Les projets d’agrivoltaïsme se multiplient en France. La demande croît rapidement pour ces ombrières intelligentes qui apportent une réponse efficace à la pression foncière et aux phénomènes climatiques extrêmes auxquels de plus en plus d’agriculteurs sont confrontés.
Les néologismes pour
désigner cette technique récente ne manquent pas : certains parlent d’agro-photovoltaïque,
d’agrisolaire, d’autres de photovoltaïsation des terres agricoles, de solar
sharing, d’agrinergie, ou tout simplement d’agrivoltaïsme.
Cette pratique consiste à protéger certaines cultures des aléas climatiques à
l’aide de panneaux photovoltaïques orientables placés en hauteur, tout en
permettant aux engins agricoles de se déplacer sous les ombrières solaires.
La technique est adaptée à certaines cultures fruitières et maraîchères, mais particulièrement aux vignes, qui sont les cultures les plus impactées par les changements climatiques. Un orage violent, une chute de grêle ou une canicule peuvent ainsi ravager en quelques minutes des mois de travail et ruiner un agriculteur.
Des avantages multiples et spectaculaires
L’agrivoltaïsme est davantage qu’un win-win. Le procédé permet de concilier la préservation des terres agricoles et la mise à profit de surfaces foncières pour le développement des énergies renouvelables. Son immense atout est en effet de ne plus artificialiser des hectares de terres arables pour installer uniquement des panneaux solaires.
Mais la technique permet également un
accroissement de l’efficacité des panneaux solaires, en même temps qu’une augmentation
de la production agricole. Le rendement combiné des deux activités (culture agricole
et production d’énergie) est supérieur à la somme de l’un et l’autre pris
individuellement.
Grâce à la diminution de l’évapotranspiration, les vignes protégées voient leur
besoin en eau réduit de 12% à 34%. Par ailleurs, la teneur aromatique du raisin
s’en trouve améliorée : +13% d’anthocyanes (pigments rouges) et de 9% à
14% d’acidité en plus.
Néanmoins l’agrivoltaïsme ne s’adapte pas à toutes les plantations. Dans certains cas, la diminution de l’exposition des plantes au soleil et la réduction du contact de la culture avec l’eau de pluie pourraient donner des résultats négatifs. En fonction du climat et de la saison, ces effets peuvent être bénéfiques ou négatifs selon le type de culture. C’est pourquoi le succès de la technique repose sur un équilibre intelligent entre ensoleillement, arrosage, mise à l’ombre et protection contre le froid.
L’intelligence artificielle au service de l’agrivoltaïsme
A Piolenc, la société Sun’Agri confie le pilotage de son installation photovoltaïque à un algorithme développé depuis plus de dix ans. Les panneaux solaires, qui pivotent pour moduler l’ombrage ou glissent pour protéger de la pluie, réduisent ainsi sensiblement les besoins en eau des vignes abritées, et augmentent leur croissance.
L’intelligence artificielle permet de paramétrer sur mesure l’inclinaison des panneaux en fonction des besoins de la plante (en eau ou en soleil), de la nature du sol et des conditions météorologiques. En cas de phénomènes climatiques extrêmes, l’intelligence artificielle jouera un rôle vital en termes de protection de la plante.
La société Ombrea, qui propose un outil de régulation climatique pour les exploitants agricoles, a réussi à lever 1 million d’euros en mars 2019 auprès de Région Sud Investissement pour développer ses innovations, avec à la clé des investissements importants en R&D. Elle a mis au point une solution d’ombrières composées de panneaux mobiles coulissants dont l’ouverture et la fermeture, gérés par un système d’intelligence artificielle, permettent de laisser passer les rayons ou non, selon l’intensité du rayonnement solaire et d’autres variables.
Le potentiel de développement de cette entreprise est considérable. A défaut d’une adaptation de nos techniques agricoles, les rendements des principales cultures de céréales (blé, maïs, colza) pourraient être réduits, en moyenne, de 0,2% par an. Mais pour répondre à l’augmentation de la demande, la production devrait croître de 1,4% par an.
Une solution pour toutes les régions du monde
Aucun pays ne sera épargné par les phénomènes climatiques extrêmes, dont la fréquence risque d’augmenter. C’est pourquoi le besoin est grand de développer dès aujourd’hui des solutions qui apportent une réponse efficace à la problématique du changement climatique.
Car les épisodes
climatiques exceptionnels ont des effets dévastateurs pour certains
agriculteurs : en Suède, suite à la sécheresse historique de l’été
dernier, des exploitants ont vu leurs rendements baisser de 70%. Le secteur
agricole suédois a subi une perte nette de 970 millions d’euros.
En Californie, la sécheresse de 2015 a entraîné des pertes estimées à 1,8
milliard de dollars pour l’agriculture locale.
Labellisation attendue
En tant qu’institution publique, l’INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’alimentation et l’Environnement) assure le suivi scientifique de l’évolution de parcelles témoin (sans installation solaire) et de parcelles équipées d’un système agrivoltaïque. L’objectif de cette comparaison est de labelliser le dispositif dès que le gain environnemental sur les parcelles équipées sera bien prouvé.
L’objectif est double : d’une part éviter les abus, car certains exploitants pourraient être tentés de couvrir leurs champs de panneaux solaires pour d’accroître leurs revenus au détriment des productions agricoles. Et d’autre part permettre aussi au dispositif de s’exporter sur le marché international. De grands producteurs agricoles comme l’Australie, la Californie ou l’Afrique subsaharienne seront très certainement preneurs de cette technologie innovante.
Le manque de place pour les panneaux solaires y trouve une solution…, mais rien ne vaut des rangées d’arbres pour faire suffisamment d’humidité locale et éviter les sécheresses !
N’oublions pas que des bordures océaniques aux intérieurs des continents (trop secs), il faut des plantations d’arbres suffisantes pour renouveler les nuages (ce que feraient les vents d’Est en Amazonie plus de six fois, avant que ces nuages n’aillent butter sur la cordillère des Andes)…
L’équilibre dit obtenu en tous points sur cette planète n’est pas un choix !
https://greenjillaroo.wordpress.com