Avant le début de la guerre en Ukraine, l’Autriche dépendait déjà largement du gaz russe. Un héritage du passé. Mais cette dépendance vient d’atteindre de nouveaux sommets.
Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, en février 2022, la plupart des pays d’Europe se sont accordés à dire qu’ils devaient d’urgence réduire leur dépendance au gaz russe. L’Autriche comptait alors sur Gazprom pour un impressionnant 80 % de son approvisionnement. L’héritage d’un accord gazier conclu… avec l’Union soviétique dans les années 1960. Après le début de la guerre, le chiffre est, un temps, tombé à moins de 20 %. À la faveur, principalement toutefois, des restrictions de livraison décidées par Gazprom. Mais la ministre autrichienne de l’Énergie, Leonore Gewessler, constate aujourd’hui que la tendance s’est lourdement inversée. Au mois de décembre dernier, l’Autriche a importé de Russie une part record de 98 % de son gaz fossile !
Le chiffre s’explique en partie par le prix de ce gaz. Car pour l’Autriche aussi, d’autres solutions existent. Mais elles demeurent plus coûteuses.
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Et puis le chiffre est quelque peu à relativiser. D’abord, parce que la consommation autrichienne de gaz fossile a diminué. Selon les données du ministère de l’Énergie, elle est passée de 100 TWh à 75 TWh en 2023. Or un contrat court jusqu’en 2040 entre la compagnie autrichienne OMV et Gazprom : le pays s’est engagé sur un volume d’achat de 60 TWh par an. Le tout, pour l’année écoulée, pour une facture qui devrait s’élever à environ 3 milliards d’euros. « Une facture qui finance indirectement une guerre abominable en Ukraine », s’est désolée Leonore Gewessler dans la presse.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que, selon les chiffres de l’Agence internationale de l’énergie, le gaz comptait, en 2022, pour environ 16 % de la production d’électricité en Autriche. Pour comparaison, le gaz fossile occupe une part sensiblement identique dans le mix électrique allemand, mais moins de 10 % en France. Et l’Autriche s’est fixé pour objectif d’atteindre le 100 % renouvelable d’ici à 2030. Déjà, près de 80 % de son électricité est aujourd’hui verte. Grâce à un secteur de l’hydraulique très développé.
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La part du gaz fossile dans le mix énergétique de l’Autriche, quant à elle, frôle les 22 %. Quelque 4 millions de résidences principales comptent ainsi sur lui pour être chauffées. Dans le mix énergétique de l’Allemagne, la part du gaz fossile est de plus de 24 % et dans celui de la France, de moins de 16 %.
Rappelons que l’Union européenne a prévu de se passer totalement du gaz russe d’ici à 2028. Mais pour l’heure, l’Autriche ne s’est pas fixé d’objectif clair à ce sujet. Aujourd’hui, la ministre de l’Énergie espère pouvoir contraindre les entreprises énergétiques nationales à éliminer progressivement le gaz russe. Elle souhaite également mettre fin de manière anticipée au contrat qui lie OMV — qui a annoncé de son côté être pour la poursuite des importations de gaz russe — à Gazprom. Cela pourrait coûter très cher au pays et lui poser quelques défis juridiques et politiques.
Etre dépendant des fossiles ou de l’atome c’est devoir supporter des charges qui augmentent régulièrement sans que ce soit profitable au pays qui supporte cette dépendance. Sortir de la dépendance c’est construire des éoliennes et leurs rajouter du stockage (batteries , hydrogène, STEP, air comprimé, chaleur, on à que l’embarras du choix). Et si ça coûte cher au départ, à la longue on est gagnant car on reste maitre chez soit !
Cet article parle de l’Autriche mais en réalité tous les pays de l’est dépendent fortement de la Russie pour la fourniture de gaz. On peut même dire si on regarde les statistiques que la corrélation est facile à faire: plus un pays est proche de la Russie, plus il dépend de son gaz. Cette dépendance n’est d’ailleurs pas limité au gaz: les réacteurs nucléaires des pays de l’est sont pour la plupart de conception russe, donc dépendent de Rosatom pour leur combustible. Avant que Framatome ou Westinghouse soit en mesure de prendre le relai, ça va durer au moins une… Lire plus »
@Perlybird,
Framatome a passé des contrats récents avec la Bulgarie… Est-ce qu’il faudra une décennie pour les livrer ? pas sur…
Mais vous avez raison, Rosatom joue un rôle très important pour de nombreux pays d’Europe de l’Est et pourrait mettre en difficulté certains sur des pièces clés si celles-ci venaient à se dégrader…
Vous auriez pu rajouter que les Exports de GNL russe ont aussi augmenté vers l’Europe de l’Ouest en 2023… Quid en 2024 ? et dans les années à venir avec la menace de réduction de GNL américain… qui plane (dixit Pouyanné…).
La Bulgarie essaye juste de diversifier ses approvisionnements mais cela ne vaut pas dire qu’elle est maintenant indépendante de la Russie: la construction par Rosatom des derniers réacteurs VVER en Bulgarie continue comme si de rien n’était. Et tiens, vu que cet article parle de la dépendance de l’Autriche au gaz Russe: c’est justement l’Autriche qui s’est plainte au niveau de la justice européenne que le financement de ces centrales hongroises était assuré par un prêt… russe 🙂
Et pour compléter un peu le tableau, la Belgique a reçu pas mal de livraisons de GNL russes en 2023 🙂
Tant que l’Europe aura des consommations de Gaz stratosphériques, se passer de la Russie sera impossible… Est ce que le retour vers des convecteurs électriques à utilisation intermittente serait une partie de la solution chez des gens chauffés au Gaz !? (Perso je pense que Oui… et cela « grillerait » un peu la dépendance au Gaz Russe).
Que les Autrichiens mettent en parallèle des convecteurs électriques quand ils ont du chauffage au Gaz serait une solution pour moins de Gaz Russe et plus de consommation d’ENRi (surtout d’éolien) tout en économisant de l’hydro par moment…
Les pays froids connaissent l’importance de l’inertie thermique surtout dans les batis anciens et des convecteurs électriques (c’est l’option la plus « bon marché » pour les équipements) ou des chauffages à accumulation sont l’avenir pour bien des logements Européens… vu les ENRi installés…