À quoi sert la plus grande centrale solaire thermique de France récemment inaugurée ?


À quoi sert la plus grande centrale solaire thermique de France récemment inaugurée ?

La centrale solaire thermique installée sur le site Lactalis de Verdun / Image : Newheat.

Le solaire thermique, ce n’est pas réservé aux régions du sud. La jeune société française Newheat, spécialisée dans la production de chaleur solaire, compte bien le démontrer grâce à cette immense centrale installée sur un site du groupe Lactalis à Verdun (55).

L’industrie laitière produit de grandes quantités de petit-lait. Il est utilisé dans l’agroalimentaire pour la formulation des laits infantiles, en remplacement du lait dans les biscuits ou comme additif dans la préparation des viandes. Avant cela, il doit être séché dans une tour d’atomisation, qui projette de fines gouttelettes de petit-lait dans un grand volume d’air chaud pour en faire une poudre. Et pour générer cet air chaud, il faut de l’énergie. De l’énergie fossile, jusqu’ici, très souvent.

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Il existe pourtant aujourd’hui des solutions pour décarboner ce processus industriel. La centrale solaire thermique que le groupe Lactalis vient d’inaugurer sur son site de Verdun montre la voie. C’est aujourd’hui la plus grande installation du genre en France et l’une des plus grandes d’Europe. « 15 000 m2 de capteurs pour couvrir 15 à 20 % des besoins en chaleur de la tour de séchage », nous annonce Hugues Defréville, président et co-fondateur de Newheat, le partenaire de Lactalis sur ce projet.

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Du solaire thermique pour décarboner l’industrie

Mais comment ça marche ? D’abord grâce à plusieurs rangées de « plaques de tôle noire qui chauffent au soleil et à l’arrière desquelles on fait circuler de l’eau dans des serpentins en cuivre ». L’eau ainsi chauffée est ensuite acheminée vers une cuve de 3 000 m3. « De quoi stocker 2 à 3 jours de chaleur pour pouvoir déphaser la production de la consommation. Livrer de la chaleur aussi la nuit ou les jours de mauvais temps. » Enfin, l’eau chaude finit son parcours dans des échangeurs installés dans la tour d’atomisation. « Pour préchauffer l’air jusqu’à 80 ou 90 °C. » La montée en température sera complétée — il faut 160° pour sécher du petit-lait — par une chaudière au gaz.

Il aura fallu quelque 4 années de travail pour concrétiser ce projet. C’est la durée moyenne nécessaire à la mise en œuvre d’une centrale solaire thermique. Et celle de Lactalis a finalement été mise en service l’été dernier. Pour l’heure, les performances attendues sont au rendez-vous. D’autant que l’expertise de Newheat en matière de pilotage de l’installation permet d’assurer un fonctionnement optimal. « La durée pendant laquelle l’eau tourne en boucle le matin, la meilleure température pour injecter l’eau dans la cuve de stockage, le débit le plus adapté au besoin du client. Ce sont autant d’éléments de paramétrage qui font la différence sur la performance de la centrale solaire thermique », nous explique Hugues Defréville. « Nous prévoyons ainsi de produire 8 000 MWh thermiques par an. De quoi éviter l’émission de 2 000 tonnes de CO2. »

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Du solaire thermique, mais pourquoi ?

Et à ceux qui s’inquiètent de l’ensoleillement d’un site tel que celui de Lactalis à Verdun et de l’impact qu’il pourrait avoir sur les performances du solaire thermique, il précise : « Il y a deux autres paramètres importants qui interviennent. Le niveau de température demandé, notamment. L’efficacité de la centrale Lactalis est finalement proche de celle de notre centrale adossée au réseau de chaleur urbain de Narbonne  [voir notre reportage en immersion dans cette centrale, NDLR] parce qu’en moyenne, nous travaillons ici à des températures plus basses — entre 30 ou 40° l’hiver et 80 ou 90° l’été contre 60 à 80° toute l’année. Et puis, il y a le facteur économie d’échelle. La compétitivité d’une grande centrale est forcément meilleure que celle d’une centrale plus modeste. »

Ce qui a sans doute aussi séduit Lactalis, dans l’idée du solaire thermique, c’est que, contrairement aux centrales alimentées au bois — le groupe développe aussi des projets en ce sens —, la centrale de Verdun n’émet aucune particule fine. En l’absence d’intrant, les prix restent également fixes. Le tout pour une durée de 25 ans au moins. « Et nous voyons des centrales qui fonctionnent déjà depuis 40 ans sans problème », souligne Hugues Defréville.

« Pour toutes les applications dites basse température — moins de 100 °C —, l’Ademe demande aujourd’hui de prioriser le solaire thermique, la géothermie ou la chaleur fatale. Parce que la ressource projetée en biomasse ne suffira pas à répondre aux besoins. L’objectif 2030 est de produire ainsi 6 TWh de chaleur renouvelable. C’est l’équivalent d’un million de mètres carrés de capteurs solaires thermiques à installer chaque année. Aujourd’hui, nous en sommes à 100 000 seulement. Nous devons accélérer. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y a pas d’impossibilité structurelle à cela. Nous ne dépendons d’aucun matériau rare. Les fournisseurs existent. Y compris en France. Chez Newheat, nous avons changé de cadence. Notre parc se résume aujourd’hui à 5 centrales solaires thermiques. Mais rien que l’année prochaine, nous prévoyons d’en mettre 5 nouvelles en chantier », conclut le polytechnicien.

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