Illustration : NASA, modifiée par RE.
Avec 89 térawattheures (TWh) d’électricité exportés vers nos voisins européens, la France bat son record annuel d’exportation, vieux de plus de vingt ans. Si l’électricité vendue sur le marché européen rapporte de l’argent, elle cache un problème structurel de baisse de la consommation intérieure d’électricité.
En 2024, la France a établi un nouveau record historique en exportant un solde net de 89 térawattheures (TWh) d’électricité vers ses voisins européens, dépassant largement le précédent record de 77 TWh atteint en 2002. Ce succès illustre à la fois la reprise de la production française d’électricité et les défis persistants de la consommation intérieure actuellement en berne.
Cette performance repose d’abord sur une forte augmentation de la production nationale, estimée à environ 500 TWh. Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE en charge de la stratégie et de la prospective, s’en félicite : « C’est la confirmation du rétablissement du niveau de production d’électricité en France. » La production nucléaire, qui avait souffert des crises de corrosion sous contrainte, s’est redressée spectaculairement en 2024. À cela s’ajoutent une production hydraulique exceptionnelle et la montée en puissance des énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire.
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Les principaux bénéficiaires de ces exportations ont été l’Allemagne (27,2 TWh), l’Italie (22,3 TWh), le Royaume-Uni (21 TWh) et la Suisse (16,7 TWh). L’Espagne, bien que dotée de ressources renouvelables abondantes, a également reçu 2,8 TWh. « Nos bilans prévisionnels montraient depuis longtemps que la France se trouverait, au milieu des années 2020, en situation d’exporter une centaine de TWh par an : on y est », souligne Thomas Veyrenc.
Ces échanges représentent non seulement des gains économiques importants pour la France, mais aussi une contribution significative à la réduction des émissions de CO₂ en Europe. « Aux niveaux de prix de marché actuels, ces exportations rapportent à la France des milliards d’euros et évitent à l’Europe des dizaines de millions de tonnes de CO₂ », détaille-t-il.
Une consommation intérieure stagnante
Ce tableau flatteur masque cependant une réalité plus nuancée. Si la consommation d’électricité en France s’est stabilisée en 2024, elle reste inférieure de 6 % à la moyenne des années 2014-2019. « Les transferts d’usage des fossiles vers l’électricité ne sont pas enclenchés au niveau requis pour décarboner en profondeur », regrette Thomas Veyrenc. Ce retard s’explique en partie par une activité industrielle ralentie et par un coup d’arrêt dans les ventes de véhicules électriques.
L’exportation d’une électricité bas-carbone reste néanmoins un atout stratégique. Elle contribue à redresser une balance commerciale encore alourdie par les importations d’énergies fossiles et renforce la compétitivité de la France sur les marchés européens. « La France dispose d’une électricité bas-carbone abondante. Elle peut être utilisée pour décarboner les transports, le bâtiment ou l’industrie en France, et/ou pour réduire l’utilisation du charbon et du gaz dans la production d’électricité en Europe », conclut Thomas Veyrenc.