Une batterie domestique couplée à une centrale solaire en Martinique / Image : Y. Brochier, montage : RE.
Les batteries domestiques se généralisent, dans le monde entier et plus récemment en France. Dans ce contexte de rapide augmentation de l’offre, la question de s’équiper d’une batterie est légitime. En effet, est-ce qu’une batterie vaut le coût d’investissement ? On fait le point.
Les applications d’une batterie domestique sont multiples. Tout d’abord, elles permettent d’assurer l’approvisionnement de son logement en électricité en cas de coupure du réseau. Si cet argument peut être très porteur dans certains pays, en France, le réseau électrique reste assez bien tenu, et cet argument n’est pas décisif.
Mais les batteries domestiques réservent une autre possibilité : elles permettent de stocker l’excédent d’électricité photovoltaïque produite sur son toit pendant la journée, pour l’utiliser lorsque la production est nulle, par exemple, en soirée ou la nuit. Un tel système permet de ne pas avoir à acheter de l’électricité pendant ces périodes, et ainsi d’augmenter son taux d’autoconsommation, c’est-à-dire le rapport de l’électricité que l’on consomme par rapport à la quantité d’électricité que l’on produit. On peut généralement considérer que sans batterie, le taux d’autoconsommation est de l’ordre de 35 %, tandis qu’il peut être augmenté à une valeur de l’ordre de 70 % lorsqu’on est équipé d’une batterie ayant une capacité suffisante.
Ce principe étant posé, les motivations qui peuvent conduire à s’équiper d’une batterie pour compléter une installation photovoltaïque sont diverses. Ce choix peut être fait sur la base de convictions écologiques concernant l’origine de l’énergie que l’on consomme, ou sur la simple volonté d’être aussi autonome énergétiquement que possible. Ou encore, le choix peut être basé sur des considérations financières, et c’est l’objet de cet article : est-il rentable de s’équiper d’une batterie domestique ?
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Les hausses du prix de l’électricité sont constantes, et ne font que s’accélérer dernièrement. Les causes sont multifactorielles :
- Hausse des coûts de maintenance et des besoins d’investissement du parc de production électrique, notamment en ce qui concerne les centrales nucléaires.
- Financement du déploiement massif des sources d’énergie renouvelables et investissements nécessaires dans la stabilisation du réseau électrique.
- Inflation générale des matières premières, conduisant à une hausse des coûts de production.
- Hausse des prix des hydrocarbures à la suite des sanctions prises contre la Russie, et répercutées sur le prix de l’électricité en France via le marché européen de l’énergie.
- Hausse brutale de la demande énergétique après la fin des politiques de confinement liées à la crise sanitaire…
La part de chacune de ces causes est difficile à établir de manière définitive, chaque partie mettant en avant des raisons différentes en fonction de ses intérêts économiques ou idéologiques. Quoi qu’il en soit, les conséquences sont moins abstraites en ce qui concerne nos factures. Aujourd’hui, et depuis le 1ᵉʳ août 2023, les tarifs réglementés ont augmenté de 10 % en moyenne, portant, par exemple, le prix de l’électricité à 0,227 €/kWh dans le cas d’un abonnement 9 kW option base. L’image à long terme est édifiante. Ainsi, le prix de l’électricité était de 0,129 €/kWh en 2012 ; l’augmentation totale s’établit à 77 % en 11 ans. Et le prix de l’abonnement annuel a également suivi l’augmentation.
Une batterie domestique permet de stocker l’électricité lorsqu’elle est peu chère (la nuit, en heures creuses par exemple) ou gratuite, grâce à des panneaux solaires, pour la réutiliser durant les heures pleines.
Le prix des batteries et panneaux solaires a considérablement baissé
Le prix du matériel, quant à lui, n’a cessé de baisser. Prenons pour commencer les prix des panneaux photovoltaïques. Le prix proposé par les fabriquants chinois vient d’établir un nouveau record, à une valeur de l’ordre de 0,15 $/Wc.
En ce qui concerne les batteries, leur prix a diminué de près d’un facteur 40 en près de 30 ans, comme l’illustre le graphique ci-dessous de OurWorldinData.org, aboutissant à un coût de production de 181 $/kWh en 2018. Depuis lors, le prix a continué à baisser. Pour prendre un exemple, la batterie BYD HVM 11.0, de 10 kW de puissance et 11 kWh de capacité, peut se trouver actuellement dans le commerce à un prix inférieur à 650 €/kWh. Elle est garantie pour 10 ans et 6 000 cycles.
Au prix du matériel, il convient bien sûr d’ajouter le prix d’installation. Toutefois, la chute du prix du matériel est bien évidemment fondamentale dans l’évaluation de la rentabilité, aujourd’hui, du système photovoltaïque + batterie. En effet, le coût de l’électricité autoconsommée est composé d’une part du coût de production de cette électricité (par les panneaux), et d’autre part du coût de son stockage (dans la batterie) pour la part qui sera stockée.
Ainsi, plus le prix du matériel est bas, plus l’électricité autoconsommée le sera à un prix bas. Et plus le coût de l’électricité produite par son propre système sera bas, plus il y aura avantage à la consommer plutôt qu’à acheter de l’électricité sur le réseau.
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Nous constatons donc qu’il se produit un effet ciseau, constitué d’une part de la hausse conséquente des prix de l’électricité, et d’autre part de la baisse continue du prix du matériel. Cet effet ciseau conduit à rapprocher un système photovoltaïque + batterie du point de rentabilité, voire, dans certains cas, à dépasser ce point.
Prenons un exemple. Supposons un système constitué d’une centrale photovoltaïque de 6 kW, complétée d’une batterie de 10 kWh. La production globale d’électricité sur 20 ans pourrait être de l’ordre de 130 MWh. Supposons avoir obtenu un devis pour l’achat et d’installation du système à hauteur de 20 000 €. Le coût unitaire de l’électricité produite sera alors de l’ordre 0,15 €/kWh, nettement moins élevé que le coût d’achat de l’électricité, à savoir 0,23 €/kWh, comme expliqué plus haut. Et plus élevé que le tarif de revente du surplus d’électricité, à 0,13 €/kWh.
Bien sûr, ce calcul est simpliste et ne prend pas en compte l’ensemble des facteurs – ne serait-ce que parvenir à disposer d’un devis d’installation dans cet ordre de prix ; toutefois il permet d’indiquer que le point de croisement n’est plus très éloigné, voire qu’il peut être dépassé aujourd’hui dans certains cas. Et cette information est très importante.
Nous avons contacté l’entreprise BayWa r.e. Solar Systems, distributeur de systèmes photovoltaïques et batteries. Joan Bossard, responsable des ventes pour la France, nous indique : « Nous avons attentivement surveillé les prix de l’électricité, car nous estimons que la rentabilité survenait dès lors que le prix de l’électricité sur le réseau dépasse 0,22 €/kWh. C’est le cas aujourd’hui. » « Selon les hypothèses que nous prenons en compte en ce qui concerne la hausse future de l’électricité, nous pouvons avoir des rendements financiers très importants, par exemple, de l’ordre de 10 % en termes de TRI (Taux de Rendement Interne) », ajoute-t-il.
Conclusion
Et c’est en effet le point clé concernant la rentabilité du système photovoltaïque + batterie : les prix de l’électricité sont susceptibles de poursuivre leur augmentation à l’avenir. Ainsi, si le tarif régulé de l’électricité poursuit sa hausse tendancielle, à savoir ~80 % d’augmentation pour les 10 prochaines années, le coût d’achat de l’électricité réseau sera de l’ordre de 0,40 €/kWh en 2033. Or, un investissement consenti aujourd’hui dans un système d’autoproduction fixe le prix de son électricité pour les 20 prochaines années, jusqu’en 2043 (en ce qui concerne la part autoconsommée). Ainsi, la rentabilité de l’investissement sera d’autant plus grande que l’augmentation du prix de l’électricité du réseau sera grande.
En définitive, l’opportunité de l’acquisition d’un système photovoltaïque + batterie pour maximiser son autonomie en électricité dépend de notre propre analyse concernant l’avenir : est-ce que les prix vont continuer d’augmenter, mais faiblement, et l’investissement financier restera faiblement rentable ? Ou est-ce qu’au contraire, on estime que les prix vont continuer leur très forte augmentation de ces dernières années, et qu’il est très important d’en protéger son foyer ?
Ce choix d’investissement, ou ce choix de ne pas investir, est donc le résultat d’un pari que l’on fait sur l’avenir. Nous avons listé plus haut les multiples facteurs qui pèsent aujourd’hui sur le prix de l’électricité. Ces facteurs rendent l’avenir reste très incertain actuellement, et peu de spécialistes prendront le risque de prédire le prix de l’électricité dans 10 ou 20 ans. Nous ferons donc chacun ce pari en notre for intérieur, en fonction de notre expérience, de nos convictions et de nos sensibilités personnelles.
Commentaires
Bonjour. Pour les particuliers qui ont une installation PV en autoconsommation+revente du surplus, est-ce que la tactique d'attendre la fin du contrat de revente pour investir dans des batteries de stockage peut être intéressante? On peut en effet penser qu'aujourd'hui, le prix des batteries même s'il diminue reste élevé par rapport au prix de vente de l'énergie élect en France. Si le prix des batteries continue à diminuer, lorsque le surplus ne sera plus racheté (au bout de 1à ans donc), alors, il pourrait être très intéressant de stocker le surplus de PV qui ont aujd une durée de vie très longue (Sunpower dans mon cas: 40 ans garantie)? Merci pour votre réponse, Sébastien
Voici le petit calcul rapide auquel je me suis livré pour un particulier:
Stocker 1 KWh rapporte environ 10c (= la différence entre l'injection (13c) et le soutirage (23c) pour un contrat de base) et cela suppose d'utiliser 100% de la batterie.
Les ordres de grandeurs de durée de vie des batteries sont de 5000 cycles (et peut être moins quand on l'utilise systématiquement entre 0% et 100%)
Par conséquent une batterie de 1KWh ferait économiser 5000 x 10c = 500€ sur sa durée de vie.
Or les prix actuels des batteries de stockages sont entre 500 et 1000 € le KWh.
Une batterie de stockage est donc a priori non rentable.
Et si on n'utilise la batterie qu'entre 20% et 80% le gain par KWh de batterie n'est plus que de 6c (seulement 600Wh de stocké). Le seuil de rentabilité est alors à 300€/KWh.
Les batteries peuvent devenir rentables si :
- le prix de la batterie baisse significativement. Rappelons que les batteries de voitures ne sont pas loin de 100€ / KWh.
- la durée de vie (en nombre de cycles de charge) de la batterie augmente significativement
- le prix de l'électricité de soutirage (consommation normale) augmente
Pour le calcul de rentabilité d'une batterie ce n'est pas le prix de l'électricité acheté sur le réseau qui entre en compte mais le delta entre le prix d'achat et le prix de revente (je ne vend pas l'énergie que je stocke...). Comme le prix de revente suit à peu près le prix d'achat (le delta reste relativement stable) la rentabilité d'une batterie ne s'améliore pas simplement avec l'augmentation du prix d'achat... Au passage une batterie stationnaire n'est pas écologique (d'autant plus en France où l'énergie isssu du réseau est fortement décarbonnée). En effet contrairement à une batterie "mobile" (une voiture électrique), la batterie stationnaire ne réduit pas une source de CO2 (elle ne remplace pas un moteur et le combustible qu'il brûle, mais une énergie nucléaire dont l'impact CO2 est , selon les études, du même ordre de grandeur que celui d'un panneau photovoltaïque ~20 à 40 gCO2/kWh). L'impact CO2 de la fabrication de la batterie n'est donc jamais "remboursé" dans le cas d'une batterie stationnaire.
Bonjour,
Une petite question, la batterie de votre téléphone est elle plus écologique que ma batterie, et pourtant vous n'y pensez pas lorsque vous l'utilisez, cela ne vous traverse même pas l'esprit
Je vous rappelle qu'il y a plus de 8 milliards de téléphones dans le monde
Combien de batteries stationnaires chez les particuliers ?
Julien - Sauf si la batterie sert à éviter de mettre en route une source d'électricité fortement carbonée au moment des pointes... et si elle permet d'absorber un excédent de renouvelable qui serait perdu sinon... actuellement la revente par les particuliers est "presque" sans limite... mais à un moment donné, EDF risque de dire qu'il n'a pas besoin de cette électricité et/ou baisser le prix de rachat. Pour revendre il faut une installation posée par un RGE (pour la prime à l'auto-conso) ou au moins un consuel... le surcoût ne se justifie que si on exporte beaucoup, c'est donc dommage de ne pas avoir cherché à augmenter son auto-consommation par un routeur ou une batterie et de s'appuyer sur le réseau (les autres) pour consommer cette électricité. Reste le problème de la sécurité en cas de coupure, voir même le problème de ne pas avoir de courant si le réseau est absent et même s'il fait plein soleil avec des micro-onduleurs. La batterie stationnaire est un élément d'attente avant le V2h (même s'il faudra en garder une petite en tampon)... bien conçue (faible puissance de charge et décharge) elle doit pouvoir durer très longtemps et doit être facilement réparable. La batterie stationnaire bien gérée peut alors compenser son CO2 sur les périodes de pointe, elle n'a pas besoin d'être disproportionnée, mais comme pour beaucoup d'autres sujets, la peur de manquer de certains leur fait toujours surdimensionner leurs outils (voiture, maison, ...).
Il faut arrêter de diffuser des graphiques dont l'ordonnée n'est pas zéro. Cela fausse complètement l'analyse et on peut leur faire dire n'importe quoi.
Ainsi que des échelles non linéaires, pour ce genre de graphique je ne crois pas qu'une échelle logarithmique soit pertinente. On pense à une baisse continue alors que la courbe est plutôt stable depuis 20ans.
Merci Defakator.
Parce que vous croyez vraiment que la batterie va tenir 20 ans? Et il manque une donnée importante sur ce calcul qui est la saisonnalité, En hiver, la production quotidienne ne permettra pas de charger la batterie tous les jours, alors qu'en été, il y aura surproduction...
Clairement mettez du PV, injectez le surplus, mais réservez les batteries pour les usages où elles est indispensable...
La batterie de ma triplette a 11 ans, et encore 85% de sa capacité d'origine. Alors je suis confiant
Je paye avec Tempo, la plupart du temps, 12 centimes le kW. Donc votre calcul qui prend le double n'est pas juste. D'autre part, l'électricité produite par mes panneaux et non consommés n'est pas perdue, mais revendue a 10 centimes le kW.
Les batteries domestiques ne sont pas rentable en France.
Oui et en plus le prix du kWh en journée est voué à chuter avec la démultiplication des panneaux solaires qui entraînent déjà régulièrement les prix de gros dans le négatif.
Oui le prix du PV devrait continuer à baisser, alors que celui du kWh ne peut qu'augmenter (en Allemagne aujourd'hui c'est le double du prix français, donc on ne peut qu'aller à la hausse pour les rattraper
Je confirme moi aussi que le tarif Tempo avec 6 KVA compteur est encore plus intéressant. Pas de souci non plus d'entretien de matériel et plus écologique que les panneaux PPV ou les batteries.