À peine attribué, le projet éolien flottant Bretagne Sud se dessine déjà comme une exception européenne. Du fait de la relative immaturité de la technologie, l’appel d’offres comporterait de nombreux défauts. En conséquence, le prix de l’électricité produite ne refléterait pas les coûts réels. Ces premiers tâtonnements devraient néanmoins aboutir à de futurs appels d’offres plus pertinents pour la filière de l’éolien flottant en Europe.

Récemment attribué, le projet éolien flottant Bretagne Sud, issu de l’appel d’offres AO5, ne doit pas être considéré comme le nouveau standard de l’éolien flottant en Europe. C’est, en substance, ce qu’a déclaré l’association WindEurope dans une récente tribune sur le sujet. Selon l’association, l’appel d’offre comporte des imperfections qui viennent fausser le résultat obtenu, tant sur le prix au mégawattheure (MWh) que sur le choix technologique. Malgré ces imperfections, ce premier appel d’offres européen d’envergure, pour une technologie en plein développement, devrait constituer une base solide pour des appels d’offres de plus en plus pertinents.

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Il est encore trop tôt pour connaître le prix réel de l’éolien flottant en Europe

D’abord, selon WindEurope, le projet issu de l’appel d’offre AO5 bénéficie de conditions particulièrement avantageuses, tant en termes de profondeur de fonds que de vitesses de vent. Ces conditions ont permis à Baywa.r.e et Elicio de rendre une offre au tarif particulièrement agressif. Une particularité des appels d’offre français qui agit également en trompe-l’œil vis-à-vis du tarif au MWh. La France a, en effet, exclu de l’appel d’offre les opérations de raccordement du parc, réalisées et financées par RTE, ce qui n’est pas toujours le cas en Europe, entraînant une importante différence de prix au MWh.

En réalité, toujours selon WindEurope, il est encore trop tôt pour connaître le prix réel moyen de l’éolien flottant offshore en Europe. Il n’y a pas eu suffisamment de projets réalisés pour avoir le recul nécessaire sur la question. Ainsi, si un pays européen choisissait d’aligner son prix plafond à l’offre réalisée par Baywa.r.e et Elicio, il pourrait se retrouver sans aucune réponse à l’issue de l’appel d’offres. C’est notamment ce qu’il s’est passé en 2023, concernant le Round 5 des projets éoliens offshore au Royaume-Uni. Le gouvernement avait fixé un prix du MWh maximum trop bas pour de l’éolien offshore posé (52,20 €/MWh), entraînant une absence totale de candidats.

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La France doit changer les critères de ses appels d’offre

Si le projet Bretagne Sud va participer au développement de la filière de l’éolien flottant en Europe, l’appel d’offre a tout de même montré des limites qu’il faudrait corriger pour les prochains appels d’offres. L’un des problèmes repose sur le fait que certains des critères hors prix n’ont pas permis de différencier les différents candidats, ces derniers ayant tous eu la note maximale. C’est le cas des critères de développement social et territorial. Cet aspect a pour conséquence d’augmenter l’importance du critère de prix, qui représentait déjà 75 % de la note finale.

WindEurope indique ainsi que ces critères autres que le prix n’étaient pas optimaux. D’abord, celui de la robustesse financière, qui désigne la capacité d’une entreprise à avoir les ressources pour livrer le parc, devrait prendre une plus grande importance. Ce critère ne représentait que 5 % de la note pour le parc Bretagne Sud. Autre problème de taille : l’appel d’offres du projet Bretagne Sud encouragerait les développeurs à prévoir le moins de turbines possible, engendrant le recours à des turbines de 20 MW ou plus, des modèles qui ne sont pas encore disponibles sur le marché. Cette stratégie aurait des limites, puisqu’elle inciterait les candidats à privilégier des fabricants non-européens, et augmenterait les risques du projet.