Le gestionnaire du réseau haute-tension a publié son bilan réactualisé sur les perspectives de l’automne-hiver 2022-2023. S’il se montre globalement rassurant sur l’approvisionnement électrique de la France, il exprime quelques inquiétudes sur la disponibilité des centrales nucléaires et reste vigilant sur le gaz et l’hydroélectricité.
Jusqu’à la fin de la saison froide, RTE publiera chaque mois une réactualisation de ses prévisions sur le réseau électrique national pour l’automne et l’hiver 2023-2023. Une période potentiellement risquée pour le gestionnaire du réseau, qui doit composer avec un parc nucléaire largement affecté par les opérations de maintenance et conflits sociaux, un parc hydroélectrique affaibli par la sécheresse et un contexte tendu sur le gaz.
Toutefois, dans son premier bilan réactualisé dévoilé le 18 octobre, RTE se montre rassurant. Il note une consommation d’électricité structurelle corrigée des aléas météorologiques « désormais clairement orientée à la baisse ». Sur le mois de septembre, la diminution est de l’ordre de 3 à 4 % par rapport à la tendance. Mais attention, il ne s’agirait pas des premiers effets liés aux appels à la sobriété des particuliers.
À lire aussi Pour éviter le blackout électrique cet hiver, il faudra lever le pied pendant les pics selon RTELes appels à la sobriété n’auraient pour l’instant aucun effet
« Il est encore trop tôt pour percevoir l’effet des propositions présentées le 6 octobre [lors du plan de sobriété, dévoilé par le gouvernement, NDLR] » assure RTE. La baisse serait pour l’instant due au « ralentissement économique observé en Europe et spécifiquement par la hausse spectaculaire des prix de l’énergie, qui ont conduit certaines usines à arrêter ou modérer leur activité ». Les grands sites industriels raccordés au réseau auraient ainsi réduit leur consommation de 8 à 9 % explique RTE.
Selon le gestionnaire du réseau haute-tension national, le risque pour la sécurité d’approvisionnement est « très faible » jusqu’à la fin du mois d’octobre et sera « modéré » début novembre, la survenue de vagues de froid précoces et sévères étant jugé « peu probable ».
À lire aussi Comment contribuer à la sobriété énergétique à son niveau ?L’inquiétude des mouvements sociaux dans le nucléaire
Il relève toutefois une « incertitude principale » concernant la « disponibilité des réacteurs actuellement affectés par des mouvements sociaux ». En effet, « les mouvements sociaux sur le parc nucléaire ont conduit à des prolongations d’arrêt généralement de deux à trois semaines sur les réacteurs dont la remise en service était imminente ou proche » précise RTE.
Le risque serait désormais majoritairement lié aux grèves, la remise en service des réacteurs touchés par le phénomène de corrosion sous contrainte étant « en grande partie ‘dérisquée’ sur le plan technique et industriel » d’après le pilote du réseau. Le parc nucléaire pourrait ainsi afficher « une disponibilité de 45 GW au cœur de l’hiver » affirme-t-il, sans préciser si ce niveau sera suffisant.
À lire aussi La grève dans les centrales nucléaires va-t-elle nous priver d’électricité cet hiver ?Mobiliser jusqu’à 55 GW de puissance non nucléaire
La puissance nucléaire installée en France s’élève en effet à 61,4 GW. Cela correspond à la puissance maximale de la totalité des réacteurs du pays, à mettre en perspective avec les 80 à 100 GW nécessaires pour satisfaire la consommation nationale lors des pics durant une vague de froid.
Dans un tel contexte, il sera donc nécessaire de mobiliser 35 à 55 GW de puissance via d’autres filières et les imports. Notons qu’avec 19,1 GW installés, l’éolien contribuerait significativement à la sécurisation de l’approvisionnement électrique si le vent se montre généreux au bon moment.
À lire aussi Une baisse généralisée des vents en Europe menace-t-elle vraiment l’éolien ?L’hydroélectricité se remet lentement de la sécheresse
Concernant les autres moyens de production, RTE dresse un état des lieux plutôt positif. « Les stocks hydrauliques retrouvent des niveaux de remplissage connus […] Malgré le niveau toujours bas des stocks, la plupart des barrages français devraient globalement être en mesure de produire cet hiver lors des pointes de consommation (mais moins en dehors) » veut-il rassurer.
Par ailleurs, l’approvisionnement des centrales à gaz, dont la puissance installée s’élève à 12,7 GW, serait assuré « au cours des prochaines semaines ». Les stocks de méthane en France et en Europe atteignent « désormais des niveaux très élevés » d’après RTE. Dans l’hexagone, le taux de remplissage affichait 98 % le 14 octobre.
À lire aussi Pourquoi la production hydroélectrique française est en chute libre ?Incertitudes sur l’approvisionnement en gaz en fin d’hiver
Le gestionnaire du réseau nous apprend toutefois que « même avec des stockages remplis en début d’hiver, l’Europe doit importer en continu durant les mois d’hiver pour garantir son approvisionnement ».
S’il n’y aurait aucune inquiétude sur la première partie de la saison, l’approvisionnement en gaz sur les mois de février et mars 2023 pourrait être plus compliqué. L’unique levier pour compenser cet éventuel déficit serait « l’atteinte des objectifs de sobriété
affichés par les pouvoirs publics » explique RTE à partir des analyses de GRTgaz.