Les eaux usées industrielles sont un formidable gisement d’énergie
En Europe, de nombreuses usines transforment des produits agricoles à destination de la population humaine ou de l’alimentation des animaux, qu’ils soient de rente (bovins, porcs, volailles…) ou de compagnie (chiens, chats…). Cela génère des déchets qui se retrouvent en grande partie dans les eaux usées. Une excellente matière première pour la production durable de biogaz conformément aux principes de l’économie circulaire.
L’European Biogas Association (EBA) vient de publier une estimation du potentiel de production de biogaz à partir des eaux usées industrielles. Grâce au recours à la biométhanisation, l’industrie pourrait réduire la consommation d’énergie des installations de traitement des eaux usées, mais également apporter une solution à la gestion des boues. En outre, il y aura création d’emplois verts au niveau local. Le document comprend également des recommandations pour l’exploitation de ce potentiel.
Selon l’analyse de l’EBA, il est possible de récupérer environ 142 TWh[1] de biogaz par an en valorisant les eaux usées des secteurs des pâtes et papiers, de la brasserie, de la production d’éthanol et de spiritueux, des huiles végétales et du biodiesel, de la transformation du lait et de la viande. Il y aurait également un potentiel de production de biogaz à partir des eaux usées d’autres secteurs industriels. Jusqu’à présent, ces gisements n’étaient pas pris en compte dans la plupart des études estimant les potentiels de production d’énergie renouvelable.
Economiquement intéressant et créateur d’emploi
Actuellement l’empreinte carbone des eaux usées industrielles est élevée. Au contraire, dans un digesteur, elles sont épurées dans un environnement clos et contrôlé, et le méthane généré n’est pas renvoyé dans l’atmosphère. La production de biogaz à partir des eaux usées peut réduire de 75 % la consommation actuelle d’électricité pour leur traitement, ce qui correspond à environ 32 TWh par an pour l’ensemble de l’UE. Le traitement anaérobie réduit en outre la production de boues jusqu’à 70-80% dans la plupart des cas, ce qui entraîne une diminution des coûts. Dès lors, l’EBA explique que la production de gaz renouvelable à partir d’eaux usées industrielles est économiquement intéressante. Selon ses estimations, le nombre d’emplois locaux générés par le traitement anaérobie des eaux usées pourrait passer de 1000 postes de travail aujourd’hui à 20.000 dans des TPE ou PME, si tout le potentiel était exploité.
La durée de vie des stations d’épuration est généralement de 20 à 25 ans, D’ici 2050, elles seront rénovées, reconstruites ou remplacées au moins une fois. Ce sont des opportunités de choix plus durables pour les années à venir.
À lire aussi Des lasagnes ou des yaourts transformés en électricité : le biogaz pourrait réduire de 12 % les émissions de CO2La filière peut devenir productrice nette d’énergie
En conclusion, l’EBA demande que la production de biogaz à partir des eaux usées industrielles soit prise en compte dans la future législation européenne. De même, les objectifs de la directive sur les eaux usées urbaines et de la stratégie sur le méthane doivent être alignés sur l’agenda de l’UE en matière d’énergie propre. Selon Vasilis Diamantis, le président du groupe de travail EBA sur les eaux usées, la pénétration de cette technologie dans les PME européennes devrait stimuler le marché des technologies environnementales, créer de nouveaux emplois et réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre. Des incitations économiques sont nécessaires et doivent être combinées à une législation environnementale et à des mesures de sensibilisation sociale. Des solutions spécifiques devront être développées et assurer des économies d’échelle pour la production d’énergie décentralisée. Ce sont de vrais défis pour l’avenir, d’autant plus que la filière peut devenir productrice nette d’énergie.
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[1] Soit près de 10 fois le potentiel belge de biogaz
Commentaires
Le biogaz est indispensable en back-up de l'éolien.
Hormis cela, il y a les interconnexions pour utiliser le foisonnement, la biomasse, l'hydraulique de barrage classique, les STEPs et batteries pour une durée assez limitée, et les centrales thermiques classiques avec capture de CO2.
Les panneaux solaires verticaux peuvent produire un peu en hiver à latitude moyenne.
L'hydraulique au fil de l'eau constitue une production de base non pilotable, mais tout de même présente.
Des tarifs variables de l'électricité en fonction des conditions météo, incitant par exemple la recharge des batteries de voitures électriques durant les périodes ventées (il est rare qu'il y ait plus de 10 jours consécutifs avec peu de vent de novembre à février.
Peut-être: le nucléaire, dans un futur contexte de probable forte hausse des prix de l'uranium étant donnée les réserves limitées. (Exemple d'adaptation: dimanche dernier 13 juin 2021, le nucléaire est à 29GW dans l'après-midi et à 38GW en soirée.)
Le stockage par hydrogène restera un moyen très cher, de dernier recours.
Peut-être certains inventeront d'autres méthodes de stockage à LT, avec un meilleur rendement.
Vient-on de le découvrir?
Il y a 40 ans environ, lors d'une sortie scolaire, j'ai visité l'immense station d'épuration d'Achères qui traite les eaux usées de Paris. Les boues de décantation étaient déjà méthanisées et le gaz consommé sur place dans des gros moteurs "diesel" entraînant des alternateurs, la station d'épuration était en autoconso électrique, approximativement.
Evidemment, Hubert, les boues des stations d'épuration sont méthanisées depuis longtemps. Mais l'article concerne une étude qui met en évidence l'utilité de méthaniser aussi les eaux usées produites par l'industrie et qui elles, sont encore rarement méthanisées.