Illustration : Getty, modifié par RE.
L’année 2023 s’inscrit en clé de voûte entre une année 2022 qui a vu les prix de l’électricité flamber et une année 2024 qui devra déployer les grandes trajectoires structurelles esquissées à la hâte. Voici ce qu’il faut retenir de l’année écoulée.
L’énergie nucléaire à la relance
Les centrales nucléaires redeviennent progressivement le socle électrique et peuvent gagner en nombre. Après les mises à l’arrêt de certains réacteurs durant l’hiver 2022-2023, l’énergie nucléaire occupe désormais un rôle majeur dans la politique énergétique du pays. Flamanville connaît ses derniers chantiers avant la mise en service, et de nouveaux EPR 2 seront construits pour 2042 à Penly (Seine-Maritime), Gravelines (Nord), Bugey (Ain).
Une lutte sans pitié a opposé France et Allemagne dans la réforme du marché européen de l’électricité conclue fin 2023. Elle accorde un contrat avantageux qui visera à remplacer l’ARENH (dispositif d’accès régulé à l’énergie nucléaire historique qui prend fin en 2025), dont le montant pratiqué depuis 2012 (42 €/MWh) passera à 70 €/MWh. C’est toute une filière qui devra mobiliser ressources humaines, compétences et financements pour surmonter les difficultés observées notamment dans la construction de l’EPR de Flamanville.
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Les énergies renouvelables s’affirment à mesure que l’État s’aperçoit de la temporalité et de l’aspect massif du chantier nucléaire. C’est un choix que l’UE a fait et que la France doit incarner : la baisse des prix de l’électricité ne pourra pas être réalisée sans les énergies renouvelables. La COP 28 (sommet mondial du climat 2023 à Dubaï) a mis d’accord 116 pays dont l’objectif est de tripler les capacités renouvelables dans le monde. Énergies bas-carbone, le solaire, éolien… sont en passe de surmonter la pression sur les matières premières et les tensions géopolitiques. Alors que l’année 2022 laissait des appels d’offres sans lauréat, le gouvernement a décidé d’indexer les contrats sur l’inflation.
Les derniers appels d’offres témoignent de cette bonne dynamique avec 1 500 MWc de photovoltaïque lauréats en 2023 (82,4 €/MWh), 2 parcs éoliens offshore en méditerranée et 931 MW d’éolien terrestre (86,94 €/MWh) lauréats du deuxième des trois appels d’offres terrestres 2023. L’UE s’est aussi dotée d’un plan pour doper les capacités de production des renouvelables sur le sol européen et réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine, ultra-dominatrice notamment dans le secteur des panneaux solaires. La France a de son côté acté l’accélération des renouvelables pour permettre, entre autres, une délivrance plus rapide des permis et installer ces modes de production sur les zones déjà artificialisées, à savoir les parkings, toitures…
Le changement climatique qui s’accélère, défi numéro 1 de 2024
Le programme européen d’étude de la Terre, Copernicus, s’inquiète de l’accélération fulgurante du réchauffement climatique en cette année 2023. Le mois de septembre a été le mois le plus chaud jamais observé, + 2,51 °C par rapport à la moyenne 1991-2020. Alors que l’Europe « se réchauffe plus vite que la moyenne mondiale », il est plus urgent que jamais de réduire notre dépendance aux énergies fossiles, largement majoritaires dans les émissions de Gaz à effet de serre (GES). Les centrales à charbon dont nous prolongeons la durée de fonctionnement, les centrales à gaz qui assurent, en hiver, environ 10 % de notre mix électrique doivent être éjectées. La sobriété devra donc être le maître mot de 2024 pour réduire notre recours à ces modes carbonés.
Le mois de juin 2024 sera marqué par l’élection des députés européens. 2023 a vu souffler un vent contraire à la lutte contre le réchauffement climatique avec des droites opportunistes et conservateurs européens qui ont tenté de torpiller une à une les lois qui font pourtant consensus chez les experts : une massive rénovation énergétique des bâtiments pour limiter le chauffage (23 % des émissions de GES), forte accélération du déploiement des énergies renouvelables, grande loi pour la restauration de la nature (protéger les espaces naturels et restaurer ceux détériorés), ambitieux mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pour faire payer les émissions incorporées aux produits que l’UE importe…
Commentaires
Les deux chaînes énergétiques actuelles basées sur la combustion et le nucléaire qui passent par le chaud pour générer l'électricité nécessaire à notre besoin ne sont pas étrangères au réchauffement climatique actuel. Particulièrement la 2eme qui diffuse dans notre environnement une quantité d'énergie thermique sensiblement 2 fois plus importante que l'énergie électrique produite. Le Lutin thermique que je suis estime que l'erreur de la France est de vouloir persévérer avec cette dernière au prétexte que nous allons prochainement être contraint, faute de combustible, d'abandonner la première.
Vous avez parfaitement raison Mr Grossmann. Le rdt thermique des centrales électriques utilisant un cycle vapeur ne dépasse pas 30% toutes voiles dehors peu importe la source de chaleur. En revanche la petite taille des SMR constitue un espoir d'amélioration de rendement, car leur taille autorise un fonctionnement en cogénération donc un rejet de chaleur majoritairement utile dont seule donc une petite partie est rejetée donc une contribution au réchauffement de l'atmosphere directe bien moindre que sans appel à la cogénération. Mais la cogénération n'est plus soutenue par ce gouvernement particulièrement in culte en matière d'energie. Et moi je double la mise de ce que la France n'aime pas puisque la cogénération biomasse n'est pas plus encouragée. D'ailleurs notre sté disposant d'une antériorité d'un demi siècle sur la cogénération biomasse ou déchets solides et secs, est en dissolution puisque pas de marchés en France. Poutant notre potentiel de développement est tout simplement énorme à la mesure de la cessité de la France en terme de production d'énergie et singulièrement d'électricité...pilotable, évidemment ! désespérant !!!
Merci de cette synthèse
Quand on va dans le détail, il ne fait aucun doute que le nucléaire est en meilleure forme : 39 GW la 1ère semaine de froid de décembre 2022 versus 48 GW pour celle de 2023 ... En pinaillant, on ne comprend pas pourquoi Golfech1, à l'arrêt depuis février 2022, presque 2 ans, n'a pas encore redémarré.
Sic " les centrales à charbon ... et à gaz doivent être éjectées". Et alors on fait comment en cas de jours anticycloniqyes bien froid ? Cette posture idéologique fait sens à moyen terme quand le nouveau nucléaire sera opérationnel mais dans l'intervalle comment se passer des 12,8 GWc de gaz et des 1,8 GWc de charbon ? Depuis le 1er Novembre, Cordemais 4 puis 5 ont été allumées l'une après l'autre quelques jours pour essai puis quand il a fait froid en decembre notamment pour pallier la défaillance des bancs éoliens de Guerande.
De manière globale, on a besoin d'énergie non intermittente quand la météo est défavorable... transformer Cordemais (919 g de CO2/ kWh au charbon selon electricity Map) pour la faire turbiner au gaz (de schiste arrivant sur place à Montoir de Bretagne) à 612 g de CO2/kWh ... ça met la tonne de CO2 économisée à quelle valeur ??? Tout ça pour 20 jours par an ???? Idem pour la transformer au déchet de bois comme la centrale de Provence. Bref par delà la posture idéologique économie de la transformation ??? On médite que la RFA 2030 prévoit certes 80% de renouvelable bas carbone (plus de 300 GWc) mais conserve plus de 50GWc de gaz ou de H2
L’article résume bien les perspectives de développement du réseau électrique: le prix des ENR à grimpé à plus de 80€ pour trouver des investisseurs, quand le nucléaire se voit imposer un prix plafond. Avec la pénétration de plus en plus grande des ENRi, les prix de marché vont aussi devenir "intermittent" et varier au gré des vents. On va donc moduler de plus en plus la production nucléaire pour compenser. Le vrai problème ici, qui reste caché, y compris dans l’article, est qu’on ne fait quasi rien pour stocker cette électricité surabondante et c’est dommage. Il serait aussi plus sage, par exemple, d’arrêter ce marché délétère et fixer à 85€ le prix de l’électricité pour tout les modes de production.