La première ligne haute tension souterraine entre la Belgique et l’Allemagne a été inaugurée ce lundi 9 novembre après dix ans de travaux importants et un investissement de 500 millions d’euros répartis également entre les gestionnaires de réseau de transport Elia et Amprion.
L’interconnexion en courant continu haute tension (CCHT, ou HVDC en anglais) qui relie Lixhe (en province de Liège) à Oberzier (Allemagne) s’étend sur 90 kilomètres, dont 49 en Belgique. ALEGrO (c’est son nom) permettra de faire transiter 1.000 MW par 2 câbles de 12 cm de diamètre, soit l’équivalent de la puissance d’un réacteur nucléaire.
Son inauguration s’est déroulée ce 9 novembre au sein de l’hôtel de ville d’Aix-la-Chapelle, en présence de la chancelière allemande Angela Merkel, du premier ministre belge Alexander De Croo, du ministre-président de la Rhénanie du Nord-Westphalie Armin Laschet, et de la ministre belge de l’Energie Tinne Van der Straeten.
Pour limiter au maximum les éventuelles nuisances, redoutées par de nombreux riverains opposés à son installation, « le projet a été développé en souterrain le long de l’ensemble des infrastructures autoroutières, ferroviaires, et également maritimes, et donc, on a, en traversant les 14 communes, un impact qui est beaucoup moins important. Et on ne traverse pas des zones urbanisées », explique Julien Madani, responsable communication projets d’infrastructures d’Elia.
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Avantage triple
Dans le contexte de sortie du nucléaire décidée tant par l’Allemagne que la Belgique, ALEGrO a pour premier objectif d’accroître la sécurité d’approvisionnement énergétique des deux pays. La capacité d’import d’électricité de la Belgique s’élève à présent à 6,5 GW outre une capacité totale de production d’électricité de 24 GW (dont 3,8 GW d’éolien et 4,8 GW de photovoltaïque) :
La liaison ALEGrO permettra également une meilleure intégration des énergies renouvelables, notamment des parcs offshore de la mer Baltique, situés à grande distance des centres industriels, gros consommateurs d’électricité.
“ALEGrO est un facilitateur important pour les énergies renouvelables. Comme tout le monde le sait, l’Allemagne et la Belgique ont posé les mêmes choix stratégiques en termes de production d’électricité : sortir du nucléaire et miser intensément sur les sources d’énergie neutres en carbone. ALEGrO forme le maillon entre ces deux stratégies. Il permettra une meilleure distribution de l’énergie éolienne durant les pics et les creux », déclarait Alexander De Croo, premier ministre belge.
Enfin, l’interconnexion avec l’Allemagne contribuera à la convergence des prix de l’électricité entre les deux pays. Plus le marché est interconnecté, plus les prix sont stables et convergents, ce qui devrait induire à terme une baisse du coût de l’électricité pour le consommateur final.
Trouver l’électricité la moins chère
L’électricité transitera dans les deux sens entre la Belgique et l’Allemagne. L’importation permet d’assurer la sécurité d’approvisionnement, mais la Belgique exporte également son électricité (1,8 TWh en 2019, soit 2,1% du mix énergétique), bien que dans une moindre mesure.
De manière générale, un pays importe de l’électricité lorsque les prix sur les marchés de court terme sont inférieurs chez le voisin. C’est le cas lorsque qu’une tempête locale n’alimente pas simultanément les éoliennes des deux pays, ou si une centrale électrique devait soudainement être mise à l’arrêt.
L’électricité la moins chère, c’est celle qui est produite de façon renouvelable. Un constat qui risque d’avantager l’Allemagne, vu l’importante capacité de production renouvelable de nos voisins allemands, qui couvre 43% de la demande d’électricité.
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Dans cette optique, le développement de l’éolien offshore belge prend toute son importance. La puissance installée dans la partie belge de la mer du Nord devrait atteindre 4 GW à l’horizon 2030.
Importer une électricité moins propre ?
Si la connexion ALEGrO aura pour effet positif d’accroître de 18% la sécurité d’approvisionnement en électricité de la Belgique, ses détracteurs affirmeront que le courant importé est bien moins propre que l’électricité produite en Belgique.
Il est vrai qu’à fin 2019, 84 centrales au charbon étaient encore opérationnelles en Allemagne. Une situation qui entraîne une densité carbone[1] du mix énergétique plus élevée chez les voisins teutons : à l’heure d’écrire ces lignes, le mix énergétique belge a une empreinte carbone de 214 grammes[2], contre 376 grammes en Allemagne.
Mais rappelons que l’Allemagne a voté en janvier dernier un programme de sortie du charbon au plus tard en 2038, voire 2035, et que les émissions allemandes de gaz à effet de serre ont reculé de 7 % l’année dernière, selon les calculs de l’association Energiebilanzen.
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[1] Densité carbone : quantité de CO2 émise pour produire un kilowattheure d’électricité par le mix énergétique du pays concerné
[2] Source : https://www.electricitymap.org/map
Commentaires
Petite question technique. Ils enterrent 2 conducteurs pour une ligne en courant continu. On pourrait donc penser très simplement qu'il y a le câble "plus" et le câble "moins". Est-ce cela? Il me semblait cependant qu'en HVDC un seul conducteur suffisait, le retour se faisant tout simplement par la terre. Ou alors je confonds et le retour "terre" n'est possible que dans "l'eau" dans le cas d'une liaison maritime.
Oui, le retour en monopolaire à divers inconvénients que le deuxième conducteur permet d'éviter surtout lorsque la liaison est aussi empruntées comme c'est souvent le cas par d'autre systèmes de liaisons entre une île et un continent par exemple, la circulation du courant à travers la Terre dans les systèmes monopolaires peut causer la électro-corrosion d'installations métalliques souterraines, principalement de pipelines et aussi d'autres phénomènes inductifs sur les liaisons de transmissions de données qui suivent le même chemin....
Les lignes THT en souterrain coûtent extrêmement chère, et ils serait bien préférable de s'en tenir à des puissances bien inférieures à celles sortant des centrales nucléaires qui créent le problème de la répartition vers une multitude d'utilisateurs d'autant plus éloignés de la source qu'ils sont nombreux.
Ce sont des lignes qui interconnectent les réseaux des différents pays. Sans elles, les réseaux de ces pays seraient isolés comme ceux des îles isolées. Elles sont nécessaires si on veut atteindre l'objectif de 100% d'électricité renouvelable en Europe car elles permettent alors de profiter du foisonnement ainsi que des capacités de stockage des pays voisins. C'est grâce à ces lignes entre le Danemark, la Norvège et la Suède que ces 3 pays affichent des pourcentages très élevés d'ENR sur leur réseau respectif. L'Europe a d'ailleurs bien compris l'enjeu puisqu'une directive européenne oblige chaque pays à avoir des interconnections avec ses voisins à hauteur de 10% de sa puissance installée.
Grâce à ces interconnections, se crée un marché européen de l'électricité qui est tout bénéfice pour le consommateur.
On est bien d'accord sur ce point, mais ce que je voulais dire c'est qu'à l'intérieur d'un pays, comme la France par exemple, enterrer les lignes THT est impossible ne serait-ce qu'en raison du coût de ces opérations et qu'il est bien préférable et économique de n'avoir qu'une multiplication des sources d'énergies réparties sur le territoire comme le sont les utilisateurs afin de n'avoir à transiter que de faibles puissances entres les uns et les autres ce qui permet de créer un réseau maillé souterrain bien plus résilient et moins couteux.
Même les transferts liés aux faibles productions locales bénéficieront du foisonnement dont le propre est de n'avoir que des manques localisés que le réseau général devra transporter sur de plus longues distances. Car ils seront de puissances réduites (celle nécessaire à la zone utilisatrice en défaut d'approvisionnement ) comparées à celles transitant depuis seulement 18 lieux géographiques pour alimenter la totalité de la surface du pays, comme c'est le cas aujourd'hui.
Les transferts entre pays ne peuvent être que de fortes puissances tant que chacun n'est pas organisé de la même façon que les autres (Multiples sources, et réseau maillés de proximité interconnectés entre eux).
Faire évoluer un système centralisé vers un système complètement décentralisé, c'est une bonne idée mais vu les investissements nécessaires, il faudrait plutôt compter en centaines de milliards avec horizon 2100, donc bien trop tard.
Mais pour pour atteindre cet objectif, il faudrai déjà augmenter suffisamment la production et le stockage local, et au rythme actuel d'investition en France, on en est loin.
J'ai bien conscience que cela prendra du temps, mais le réseau actuel, bien plus complexe n'a à lui même mis qu'une cinquantaine d'années à se faire et le réseau MT est déjà largement présent car c'est le dernier intermédiaire avant les consommateurs et il ne "suffit" que de l'étendre en courcircuitant le réseau THT en différents points du territoire. Cela mettra moins d'un 1/2 siècle et ceux qui en profiteront sont déjà présents sur le territoire, et je pense à mon arrière petit fils qui n'a que 8 mois. Ceux qui seront toujours là et qui peuvent me lire seront surpris de la facilité et de la rapidité à laquelle cela aura été fait.
Pour un avenir meilleur, cordialement.
Je doute que les solutions simplistes évoquées par Rochain parviennent à se réaliser.
Actuellement, RTE investit 1,3 milliards d’euros par an dans la modernisation du réseau de transport HT et THT. Le nouveau plan prévoit de faire passer les investissements à 2 milliards d’euros annuels, soit 20 milliards à horizon 2030, et 33 milliards à horizon 2035.
Sur ces 33 milliards, 20 seront consacré à l’intégration des nouvelles sources d’énergies renouvelables au réseau – dont 7 milliards pour la connexion des parcs éoliens offshore, désormais à la charge de RTE suite aux renégociations du tarif avec les opérateurs, une somme difficilement compressible, et qui justifie à elle seule les deux-tiers de la hausse. https://lenergeek.com/2020/01/24/cre-plan-modernisation-rte-reseau-electrique/
Toujours aucun rapport avec le sujet mais cela n'a rien d'étonnant puisque vous ne comprenez rien au sujet ce qui ne vous empêche pas de trouver mes solutions "simplistes" et d'autant plus simpliste que je ne propose aucune solution sachant qu'il n'y a aucun problème évoqué dans cet article qui ne traite que de la décision de RTE d'intégrer des solutions de stockage comme partie intégrante du réseau.
Mais comme cela a été l'occasion d'introduire le mot "simpliste" à mon propos, votre message n'avait pas d'autre ambition.
L'extension du réseau THT est inexorable, malgré vos protestations : https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/rte-experimente-le-stockage-sur-le-reseau-de-lignes-a-tres-haute-tension-75182/
Vous n'avez rien compris Gautier, mais je ne suis pas étonné. Il s'agit ici d'intégrer des fonctions de stockage au réseau lui-même sous des capacités de l'ordre dune trentaine de MWh avec des puissances de réinjection de 10 MW, ce qui n'implique pas la THT et peut se contenter du MT. Cela fera donc partie des investissements récupérables à terme. Vous passez votre temps à crier victoire à propos de faits qui ont rien à voir avec l'éventuelle justification de l'indispensable THT qui ne se trouve que dans les supers puissances émises sur le réseau par les centrales nucléaires.