La batterie lithium-soufre constitue une piste prometteuse pour augmenter sensiblement l’autonomie des véhicules propres, et faire voler des avions électriques.

Dans les années 1990, la technologie lithium-ion a révolutionné le monde des objets fonctionnant sur batteries, notamment l’électronique portable, mais il n’y a plus de développement spectaculaire à attendre de ce mode de stockage d’énergie.

Pour augmenter sensiblement l’autonomie des véhicules électriques, à moins de réduire considérablement leur poids, il n’existe que deux solutions : soit augmenter le nombre de cellules, soit faire appel à une autre technologie. Or le poids des batteries lithium-ion (Li-ion) est un facteur limitant : leur densité massique s’élève à environ 150 Wh/kg. Cela explique que le pack batteries d’une Renault Zoé 2e génération, d’une capacité de 52 kWh, s’élève à 326 kilos. Celui d’une Tesla Model 3, d’une capacité de 75 kWh, pèse un peu moins d’une demi-tonne, armature comprise.

Le lithium-soufre : solution d’avenir ?

C’est notamment ce qui explique pourquoi, depuis plusieurs années, les recherches sur la technologie lithium-soufre (LSB) s’intensifient.
En janvier dernier, nous avions déjà évoqué les progrès considérables réalisés par une équipe de chercheurs de l’université de Monash en Australie.


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De nombreux problèmes restaient à résoudre : faible durée de vie des cellules, instabilité des électrodes, et formation de dendrites sur les anodes. Mais aujourd’hui, ces obstacles sont en passe d’être surmontés.

Des chercheurs de l’Institut des sciences et technologies de Daegu Gyeongbuk (Corée du Sud) ont développé une structure hôte appelée « silice mésoporeuse ordonnée en plaquettes (pOMS) ». Cette structure permet d’utiliser un oxyde métallique peu coûteux et abondant, la silice, pour attirer les polysulfures de lithium solubles (LiPS) qui se forment à la cathode. Les LiPS atteignaient facilement l’anode et dégradaient progressivement la capacité de la batterie. Grâce à la silice, les LiPS peuvent désormais être piégées à la cathode.

Selon le professeur Jong-Sung Yu, qui a dirigé les études, « la structure de la silice retient clairement beaucoup plus de soufre pendant les cycles, et cela se traduit par une stabilité plus importante sur pas moins de 2000 cycles ».

Ces résultats pourraient conduire à une véritable révolution dans la fabrication des batteries au soufre, et ouvrent le champ des possibles en matière d’autonomie des véhicules propres, y compris des avions électriques.


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Le projet Oxis

Basée à Abingdon dans l’Oxfordshire (Royaume-Uni), l’entreprise Oxis Energy travaille depuis 2004 sur les potentialités des batteries lithium-soufre. Mark Crittenden, PDG d’Oxis Energy, est également confronté aux problèmes de dégradation de l’anode, mais il a réussi malgré tout à doubler la densité énergétique de ses batteries par rapport aux lithium-ion équivalentes. Oxis Energy atteint 470 Wh par kilo de batterie, et espère atteindre 600 Wh dans les cinq ans à venir.

Une telle évolution pourrait garantir une autonomie considérable pour des avions, mais permettrait aussi le développement de bateaux,  de véhicules utilitaires, voire de poids lourds électriques.
Oxis Energy s’est associée à la société Texas Aircraft Manufacturing pour développer l’eColt, un avion 100% électrique équipé d’un pack de batteries lithium-soufre à haute densité de 90 kWh.

L’eColt, issu de l’adaptation du Colt-S-LSA, un biplace à moteur thermique, sera fabriqué au Brésil, et aura une autonomie de deux heures de vol ou de 370 kilomètres.Selon Oxis Energy, le pack de batteries de 90 kWh présente un poids inférieur de 40% par rapport à un pack équivalent au lithium-ion, grâce à une densité énergétique de 400 Wh/kg.
Mais ses détracteurs pointent du doigt une durée de vie plus courte, offrant entre 200 et 300 cycles de charge-décharge, ce qui en fait une technologie encore coûteuse.

Toutefois, au vu de ses nombreuses potentialités, la batterie lithium-soufre pourrait bien infliger un sérieux coup de griffe à la technologie Li-ion.


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