Et voilà la double éolienne Sairui, construite et bientôt mise en service par le groupe chinois Huaneng. Sur un mat unique, deux rotors de trois pales, l’un en avant du mat et de la nacelle, l’autre en arrière. D’une puissance de 2,7 MW, ce n’est pas une maquette, un modèle réduit, plutôt un prototype, mais déjà d’une taille respectable. Mais quelle drôle d’idée ! Chacun sait pourtant qu’en aval d’une éolienne, le vent est affaibli. Il a perdu l’énergie qu’il a communiqué à l’éolienne. Normalement, si l’on veut placer une autre éolienne en aval par rapport aux vents dominants, on l’éloigne de cinq fois le diamètre des rotors…
Prudence ! Tous les deux ou trois mois, un nouveau concept d’éolienne est proposé, dont on nous annonce qu’il va bientôt détrôner le modèle dominant, pour ne pas dire unique, de l’éolienne tripale (rien à voir avec l’andouillette : elle a trois pales) « upwind », c’est-à-dire faisant face au vent, au-devant du mât qui la soutient. Ce modèle standard n’est pas né du hasard, mais d’un processus tout à fait darwinien de « descendance avec modifications », où les mauvaises idées sont rapidement écartées.
L’éolienne sans pale ? Il lui manque le principal(e). Une seule pale ? La machine est déséquilibrée. Deux pales seulement ? Dans les zones cycloniques, où on les couche au sol à l’occasion, elles ont leurs avantages. Quatre pales et plus ? Elles démarrent mieux par vents faibles, mais elles sont plus lourdes et plus chères, offrent trop de prise au vent, et les pales se gênent mutuellement, ce qui limite vitesse de rotation et puissance. Les éoliennes « Downwind », derrière le mat ? Justement, le mat, ça coupe un peu le vent et créé des turbulences…
Les éoliennes à axe vertical, de type « Darrieus » ? À terre, où la vitesse du vent augmente rapidement avec l’altitude, la partie inférieure ne sert pas à grand-chose malgré son coût, ces éoliennes ne démarrent pas toutes seules… Elles ont peut-être un avenir en mer, on verra. En mer également, on teste des éoliennes doubles, mais côte à côte, avec un mat qui se dédouble en Y pour supporter deux rotors avec une seule base flottante.
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Alors, l’éolienne double « coaxiale », une hélice devant, une derrière, à quoi ça rime ? Bien sûr, l’éolienne arrière est moins productive que celle de devant. Malgré tout, le concept pourrait avoir des avantages. D’abord, celui de dépasser certaines limites, malgré tout, du modèle dominant. La longueur des pales, d’abord, qui, à terre, pose des problèmes de logistique, en attendant qu’une nouvelle génération de dirigeables voit le jour. La vitesse linéaire à leur extrémité devient problématique : on évite en général de dépasser… par loin de 300 km/h en bout de pales. La nacelle est équipée d’une génératrice dont le stator n’est pas statique, mais tourne en sens inverse du rotor, augmentant la puissance malgré des vitesses absolues plus faibles, et des engrenages multiplicateurs moins nombreux.
Avec le double rotor, à puissance totale égale, la longueur des pales serait diminuée de près de moitié, affirme Huaneng. On en doute fort : si les pales sont deux fois plus courtes, la surface balayée par chaque rotor est quatre fois plus faible, donc au total pour cette éolienne double, elle est deux fois plus faible. Il peut y avoir des améliorations d’efficacité dans la nacelle grâce au générateur « contrarotatif », mais elles ne compensent probablement pas les plus faibles vents utilisés par l’hélice « arrière ». En revanche, avec des pales plus courtes, les éoliennes pourraient être plus proches les unes des autres, permettant ainsi d’augmenter la production par unité de surface au sol.
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Ce concept avait déjà été élaboré il y a une quinzaine d’années par la start-up suisse Eotheme, et on peut trouver trace de brevets plus anciens encore sur des concepts proches. La start-up norvégienne World Wide Wind travaille, elle, sur un concept d’éolienne double à axe vertical, peut-être plus astucieux : aucun rotor ne coupe le vent à l’autre, et on garde le bénéfice d’un stator « contrarotatif ». L’éolienne double de Huaneng est bien, elle, à axe horizontal, comme la totalité des éoliennes commerciales aujourd’hui en service, et elle est bien, à notre connaissance, la première éolienne multi-mégawatts du genre. Un prototype sans lendemain, ou une tête de Sairui, pardon, de série ? L’avenir nous le dira.
Cédric Philibert est l’auteur de Éoliennes, pourquoi tant de haine ?, Les Petits Matins/Institut Veblen
Il faudrait un nombre de pales infini pour obtenir un coefficient de glissement de 1, c.a.d. utiliser toute l’énergie théorique du vent. L’efficacité avec 3 pales est faible, le fait d’en ajouter 3 augmente ce coefficient, d’où la possibilité de réduire la longueur des pales en conservant la même énergie.
Durant la guerre 39-45, les allemands n’avaient pas de gros moteurs pour leurs avions…
Ils ont mis un moteur devant et un derrière avec un certain succès.
Les hélicoptères à double rotor sont aussi très intéressant.
Vous ne parlez pas d’équilibre de la nacelle avec deux systèmes en opposition.
Avec le couplage, on perd combien d’efficacité par rapport à deux éoliennes ? On gagne alors combien de mats (béton, raccordement…)
Quelle est l’incidence sur le bruit ? Il pourrait être plus faible…
Vous parlez de développement darwinien pour les éoliennes actuelles, laissons ce développement aux doubles rotors …
Les gammes de vitesse ne sont pas les mêmes que pour un hélico une hélice contra où l’on peut alors forcer l’écoulement entre les 2 etages. En outre, vous évoquez l’avion allemand push-pull Do335 qui a eu… de nombreux pbs mécaniques et de mise au point avec cette configuration (ce n’est pas le seul). Bref, on ne peut pas appliquer cette configuration à l’éolien où le rotor aval travaille dans une configuration avec vent plus faible et perturbé et en plus le masque de la tour. Le coût d’un deuxième rotor + génératrice ou renvoi mécanique n’est pas compensé par… Lire plus »