La surprenante conclusion du rapport sur la souveraineté énergétique


La surprenante conclusion du rapport sur la souveraineté énergétique

Une ligne électrique de 400 kV en France / Image : JPC24M - Flickr, illustration : RE.

Le 6 avril 2023 a été présenté le rapport d’une enquête parlementaire sur « les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France ». Cette commission, présidée par le député Raphaël Schellenberger (LR), met en lumière les nombreuses errances politiques des 30 dernières années en matière d’énergie, mais semble se perdre dans des conclusions plus politiques que scientifiques.

Pendant près de 6 mois, la commission d’enquête présidée par le député Raphaël Schellenberger (LR) et rapportée par le député Antoine Armand (Renaissance) a auditionné experts, dirigeants d’entreprises, scientifiques, mais également anciens ministres ainsi que Nicolas Sarkozy et François Hollande. Objectif de cette commission : déterminer comment la France a pu se retrouver au bord du blackout pendant l’hiver 2022, mais aussi trouver des solutions pour permettre une amélioration pérenne de cette situation.

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Après 150 heures d’auditions, ce rapport fleuve de près de 500 pages désigne 6 erreurs stratégiques majeures, et formule 30 propositions pour permettre à la France de retrouver sa souveraineté énergétique.

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30 ans de politique énergétique hasardeuse

Antoine Armand, rapporteur de cette commission, ne mâche pas ses mots. Selon le député Renaissance, « c’est l’histoire du lien souvent défaillant, parfois même inexistant, entre expertise scientifique et technique, instruction des dossiers et décision politique ». À ce titre, plusieurs grandes décisions sont évoquées dans ce rapport, comme la réduction à 50 % du nucléaire dans le mix électrique. Cette promesse de campagne de François Hollande, entérinée par la loi « de transition énergétique pour la croissance verte » de 2015, prévoyait ainsi le plafonnement de la production nucléaire française à 63,2 GW.

Ce chiffre, choisi sans fondement scientifique ou économique, aura conduit à la fermeture de la plus ancienne centrale française : Fessenheim. Celle-ci avait pourtant fait l’objet d’une « appréciation globalement positive de l’ASN (Autorité de Sûreté du Nucléaire) ». Cette dernière évoquait même la possibilité de prolonger de 10 ans la durée de vie de la centrale sous réserve de la réalisation d’opérations de maintenance.

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Le rapport d’enquête fait également mention de deux décisions qui auront affecté de manière durable la continuité de la recherche nucléaire en France, à savoir l’arrêt du réacteur prototype Superphénix en 1997, puis du projet Astrid en 2019. Ces deux projets basés sur une technologie de réacteurs à neutrons rapides (RNR) avaient la particularité de pouvoir grandement limiter la quantité de déchets radioactifs en utilisant des combustibles usés, issus du parc nucléaire français actuel.

Trente propositions pour améliorer la souveraineté énergétique française

Face à ce constat, le rapporteur de la commission d’enquête évoque une direction à tenir qui peut se résumer ainsi : « baisse de la consommation, relance du nucléaire et développement des énergies renouvelables. C’est indispensable au vu du mur énergétique qui nous attend ». Plus question, donc, d’opposer énergies renouvelables et énergie nucléaire, mais plutôt de trouver des moyens pour les associer de manière durable. Afin de répondre à cet objectif, trente propositions ont été formulées. En premier lieu, la commission demande l’identification claire des besoins électriques de la France à court, moyen et surtout long terme pour établir une stratégie cohérente.

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On compte également parmi ces mesures l’amélioration des dispositifs de rénovation énergétique, et le développement massif des réseaux de chaleur. Dans le domaine des énergies renouvelables, le rapport préconise le maintien de l’industrie hydroélectrique française dans le domaine public ainsi que le développement de 50 parcs éoliens offshores. Malgré cette évocation des énergies renouvelables, les propositions se focalisent principalement sur le redressement de la filière nucléaire française.

Pour le rapporteur et le président de la commission d’enquête, il est également essentiel que des changements s’opèrent à l’échelle européenne, notamment pour « arrêter une position européenne commune et durable, pour définir l’énergie nucléaire comme une énergie décarbonée et stratégique, qu’il convient de soutenir au même titre que les énergies renouvelables ».

Un rapport victime de ce qu’il dénonce ?

Cependant, si le travail d’audition de la commission d’enquête a été salué de manière quasi unanime, il en va autrement des propositions et des conclusions qui en ont été tirées par les députés Raphaël Schellenberger (LR) et Antoine Armand (Renaissance).

En se focalisant notamment sur l’énergie électrique et en particulier sur le nucléaire, les propositions rédigées sont elles-mêmes teintées du biais dénoncé par le rapport : elles donnent au nucléaire une place prépondérante, alors que celui-ci ne représente que 17 % de notre mix d’énergie finale. Symbole de ce manque de diversité : alors que le terme « éolien » apparaît à 91 reprises dans le rapport, le terme « nucléaire » est, lui, utilisé 1314 fois.

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Certes, l’une des mesures proposées consiste à demander à RTE une analyse globale visant à définir le potentiel de chaque technologie. Mais dans le même temps, Andreas Rudinger, coordinateur sur la transition énergétique en France à l’IDDRI (Institut du Développement Durable et des Relations Internationales) souligne que le choix a déjà été fait, résumant la stratégie de développement des énergies renouvelables à la seule augmentation du parc éolien offshore.

Aucune piste pour sortir des énergies fossiles

Enfin, mis à part le développement des réseaux de chaleur, les sources d’énergies autres que l’électricité sont très peu mentionnées. Si les propositions formulées pourraient permettre de retrouver une forme de souveraineté électrique, quid de notre dépendance aux énergies fossiles comme le pétrole (42 % de notre mix d’énergie finale) et le gaz (20 %) ?

Du côté du gouvernement, le rapport semble avoir été entendu. Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, a ainsi indiqué que « les propositions de ce rapport seront étudiées de manière détaillée dans les prochains jours » et que « des travaux seront organisés dès la semaine prochaine pour en tenir compte ». Le rapport est accessible dans son entièreté sur le site de l’Assemblée nationale, et l’ensemble des auditions sont visionnables sur la chaîne Youtube LCP.

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