Des lasagnes ou des yaourts transformés en électricité : le biogaz pourrait réduire de 12 % les émissions de CO2


Des lasagnes ou des yaourts transformés en électricité : le biogaz pourrait réduire de 12 % les émissions de CO2

L’entreprise belge Vanheede Biomass Solutions est spécialisée dans le traitement des déchets organiques, impropres à la consommation, provenant de l’industrie agro-alimentaire, des grandes surfaces, des restaurants, des abattoirs… Transformés en biogaz dans une unité de méthanisation, celui-ci alimente ensuite des moteurs pour produire de l’électricité. Selon l’Association mondiale du Biogaz (WBA), seulement 2% des ressources mondiales aptes à produire du biogaz sont aujourdhui collectées et valorisées. D’ici 2030, l’industrie du biogaz pourrait éviter annuellement jusqu’à 4 milliards de tonnes d’émissions de CO2, ce qui représente au moins 12 % des émissions mondiales actuelles.

Les invendus des grands magasins sont de plus en plus souvent donnés aux banques alimentaires mais que faire des fruits, légumes, charcuteries, yaourts, pâtisseries ou plats préparés impropres à la consommation, par exemple parce que leur date de péremption est dépassée ? Certaines de ces denrées fermentescibles prennent la direction de Quévy-le-Grand, dans le Hainaut belge, non loin de la frontière française. L’entreprise Vanheede y exploite depuis 2007 une installation de biométhanisation qui traite les restes de nourriture et les déchets alimentaires. « 20% de nos fournisseurs sont français ; une quinzaine d’hypermarchés Auchan des Hauts de France nous envoient notamment leurs invendus périssables mais nous accueillons aussi les déchets provenant du secteur des cafés, hôtels et restaurants, des abattoirs, etc. » nous explique Julien Pozza le directeur général. Des entreprises agroalimentaires confient également à Vanheede leurs rebus de production : que ce soit des pizzas, des lasagnes ou des boites de lait dont les emballages sont abimés ou déformés, des produits avariés ou ne répondant pas aux normes de qualité.

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Lors du scandale des lasagnes à la viande de cheval, en 2013, la psychose générée par l’affaire n’a pas été sans conséquence pour les acteurs de la grande distribution. La quantité de plats cuisinés dont plus personne ne voulait a augmenté exponentiellement. Nombre d’entre eux ont alors pris le chemin de Quévy-le-Grand. Au total, l’entreprise traite 100.000 tonnes par an de déchets fermentescibles.

La société sépare d’abord les emballages des denrées alimentaires de leur partie organique. En fonction de la nature du produit, l’emballage est soit recyclé, soit valorisé pour produire de l’énergie. La fraction organique récupérée est ensuite utilisée comme matière première pour alimenter l’unité de biométhanisation composée de deux digesteurs de 2.000 m³ et d’un post-digesteur de 2.000 m³ lui aussi. Le gaz obtenu est ensuite injecté dans trois moteurs de cogénération d’une puissance totale installée de 3,3 MWél. La plus grande partie de l’électricité produite, soit 15.000 MWh par an est injectée sur le réseau et permet de couvrir les consommations d’électricité de 3.000 à 5.000 ménages. Le surplus, soit 4000 MWhél ainsi que la chaleur produite sont utilisés sur le site, afin d’atteindre l’autonomie énergétique.
Le digestat, c’est-à-dire le résidu du processus de méthanisation est valorisé en tant qu’engrais sur les terres d‘agriculteurs voisins.

Seuls 2 % des ressources sont collectées et valorisées

Cette réalisation est un bel exemple de l’économie circulaire qui consiste à utiliser des déchets comme matière première, en l’occurrence pour produire de l’énergie. Selon l’Association mondiale du Biogaz (WBA), seulement 2% des ressources mondiales aptes à produire du biogaz sont aujourd’hui collectées et valorisées. Dans beaucoup de pays de nombreux freins, notamment d’ordre réglementaire, empêchent d’aller au-delà. Si toutes les barrières étaient levées, la WBA considère que l’industrie du biogaz pourrait éviter d’ici 2030 jusqu’à quatre milliards de tonnes d’émissions de CO2 par an, ce qui représente de 12 à 14 % des émissions mondiales actuelles. Soit l’équivalent de toutes les émissions des 28 pays de l’Union européenne en 2017.

Un million d’unités de grande taille

Dans son récent rapport, Global Potential of Biogas, la WBA estime que 132.000 installations industrielles de biogaz sont actuellement exploitées dans le monde. En 2030, le nombre des unités de biométhanisation de grande taille, qui traitent chaque année plus de 100.000 tonnes d’intrants pourrait dépasser le million. Pour atteindre cet objectif, le secteur devrait investir environ 5.000 milliards de dollars. L’industrie du biogaz emploierait alors environ 10 millions de personnes dans le monde, au lieu des 350.000 actuels.

A l’occasion de la COP 25 qui se tient actuellement à Madrid, l’association appelle dès lors les dirigeants de la planète à mieux exploiter le potentiel du biogaz pour faire face à l’urgence climatique. Les entreprises membres (parmi lesquels figurent Engie et Suez) y présenteront une déclaration dans laquelle elles s’engagent à réaliser d’ici 2030 les investissements nécessaires mais elles demanderont aux gouvernements de soutenir cette ambition.

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