Ils cherchaient du gaz de charbon dans un puits du bassin minier lorrain, ils ont trouvé de l’hydrogène naturel. Et c’est une surprise de taille : le gisement pourrait représenter le plus gros potentiel d’hydrogène naturel en France voire en Europe !
Le 15 mai 2023, la Française de l’Énergie (FDE) annonce la découverte d’un potentiel gisement d’hydrogène naturel dans le puits de Folschviller, une commune proche de la frontière franco-allemande, à mi-chemin de Metz et de Sarrebruck. L’hydrogène naturel, aussi appelé « hydrogène natif » ou « hydrogène blanc », est un type d’hydrogène apparaissant naturellement dans le sous-sol de la Terre, neutre en carbone, et qu’il serait possible d’exploiter dans le cadre de la transition énergétique.
En l’occurrence, l’hydrogène détecté serait dissous dans les fluides de formations géologiques du bassin minier de la Lorraine, formations qui datent du Carbonifère – une période géologique ayant eu cours entre 360 et 200 millions d’années dans notre passé. Et ce fut une découverte fortuite à laquelle ses découvreurs ne s’attendaient pas !
La découverte a été réalisée à l’aide de la sonde SysMOG, brevetée par l’entreprise suisse Solexperts, dont la caractéristique principale est d’être en capacité d’analyser les gaz dans des aquifères situés à grande profondeur. Ainsi, les mesures ont révélé 1% d’hydrogène à 600 m de profondeur, 6% à 800 mètres et 15% à 1100 mètres.
Comme l’indiquent Philippe de Donato et Jacques Pironon, Directeurs de recherche au Laboratoire GeoRessources (Université de Lorraine / CNRS) et co-inventeurs de la sonde, la concentration pourrait atteindre 98% à 3000 m de profondeur. D’après les deux scientifiques, ce gisement pourrait représenter le plus gros potentiel d’hydrogène naturel découvert à ce jour en France et en Europe.
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Cette exploration a été réalisée dans le cadre du projet de recherche Regalor, mené par en collaboration par FDE et le laboratoire GeoRessources de l’Université de Lorraine et du CNRS. Notons que ce projet, soutenu par la région Grand Est et l’Union Européenne, avait pour objectif initial l’évaluation de l’exploitation du gaz de charbon présent dans des mines déjà creusées.
Ce projet devait s’arrêter en 2023, mais, du fait de la découverte, il sera prolongé, et prendra en 2024 une orientation vers l’exploration et l’exploitation de l’hydrogène naturel. Cet effort sera mené par un consortium regroupant le laboratoire GeoRessources, Solexperts et FDE et aura pour objectif d’améliorer les connaissances concernant la formation et le transfert de l’hydrogène dans les sous-sols de la Lorraine. Le projet permettra d’établir d’ici deux ans une cartographie complète de l’hydrogène naturel sur ce territoire, avec pour finalité d’identifier un site pilote afin d’initier la production industrielle dans la région.
FDE a ainsi déposé une demande de permis exclusif de recherche appelé « Permis des Trois Évêchés », couvrant une superficie de 2254 km2 sur les départements de la Moselle et de la Meurthe-et-Moselle.
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Le permis est porté dans le cadre plus général de la stratégie hydrogène de la « Grande Région », cet ensemble de territoires situés au cœur de l’Europe et qui regroupe les Länder de Sarre et de Rhénanie-Palatinat en Allemagne, la Région Lorraine en France, la Région wallonne, les communautés française et allemande en Belgique et le Grand-Duché de Luxembourg.
Notons également que l’hydrogène naturel produit par l’exploitation éventuelle du gisement pourrait en outre être transporté par MosaHYc, une canalisation transfrontalière portée par GRTgaz et CREOS, dédiée au transport de l’hydrogène, et prochainement mis en service.
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La découverte d’un fort potentiel d’hydrogène naturel dans le puits de Folschviller s’inscrit tout naturellement au sein de stratégies de développement de production locale d’énergie écologiquement et économiquement compétitives. De plus, cet hydrogène pourrait être généré en permanence par le sous-sol. Ce serait donc une source d’énergie renouvelable.
La prospection de l’hydrogène reste toutefois une science neuve, dont les bases théoriques ne sont encore qu’en construction ; il convient donc de rester prudent sur le potentiel réel de cette source d’énergie. En particulier, le consortium ne s’est pas encore prononcé de manière quantitative sur le potentiel du gisement. Rendez-vous donc dans deux ans pour les résultats du projet Regalor !
Comme indiqué lors des précédents exposés participatifs SEPRA81 ( depuis 7 ans ; ils seront poursuivis à l’automne prochain) , on pouvait s’attendre qu’il en soit pour l’hydrogène comme cela a été le cas pour le pétrole ( cf. le « colonel » Drake). On peut ajouter que, d’ores et déjà, l’hydrogène est un vecteur énergétique remplaçant avantageusement bien d’autres, notamment l’électricité .
La Lorraine a fournit de l’énergie à la France du temps des houillères. Ce serait une belle revanche qu’elle permette de fournir de l’hydrogène blanc nécessaire d’abord pour remplacer l’hydrogène gris.