Franck Edmond exploite une turbine hydroélectrique de 15 kW dans le moulin familial de Tanayssou, en Aveyron. La métamorphose du vieux moulin à farine ne s’est pas faite sans difficulté. C’est une histoire de famille que Franck essaye de perpétuer pour continuer une transition alliant modernité et conservation du patrimoine familial.
Niché dans un écrin de verdure, au bord de la rivière Aveyron, le site frappe par sa beauté. Les grosses pierres et le toit en lauzes ont conservé au moulin le charme intact des vieilles bâtisses aveyronnaises.
En 2002, son propriétaire, le père de Frank Edmond, décide d’équiper le vieux moulin familial d’une turbine hydroélectrique dans le but de produire de l’énergie verte pour alimenter le chauffe-eau. En 2009, Frank Edmond et son père impulsent la modernisation de l’installation pour couvrir cette fois tous les besoins énergétiques de la maison. L’excédent d’électricité produite est injectée dans le réseau.
« Le moulin de Tanayssou servait autrefois à produire de la farine et de l’huile de noix » nous confie notre interlocuteur. « Il date du 19ième siècle et a subi un agrandissement fin 19ième. Ce moulin familial a été construit par mon arrière-arrière-grand-père qui développa l’activité avec son fils. La bâtisse est rattachée à un fondé en titre[1] et bénéficie donc d’un droit d’eau[2] inaliénable. Mais il est soumis à la réglementation de continuité écologique[3] pour la dévalaison[4]. Si on veut augmenter son potentiel, il faut répondre à des aménagements de prise d’eau ichtyocompatible ». L’ichtyocompatibilité peut se définir comme une réduction très significative de l’ensemble des dommages et des perturbations induites par la turbine sur les poissons. Une prise d’eau ichtyocompatible doit permettre d’arrêter les poissons et les empêcher ainsi de passer par les turbines, de les guider vers un système de transfert (exutoire), et de les acheminer à l’aval de l’aménagement sans dommage.
Un déclic à l’université
Frank Edmond s’est intéressé à l’énergie hydroélectrique lorsqu’il était étudiant et qu’il suivait une formation d’ingénieur avec une spécialisation en Génie Mécanique. Suite à l’option énergétique qu’il a choisie, il a pris conscience du potentiel de l’énergie produite au fil de l’eau.
Après une première transformation du vieux moulin à farine qui a permis de l’équiper d’une turbine hydroélectrique avec un alternateur, le projet de modernisation s’est réalisé en famille pour accroître l’autonomie et l’exploitation de l’installation. « Mon père a joué un rôle moteur dans cette rénovation. En tant qu’électricien, il s’est naturellement intéressé au projet en vue de produire sa propre énergie. Pour ma part, sensible aux énergies renouvelables, j’ai contribué à sa réalisation en installant dans notre moulin une turbine d’occasion type « Francis ».
Quelques données techniques
La turbine Francis a une puissance nominale de 15 kW. Bien qu’elle ne soit pas activée toute l’année, elle produit globalement 30.000 kWh avec une puissance régulée de 12 kW, ce qui permet de couvrir largement les besoins de la propriété, malgré la présence d’une piscine chauffée. Si elle fonctionnait en permanence elle pourrait produire 80.000 kWh à sa puissance maximale de 15 kW.
La famille Edmond ne regrette pas d’avoir réalisé cet investissement : « le fait de pouvoir amortir et rémunérer une part des charges liées à l‘entretien du lieu et de produire du courant propre, même lorsqu’on n’est pas présent, apporte une grande satisfaction ».
Un projet plein d’avenir…
Frank Edmond ne compte pas en rester là. Il espère développer la production hydroélectrique à Tanayssou en portant la puissance du moulin à 100 kW. Les premières démarches administratives pour adapter la capacité de production ont été lancées. Si le permis est délivré, le productible devrait atteindre 450.000 kWh par an, tout en assurant une intégration optimale et une harmonie réussie entre les nouveaux équipements et les exigences environnementales.
Et vous, que pensez-vous de la métamorphose de cet ancien moulin à farine? N’hésitez pas à nous communiquer votre avis dans les commentaires ci-dessous …
[1] Les droits fondés en titre concernent les ouvrages dont l’existence est avérée avant le 4 août 1789, c’est-à-dire avant l’abolition de la féodalité. … Un droit fondé en titre est caractérisé par : son existence légale, et sa consistance légale.
[2] Tout bâtiment utilisant la force hydraulique implique pour son aménagement, d’importants travaux de détournement des eaux. En raison de l’intervention exercée sur le régime d’un cours d’eau, son installation et son fonctionnement reposent sur l’existence d’un droit pour exploiter la force motrice de l’eau appelé communément «droit d’eau».
[3] La continuité écologique se définit par la libre circulation des espèces, une hydrologie proche des conditions naturelles et le bon déroulement du transport naturel des sédiments.
[4] Dévalaison : action pour un poisson migrateur de descendre un cours d’eau pour retourner dans son lieu de reproduction ou de développement
Et les vis inclinées en toutes nos écluses nombreuses sur nos CANAUX, comme installées en région Alsace sur certaines rivières ? Là-bas, avec un débit moyen constant, la continuité de spires fait continuité piscicole et fournit 40 kWh si mon souvenir est le bon ! Ce qui de part et d’autres de ces nombreuses ÉCLUSES, ferait débit de trop-plein enfin utile, à débit constant en fournissant 80 kWh, de quoi alimenter 20 à 40 maisons…, une paille ! L’énergie répartie renouvelable c’est possible, même avec une succession importante de terrasses à talus arborés retenant l’eau et évitant les forêts sèches… Lire plus »
Bonjour,
On ne peux qu’être d’accord, mais pour le moment, la mode c’est plutôt de détruire les chaussées des vieux moulins:
Selon nos brillants experts des agences de l’eau, ces retenues ( en place depuis des siècles pour la plupart qui ne généaient pas specialement le poisson jusque aux années 2000) sont maintenant devenues extremement néfastes et doivent disparaitre. Leur démolition est même subventionnée…
Bonjour, ces divers projets montrent combien ces installations sont efficaces! J’ai traduit il y a quelques années un dossier de demande de renouvellement de droit d’eau émanant d’un jeune Alsacien voulant exploiter une installation mise en place par son arrière-grand-père alors que l’Alsace était encore allemande. La traduction fut ardue, car beaucoup de documents étaient rédigés en gothique (manuel) avec toutes les caractéristiques techniques, passionnant! Nous avons pu visiter l’installation, 2 turbines fonctionnant avec un léger vrombissement, une douce chaleur remplissant le local. Finalement, cette production d’énergie décentralisée, pratiquée par nos ancêtres, pourrait contribuer à faire baisser nos émissions de… Lire plus »
Bonjour,
Oui, Très Bonne iD d’avoir équipé cet ancien moulin à farine en turbine + alternateur pour produire des kWh et couvrir les besoins de consommation élec du site.
Puissance de 15 kW permet de couvrir ça, a priori.
Passer à puissance de 100 kW est intéressant, mais y a-t-il la « ressource eau » pour le faire, en hauteur de chute et débit: de 15 kW à 100 kW c’est un facteur 7 ! Questions cruciales à se poser !
Cordialement
Guydegif(91)
Une très bonne idée.
Cela permets de garder ce bâtiment qui est déja en lui même important. De le faire évoluer tout en répondant au besoin …
Un beau projet.
Je me demande administrativement ce qui change sur la façon d injecter dans le réseau entre photovoltaïque et hydroélectrique. Un cahier des charges particuliers a respecter ?
je ne savais pas qu’on pouvais trouver des turbine d’occasion comme ca.
A quand des photos de l’installation ?? :-p