Illustration : Révolution Énergétique.
Cet été, Révolution Énergétique se plonge dans les sites de production d’électricité bas-carbone les plus puissants du monde. Ces barrages, parcs éoliens, fermes solaires, centrales nucléaires, centrales à biomasse et autres systèmes de stockage peuvent afficher des dimensions considérables. Cette semaine, nous découvrons les sites disposant de la plus grande capacité de stockage d’électricité parmi 3 technologies : le pompage-turbinage (STEP), les batteries et l’air comprimé.
Méconnu, parfois oublié, le stockage d’électricité a pourtant un rôle très important à jouer dans la transition énergétique. Qu’il soit majoritairement renouvelable, nucléaire ou les deux, un mix électrique bas-carbone est plus fiable lorsqu’il s’appuie sur des systèmes de stockage de grande capacité.
La variabilité de la production éolienne et solaire peut, par exemple, être lissée grâce au stockage. Il peut également optimiser la production nucléaire, en accumulant ses excédents nocturnes. Enfin, les systèmes de stockage peuvent intervenir très rapidement pour stabiliser la fréquence du réseau.
Le stockage par pompage-turbinage
Plusieurs techniques permettent d’accumuler d’importantes quantités d’électricité. La plus employée sur terre est actuellement la « Station de transfert d’énergie par pompage-turbinage », aussi appelée « STEP ». Il s’agit d’un complexe hydroélectrique exploitant deux réservoirs d’altitudes différentes.
Lorsque l’eau du bassin supérieur est vidangée dans le bassin inférieur, des turbines génèrent de l’électricité : le stockage se vide. Pour le recharger, les turbines se muent en pompes, qui remontent l’eau vers le bassin supérieur.
Construire une STEP de grande capacité nécessite un relief montagneux adapté et des travaux titanesques. En rapportant le coût des travaux au mégawattheure (MWh) stockable, ce système est toutefois le moins cher.
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Bien plus coûteuse, la batterie séduit malgré tout pour sa rapidité de déploiement. Elle peut être installée n’importe-où et quasiment sans contraintes. Parfois, les batteries géantes sont placées sur les immenses terrains de centrales thermiques désaffectées ou bientôt abandonnées. Elles valorisent ainsi l’espace et profitent de la proximité de lignes électriques haute-tension.
Les batteries peuvent être empilées, réparties dans des bâtiments à étages et ainsi économiser de l’espace. Elles sont insérées la plupart du temps dans des conteneurs au format maritime prêts-à-brancher, facilitant leur déploiement. Leur empreinte environnementale est cependant très discutée au regard des ressources et de l’énergie nécessaire à leur fabrication, notamment lorsqu’elles proviennent d’Asie.
À l’avenir, les sites de stockage par batterie pourront exploiter plus massivement les accumulateurs usagés provenant de véhicules électriques.
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D’autres technologies un peu plus confidentielles permettent de stocker de grandes quantités d’électricités à travers un vecteur comme l’air comprimé, la chaleur, l’hydrogène, le CO2 ou le méthane. Certaines nécessitent toutefois d’être améliorées et fiabilisées. Pourtant très médiatisé, l’hydrogène doit par exemple relever de nombreux défis techniques concernant la sécurité et le rendement énergétique.
Parmi toutes ces méthodes alternatives, l’air comprimé semble la plus efficace et la mieux maîtrisée. Des sites de grande capacité sont actifs depuis plus de 40 ans et affichent des résultats convaincants. Plusieurs projets émergent également, avec des perspectives plus solides que certains projets de technologies nouvelles, mais non abouties.
À lire aussi Cette giga-centrale va stocker de l’électricité avec de l’air compriméCi-dessous, nous avons listé les sites de stockage disposant de la plus grande capacité au monde, dans chacune de leur catégorie. Nous n’avons pas considéré la puissance pour établir cette liste, puisqu’elle ne reflète pas la quantité d’électricité pouvant être stockée.
* « Autonomie sur le réseau français » : indication théorique destinée à contextualiser la quantité d’électricité stockable sur chaque site, basée sur la consommation moyenne d’électricité en France en 2021 (468 TWh).
1 – Pompage-turbinage : STEP Hongrin-Léman, Suisse
Puissance (GW) | Capacité stockage électricité (GWh) | Autonomie sur le réseau français * |
0,48 | 100 | Environ 2 h |
Mise en service en 1971, la STEP Hongrin-Léman en Suisse est probablement le plus grand site de stockage d’électricité au monde. Avec 100 GWh, c’est en tout cas le plus grand parmi ceux ayant communiqué officiellement leur capacité de stockage.
Toutefois, selon les estimations de l’étudiant ingénieur et passionné de STEP Benjamin Laredo, la STEP d’Helms en Californie pourrait atteindre 170 GWh. Une donnée impossible à vérifier, le site n’ayant pas dévoilé cette information.
La STEP Hongrin-Léman est composée d’un réservoir supérieur, formé par le barrage d’Hongrin. Situé à 1 253 m d’altitude, le lac artificiel peut stocker 52 millions de m3 d’eau. Il surplombe le lac Léman, qui constitue le réservoir inférieur.
L’eau chute sur une hauteur de 880 m avant d’entraîner les turbines totalisant 480 MW de puissance. 6 pompes permettent de « recharger » le lac supérieur en pompant l’eau du lac Léman. Le site restitue 1 TWh d’électricité chaque année selon Alpiq, l’un de ses propriétaires.
En 2026, la STEP Hongrin-Léman perdra son titre de plus grand site de stockage d’électricité du monde, au profit de la STEP Snowy 2.0 en Australie, actuellement en chantier. Cette dernière affichera 350 GWh de capacité.
À lire aussi Pourquoi EDF entretient ce tunnel inachevé depuis 40 ans ?2 – Batterie : Centrale de Moss Landing, États-Unis
Puissance (GW) | Capacité stockage électricité (GWh) | Autonomie sur le réseau français * |
0,4 | 1,6 | ~ 2 minutes |
La plus grande batterie du monde se trouve actuellement en Californie, à Moss Landing au sud de San Francisco. De nombreux pays investissant dans de gigantesques sites de stockage par batterie et les sites actuels pouvant être mis à jour rapidement, sa place de leader n’est pas définitivement acquise. À ce jour, Moss Landing conserve toutefois une belle longueur d’avance avec ses 1,6 GWh de capacité.
Les batteries sont implantées sur le périmètre d’une puissante centrale à gaz. Développé en plusieurs phases, le site a ouvert une première tranche de 300 MW de puissance et 1,2 GWh de capacité en décembre 2020 après deux années de travaux. Une seconde de 100 MW et 0,4 GWh a été mise en service en aout 2021.
Vistra, l’opérateur, aménage actuellement une troisième phase de 350 MW pour 1,4 GWh de capacité. Prévue pour être connectée au réseau durant l’été 2023, elle portera le total à 750 MW de puissance et 3 GWh de capacité. L’objectif à long terme serait d’augmenter la capacité à… 6 GWh.
À lire aussi Comment ces batteries géantes vont booster la transition énergétique en Martinique3 – Air comprimé : Centrale de McIntosh, États-Unis
Puissance (GW) | Capacité stockage électricité (GWh) | Autonomie sur le réseau français * |
0,11 | 2,86 | ~ 3 minutes |
Avec la STEP, l’air comprimé (aussi appelé « CAES » pour « Compressed air energy storage ») est l’un des plus anciens systèmes de stockage d’électricité. La toute première unité de stockage par air comprimé de grande capacité a vu le jour en 1978 à Huntorf en Allemagne (290 MW pour 1,16 GWh).
La seconde, installée en 1991 à McIntosh dans l’Alabama (États-Unis), est toujours celle qui dispose de la plus grande capacité : 2,64 GWh pour une puissance assez modeste de 110 MW.
À lire aussi Remora : une technique innovante de stockage d’énergie en mer par air compriméLe principal avantage du stockage par air comprimé est sa faible emprise au sol. En effet, l’air est stocké dans des cavités souterraines, souvent salines, car plus hermétiques. La « recharge » s’effectue en compressant l’air dans ces réservoirs au moyen d’un puissant compresseur électrique.
Lorsqu’il se « décharge », le système décompresse l’air dans une turbine qui entraîne un alternateur. Le processus crée également de la chaleur fatale, qui peut être récupérée pour améliorer le rendement.
Le plus grand projet de stockage à air comprimé du monde est situé à Rosemond en Californie. Développé par la société canadienne Hydrostor, il développera une puissance de 500 MW pour 4 GWh de capacité de stockage.
Notre série sur les centrales électriques bas-carbone les plus puissantes du monde :
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Commentaires
Le pompage turbinage n’est pas la seule technologie qui permettrait de supprimer l’intermittence des énergies renouvelables. Il est possible d’utiliser d’autres techniques qui permettraient de réduire les besoins de transformation , tout en offrant au moins, la même efficacité productive que les STEP ou l'hydrogène !
Car ce qui fait la force des énergies renouvelables par rapport aux énergies fossiles ou nucléaire, c’est qu’elles peuvent être produites dans le pays qui les utilisent, donc sans dépendance. (On voit avec la guerre en Ukraine, ou peut nous mener la dépendance mondialiste !)
Qu'elles n’utilisent pas la chaleur pour produire de l’électricité, donc qu'elles ne participent pas au réchauffement.
Qu'elles n'ont pas besoin d'eau pour produire de la vapeur , donc qu'elles peuvent se passer des barrages.
Qu'elles peuvent être stockées sans être obligé chercher, creuser, transporter ,transformer, distribuer ,etc. .comme le pétrole , le gaz, le charbon ou l'uranium. Qui ne sont que des stocks d'énergie qu'il faut encore transformer pour pouvoir être utilisés dans des moteurs adaptés.
De plus, en produisant directement l'électricité sans usine dédiées (1 EPR c'est 20 milliards) elles permettraient de réduire les besoins de stockage qui pourraient ne concerner que les périodes de manque. Qu'on pourrait comptabiliser par comparaison décennales avec les conditions climatiques des régions concernées .
Enfin celles ci ne produisent pas de gaz à effet de serre , peuvent fonctionner plus de vingt ans sans apport de carburant , ne produisent pas des déchets dangereux, qui contraint le pays à construire un centre d'enfouissement (Cigéo c'est 30 milliards sans la moindre production de watt).
De plus elles ne défigurent pas plus les paysages que les poteaux électriques qui bordent nos routes, et ne tuent pas plus d'oiseaux que les lignes hautes tentions qui traversent nos forêts et nos champs !
Si on comptabilise toutes les étapes nécessaires à la production renouvelables et qu'on les comparent à celles nécessaires à l'utilisation des fossiles ou de l'atome, on constate qu'il serait possible de faire d'énormes économies de moyens, donc des possibles économies pécunières , Mais celles ci sont souvent rendues impossibles, du fait des décisions gouvernementales, comme le fait de prendre une partie des bénéfices des producteurs éoliens (ce qui fait fuir les investisseurs ) pour nous dit-on, lutter contre l'inflation ? Inflation due essentiellement à l'augmentation du prix des fossiles (gaz et pétrole) et des déboires de notre filière nucléaire.
Ceci alors même, qu'il faudrait agir pour éviter les conséquences du réchauffement et qu'on pourrait le faire sans se priver de rien !
Par exemple avec les renouvelables on peut passer directement de la production électrique au stockage, sans recourir aux batteries qui nous ramène vers une dépendance au lithium. Ou à l’hydrogène, qui ne présente d’ intérêt, qu’ à partir du moment ou le stockage renouvelable sera en mesure d’assurer sa production.
Alors qu’il faudra toujours pour les fossiles et le nucléaire, rechercher, extraire, transporter, transformer, diviser. Donc dépendre de pays plus ou moins stables, plus ou moins "amis", profitants de notre faiblesse pour assurer leurs survie. Alors même que nous fabriquons les moteurs de notre dépendance ? Moteurs pour certains, insatiables en eau qui manque déjà à l'agriculture ? Et que cette eau, transformée en vapeur va ensuite participer au réchauffement climatique.
Enfin, si l’on veut comparer la production des renouvelables avec celle du pétrole ou du charbon par exemple, on sait que sans pétrole, donc sans machines fonctionnant avec cette énergie, il aurait été impossible à l’humanité d’atteindre son actuel degré de technologie.
Il est donc primordial si l’on veut inverser la courbe du changement et du réchauffement, de sortir de cette dépendance qui nous entraine vers une catastrophe planétaire, que seul, le développement des énergies et du stockage renouvelable permettraient de limiter.
Bonjour, les 2 plus puissants STEP en France (Grand'Maison et Montézic) ont des valeurs dont vous auriez pu parler (130 Millions de m3 et 1,7GW... ce qui doit faire une bonne quantité d'énergie avec 1000m de chute pour la première et 30 Millions de m3 et 920MW pour le second et 450m de chute). C'est effectivement un moyen de stockage très efficace développé en parallèle des centrales nucléaires et qui permet maintenant aussi le lissage des ENR... il serait mieux d'en construire un peu plus que des "mini" réacteurs dans nos campagnes !!!
Le stockage est une facteur très important pour le développement des enr, revoir nos périodes de consommation et moins consommer et sûrement plus rapide et moins cher à mettre en œuvre dans un premier temps. Pour rappel actuellement on continue à favoriser une consommation d'énergie nocturne car produite par du nucléaire et donc qui permet de continuer à maintenir artificiellement l'idée que l'on peut consommer de l'énergie sans contrainte. Les barrages et les stockage on pour but de gérer les crêtes de consommation.
Permettez moi de rigoler....
Connaissez vous au moins la quantité d'énergie nécessaire à la compression d'un m3 d'air de 1 à 8 bars abs?