10% de rendement ne représente même pas la moitié de celle d'un réacteur nucléaire de 1GW qui fonctionnerait 80% du temps, en prenant en compte les pertes liées au stockage journalier.
(Évidemment, c'est beaucoup plus facile en Espagne, avec un rendement de 20% et une bien meilleure répartition annuelle).
En cas de surproduction mondiale, comme cela a été le cas il y a quelques années, la Chine utilise les panneaux produits en trop par rapport à la demande mondiale pour les installer sur son territoire.
(Vous pouvez corriger dans l'article "une production de 5GW par an" et "des usines chinoises de 30 et 60 GW par an").