La multiplication des climatiseurs est néfaste pour l’environnement et le climat. Lors des fortes chaleurs elle risque aussi de déséquilibrer les réseaux électriques. Il existe une alternative verte et peu énergivore : le géocooling.
Cet été, la canicule a frappé fort et tôt. Un peu partout en Europe, des records de température sont signalés. Le 28 juin, le mercure est monté jusqu’à 46°C dans l’Hérault, dépassant ainsi de 1,9°C la température maximale enregistrée par Météo France en 2003. Les météorologues estiment que ces épisodes de canicule vont se multiplier dans les prochaines années. La faute aux changements climatiques ou plutôt à tous ceux qui n’ont pas encore compris qu’il est urgent de changer nos habitudes et nos comportements.
Signe des temps : les ventes de climatiseurs explosent. Une solution pourtant néfaste, pour le climat comme pour l’environnement. En rejetant la chaleur vers l’extérieur des habitations, ils ne font qu’aggraver le problème dans les rues. Selon les experts, ces appareils augmenteraient la température extérieure de près de 2° C dans les zones urbaines fort équipées. En cas de fuite, les gaz réfrigérants qu’ils contiennent sont aussi particulièrement nocifs pour la couche d’ozone.
Et surtout, ils consomment beaucoup d’électricité, en particulier les petits climatiseurs mobiles dont le rendement est médiocre. Au point que l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) s’alarme de la multiplication des climatiseurs partout dans le monde. En France ils sont déjà responsables de 6 % de la consommation totale d’électricité. Dans les pays émergents aux climats chauds comme la Chine ou l’Inde, l’explosion de la demande pourrait déséquilibrer les réseaux électriques. L’inauguration du premier stade climatisé au Qatar prouve qu’on n’est pas à une aberration près. De 1,6 milliard d’appareils installés aujourd’hui, on pourrait passer à 5,6 milliards en 2050, avec à la clé une croissance des émissions de gaz à effet de serre. « Le monde va subir une crise du froid », annonce Fatih Birol, directeur de l’AIE.
Une alternative verte : le puits provençal
On n’y coupera pas, il va falloir apprendre à augmenter notre tolérance à la chaleur. Mais il existe quand même des alternatives écologiques pour lutter contre les canicules. Utilisée déjà dans l’Antiquité, notamment à Rome, la géothermie, et plus particulièrement ce qu’on appelle maintenant le « géocooling », consiste à capter la fraîcheur dans le sol et à l’insuffler dans l’habitation. Une solution « verte » qui utilise de l’énergie renouvelable.
A une certaine profondeur, la température du sous-sol est en effet constante, été comme hiver : de l’ordre de 10 à 12°C. Cette propriété est notamment exploitée dans les installations de chauffage par pompe à chaleur qui puisent les calories dans le sol. Mais en été elle peut aussi permettre de rafraîchir les bâtiments.
Dans sa version la plus simple, le principe d’un puits climatique consiste à puiser de l’air à l’extérieur, à le faire circuler dans un conduit enterré où, selon la saison, il se réchauffera ou se refroidira, puis à l’insuffler dans le bâtiment par un ventilateur. Lorsque l’installation est principalement destinée à rafraîchir l’habitation pendant l’été, on l’appelle puits provençal. Si l’objectif est plutôt de préchauffer l’air frais pour ventiler le bâtiment pendant la saison froide elle est dénommée puits canadien. Dans ce cas elle sera souvent accouplée à une pompe à chaleur.
Pour que le système soit efficace et performant, le conduit d’une longueur de 30 à 50 mètres dans lequel l’air circule, devra être enterré à au moins 1,5 mètres de profondeur. Le puits provençal ne pourra donc s’envisager que si le bâtiment est entouré d’un terrain suffisamment vaste. C’est une des exigences qui limitent l’utilisation de cette technique. L’investissement n’est évidemment pas négligeable car il faudra creuser une tranchée profonde. L’idéal est de le prévoir au moment de la construction du bâtiment.
Il ne faut pas nécessairement une longue tranchée linéaire : si vous disposez d’une surface restreinte, vous pouvez faire des zig-zags dans le terrain et même faire des allers-retours avec la canalisation dans la même tranchée comme on le voit sur la photo ci-dessus, en veillant toutefois à espacer les gaines de quelques dizaines de cm pour assurer un bon échange de chaleur avec le sol.
Autre astuce : pour éviter de creuser trop profondément, vous pouvez aussi relever le terrain localement au-dessus de la canalisation par une butte de terre comme on le voit sur la photo ci-dessous. Afin que la butte ne s’affaisse avec le temps, il faudra veiller à y planter de la végétation pour la stabiliser.
En faisant une recherche sur internet avec les mots-clés « puits provençal » ou « puits canadien », vous trouverez plusieurs sites utiles sur les aspects techniques et pratiques de la mise en place d’une telle solution. Vous trouverez aussi des professionnels qui peuvent l’installer, mais un bon bricoleur peut certainement le faire en auto-construction.
Selon le Syndicat des Energies Renouvelables qui demande au gouvernement français d’envisager une incitation fiscale à l’utilisation du géocooling, la technique est à la fois performante et peu énergivore : « Les coefficients de performance atteignent près de 60 kWh de frigorie pour 1 kWh d’électricité consommée ».
Commentaires
Le ratio peut encore être amélioré si l’énergie consommé est issue d'un panneau photovoltaïque installé sur le toit de la maison
Je ne peux que rajouter un "+1" à l'article: j'en ai un chez moi, et même par +40° extérieur (pas besoin d'habiter sous les tropiques pour cela, j'habite "simplement" en Belgique !), l'air pulsé dans la maison est frais. La ventilation aspirant l'air à travers le puits canadien consomme 23W, ce qui est assez peu pour assurer la qualité de l'air tout au long de l'année, et réduire les besoins de chauffage en hiver et se passer de clim en été.
Bonjour.
Même si on a de la place, ne serait-il pas intéressant dans certains cas d'utiliser des forages verticaux ou en pente, pourvu qu'on évite les tranchées ? C'est un peu plus compliqué a priori, mais avec des foreuses spécialement conçues pour cet usage et des conduits aller-retour appropriés, ça me paraît jouable avec peut-être aussi une solution intermédiaire du genre « plat de spaghettis » dans un gros trou ? Qu'en pensez-vous ?
Je crois vraiment que dans les années qui viennent, la climatisation à de l'avenir. Il est donc nécessaire de se presser le citron sur ce sujet.
Francis ROBERT.
Merci beaucoup de cet article. Je pense réellement en installer un quand je remplacerai ma ventilation simple flux pour une double flux avec bypass automatique (vidéo de fonctionnement : https://www.youtube.com/watch?v=S-6Xoy9Ow7I). Ainsi quelque soit la saison et la température extérieur, de l'air à 10 - 12 °C entre dans la ventilation double flux. C'est l'électronique de la VMC ensuite qui détermine si l'air doit passer dans l'échangeur thermique ou pas. En hivers, l'air du puis est réchauffer naturellement par l'échangeur thermique pour récupérer 70 à 80 % des calories de l'air vicier avant qu'il ne soit expulsé à l'extérieur. En été, l'air frais du puis est directement injecté dans les pièces non humides de la maison.
Je dois calculer les coûts et bien choisir le matériel. Si vous connaissez des marque sérieuses, je suis preneur.
Pour ceux qui ont peu de terrain et une maison de plain-pied avec beaucoup de fondations, il semble possible de se servir des tranchées des fondations rendues plus profondes, puis remplies de terre et bien compactées (!). Ou sinon de toute la surface du sous-sol si ensuite rempli de terre.
Ma maison de plain-pied reste avec un carrelage frais malgré la canicule, mais l'hiver du genre frigo. Alors, j'aurais intérêt à faire un puits canadien en mon terrain en pente, remontant l'air chaud du sol vers la maison l'hiver pour alimenter une pompe à chaleur.
Mais, en irrigation à partir de mes descentes d'eau de toiture, j'ai fait l'expérience que les tuyauteries en PVC épais ne résistent pas aux mouvement du sol en une terre glaiseuse, si pas enfoui dans un lit de sable !
Il semble que des gaines spéciales en polyéthylènes existent pour les puits canadiens/provencaux. Il semble préférable d'éviter les gaines en PVC! La FAQ du constructeur suivant donne par exemple plus d'indications avec les normes utilisées:
http://www.eole-fr.com/faq/