Le tsunami des panneaux solaires flottants


Le tsunami des panneaux solaires flottants

La vague des parcs solaires flottants déferle un peu partout dans le monde. Mais pourquoi les plans d’eau ont-ils soudain autant d’attrait ?

La commune de Piolenc (Vaucluse), a récemment inauguré la plus grande centrale solaire flottante d’Europe : 47 000 panneaux photovoltaïques ancrés sur un lac artificiel, qui fourniront 17 000 MWh par an. Une telle production équivaut à celle de trois éoliennes terrestres, ce qui couvrira la consommation annuelle de 4700 ménages.

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On comprend la fierté de Louis Drey, le maire de Piolenc, bien qu’aux quatre coins du monde, que ce soit en Grande-Bretagne, au large de la Belgique, au Japon, en Malaisie ou même en Chine, les projets de centrales photovoltaïques flottantes d’une puissance bien plus élevée se multiplient à une vitesse surprenante. La taille de ces parcs augmente également sans cesse. L’Australie a récemment construit une ferme de 330 MWc constituée de 1,3 million de panneaux (voir notre dossier), mais plusieurs autres projets plus ambitieux sont déjà à l’étude. Aux Pays-Bas, un archipel de 15 îles constituées de 73 500 panneaux solaires flottants verra le jour en 2020 au large d’Andijk. La particularité de ces panneaux est qu’ils seront orientables, et qu’en suivant la trajectoire du soleil, ils offriront un rendement supérieur de 30% à celui des panneaux fixes.

La France n’est pas en reste. A Lille, l’entreprise Ciel et Terre développe depuis 2010 un système de flotteurs et d’ancrages pour panneaux solaires. La PME, qui emploie plus d’une centaine de salariés, a déjà installé 125 parcs solaires flottants depuis 2013, dont 80 au Japon. En moins de 10 ans, elle a réussi à se positionner comme l’un des leaders dans la technologie du solaire flottant.

Les raisons qui expliquent l’essor du solaire flottant sont multiples :

  • la densité de population en hausse entraîne une pénurie de terres disponibles ;
  • l’effet Nimby (Not In My Backyard – pas dans mon jardin) se traduit par une forte opposition aux grands projets d’infrastructure ;
  • le coût des panneaux photovoltaïques continue de baisser ;
  • les parcs solaires flottants offrent une rentabilité supérieure : coût d’installation de 0,8 €/W contre 1,5 €/W pour le solaire en toiture et un peu plus d’1 €/W pour les ombrières.

Un projet pilote en Mer du Nord

Généralement, c’est sur des lacs, des bassins d’irrigation, des réservoirs de traitement d’eau, ou des barrages que les projets voient le jour.

Mais pour la première fois, une ferme solaire pourrait se réaliser en haute mer. Les sociétés belges Deme, Sioen, Colruyt, Jan de Nul et Tractebel viennent de lancer un projet de centrale flottante en Mer du Nord. Dans un premier temps, le consortium souhaite réaliser une étude de faisabilité, ensuite un projet pilote. Si les résultats sont favorables, l’objectif est d’installer la première installation photovoltaïque au large de la Belgique.

Les défis à relever sont toutefois nombreux car, si la pose de panneaux sur un lac ou un réservoir d’eau douce est moins coûteuse qu’une installation résidentielle, de nombreuses inconnues subsistent sur les coûts réels d’une ferme photovoltaïque en mer : coûts à l’installation, mais aussi coût de la maintenance du fait de la salinité de l’eau. En effet, si le climat et la houle sont des paramètres à maîtriser, les effets du dépôt de sel sur les panneaux solaires pourraient entraîner des frais d’entretien plus importants.

Un impact environnemental encore difficile à évaluer

Il est prématuré de vouloir évaluer l’impact qu’auront ces projets sur la faune et la flore locales. Mais certaines associations environnementales tirent déjà la sonnette d’alarme sur les dangers que représente ce type de projets. Elles s’inquiètent notamment de l’impact de ces centrales lacustres sur la qualité des eaux, et craignent une eutrophisation due à la diminution de l’ensoleillement des plantes aquatiques situées sous la surface de l’eau. Le développement du phytoplancton risque également de ralentir, ce qui pourrait perturber la chaîne alimentaire.

D’autres associations craignent pour certaines espèces d’insectes et d’oiseaux migrateurs. Les cormorans, notamment, pourraient être perturbés par les surfaces brillantes des panneaux, qu’ils confondraient avec la surface de l’eau.

Reste que les panneaux solaires ne couvrent jamais 100% de la surface de l’eau, mais généralement entre 30 et 50%, avec un maximum autour de 70%.

Des atouts indéniables

Installer un parc solaire flottant présente de nombreux avantages : en mer, les panneaux sont placés entre les éoliennes, là où les navires ne peuvent naviguer, ce qui permet une optimisation de l’espace. Mais ils permettent aussi de valoriser des lacs artificiels ou des réservoirs dont l’eau a été polluée par une activité industrielle précédente.

Les panneaux solaires flottants permettent également d’éviter de mobiliser des terres cultivables. Bien qu’il soit possible de combiner panneaux solaires et cultures de semi-ombre, ou élevage de moutons, l’empiètement sur les terres agricoles constitue un frein considérable au développement des centrales solaires au sol.

Les parcs solaires flottants présentent bien d’autres avantages :

  • les panneaux diminuent l’évaporation naturelle et le réchauffement excessif de la température de l’eau ;
  • les grands plans d’eau bénéficient d’un ensoleillement maximal et sont rarement soumis à des effets d’ombrage ;
  • la fraîcheur apportée par l’eau permet d’améliorer le rendement des panneaux en évitant la surchauffe des installations ;     
  • les panneaux réduisent la croissance des algues qui se multiplient avec le réchauffement global.

Une série d’atouts qui nous permettent d’affirmer que l’essor du solaire flottant est inscrit dans le ciel. Et sur mer.

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