L’éolien, nouvelle machine à cash de l’État ?


L’éolien, nouvelle machine à cash de l’État ?

Illustration RE.

Vous le savez sans doute, les éoliennes ont longtemps été subventionnées. Que ce soit par « guichet ouvert » ou par « appels d’offres » compétitifs, l’État, par le truchement d’EDF ou des entreprises locales de distribution, a garanti l’achat de tous les kilowattheures éoliens (et solaires) pour des durées de quinze ou vingt ans. À un tarif suffisant pour permettre une « rémunération raisonnable » des exploitants, compte tenu du risque de ces investissements. Mais le contexte actuel inverse les rôles.

En pratique, suivant une réforme européenne des aides d’État de 2014, c’est le mécanisme du « complément de rémunération » qui est en jeu. Les exploitants mettent d’abord leur électricité sur le marché, puis l’État complète jusqu’au tarif convenu par contrat – pour l’éolien terrestre, ce tarif était descendu sous les 6 centimes du kWh, puis il est légèrement remonté dans les derniers appels d’offres, du fait de la hausse des matières premières et du coût du crédit.

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Plus précisément, le complément de rémunération est calculé comme la différence entre ces tarifs convenus et un « prix de marché de référence », qui est celui obtenu par l’ensemble des éoliennes au cours du mois précédent. Cette petite subtilité permet de conserver l’incitation pour chaque exploitant à vendre au meilleur prix, c’est-à-dire, dans la mesure du possible, au meilleur moment pour le réseau.

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L’éolien rapportera près de 4 milliards d’euros à l’État en 2022

Mais si le tarif devient inférieur aux prix de gros sur les marchés de l’électricité, les exploitants doivent reverser la différence à l’État. Or c’est le cas depuis le dernier trimestre 2021, en raison de l’envolée des prix de marché de l’électricité, qui suit en partie celle des prix du gaz naturel.

Déjà cette année-là, les subventions, à l’origine estimées à plus de 1,3 milliard d’euros, se sont réduites à 200 millions tout juste. Et en 2022, ce sont les exploitants d’éoliennes qui subventionneront l’État, à hauteur de quatre milliards d’euros. Sur la base des estimations actuelles, les recettes s’élèveront à 3,5 milliards, selon un calcul de la Commission de régulation de l’énergie publié le 13 juillet.

Par conséquent, le calcul de la Cour des Comptes de 2018, sans cesse brandi par les opposants aux éoliennes, en prend un sacré coup. Il présentait le coût, passé et à venir, des éoliennes titulaires d’un contrat à 121 milliards d’euros. L’analyse récente de la CRE montre que les subventions déjà versées atteignent tout juste onze milliards – et pourraient bien être remboursées avant fin 2024.

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Des subventions déjà remboursées

D’autant que le gouvernement entend s’approprier l’essentiel de la rente éolienne à venir. En effet, contractuellement, les exploitants d’éoliennes ne doivent contribuer aux recettes de l’État, quand les prix de gros de l’électricité sont supérieurs aux prix convenus, que dans l’exacte mesure des subventions encaissées depuis le début des contrats. C’est ce qu’on appelle le plafonnement des avoirs des contrats de complément de rémunération. Il devrait s’appliquer tout de suite à certains projets récents, qui ont d’ores et déjà remboursé les subventions perçues.

L’article 13 du projet de loi de finances rectificatives, actuellement en débat au Parlement (l’Assemblée nationale l’a déjà voté, c’est maintenant au tour du Sénat), prévoit de « déplafonner » ces avoirs, pour toute l’année 2022. Le gouvernement avait d’ailleurs en partie anticipé cette mesure, par une note de la Direction générale du Climat de l’Énergie à EDF, en date du 30 avril.

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Ne pas tuer la poule aux œufs d’or

Le calcul de la CRE tient compte de ce déplafonnement partiel, qui ne porte que sur les mois d’avril à décembre. De ce fait, la contribution finale des éoliennes au budget de l’État va augmenter. Et la reconduction très probable de ce déplafonnement pour les années suivantes va garantir cette rente pour les finances publiques.

Il s’agit d’éviter des surprofits indus et de maintenir, pour les exploitants d’éoliennes, une rémunération « raisonnable » de leur investissement. Le motif est plutôt légitime – il faudrait malgré tout tenir compte, pour les projets acceptés ces dernières années mais pas encore construits, du renchérissement du coût de la construction et du financement des projets, afin de ne pas tuer la poule aux œufs d’or, car même à 7 ou 8 centimes le kWh, l’électricité éolienne restera très compétitive sur les marchés de l’électricité au cours des prochaines années.

Mais surtout, on ne peut manquer d’être interloqués par le fait que le gouvernement et sa majorité préemptent les profits indus des éoliennes, mais ont fermement refusé de faire de même avec les profits, tout aussi indus, des compagnies gazières et pétrolières. Deux poids, deux mesures…

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