Le rejet accidentel d’une centaine de litres d’huile par le navire foreur du futur parc éolien offshore de Saint-Brieuc suscite la polémique. Une pollution impressionnante qu’il faut toutefois relativiser, d’autant que ses conséquences environnementales sont probablement minimes.
Article mis à jour avec les derniers éléments le 16/06/21 à 10h15
A 16 kilomètres des côtes armoricaines, un étonnant navire s’active pour réaliser les premiers travaux du futur parc éolien offshore de Saint-Brieuc. Mi-plateforme, mi-bateau, L’Aeolus prépare les fondations sous-marines qui accueillent les turbines.
Problème, le 14 juin au petit matin, le vaisseau déclare avoir rejeté accidentellement « 100 litres […] d’huile hydraulique qui sert au système de forage ». Observée par un satellite puis par un avion des douanes mobilisé dans l’après-midi, la nappe s’étend sur 16 km de long et 2,7 km de large.
Il s’agit d’une pollution « d’ampleur significative » selon la préfecture maritime de l’Atlantique. Sur Twitter, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili annonce convoquer les responsables (Ailes Marines, filiale de l’énergéticien espagnol Iberdrola, ndlr) « pour qu’ils s’expliquent sur la situation ». « Je ne tolérerai aucune négligence dans le déploiement des parcs éoliens en mer » assure-t-elle sur le réseau social. Plusieurs associations, personnalités, pêcheurs et autres détracteurs ont rapidement sauté sur l’incident pour appuyer leur opposition chronique à l’éolien.
À lire aussi Les pêcheurs américains sont séduits par le premier parc éolien offshore du pays#Pollution #SaintBrieuc Vu du ciel, on distingue parfaitement la pollution sur le site du chantier des éoliennes de la Baie de Saint-Brieuc …
Quel désastre !
🛰️Sentinel-1 AWS-IW-VVVH pic.twitter.com/rbMlJlRmKJ— Stéven Tual (@StevenTual_off) June 15, 2021
Une nappe épaisse de quelques microns
Un embrasement surprenant au regard du faible volume de polluant rejeté, d’autant que le risque environnemental n’est pas déterminé et ne suscite pour l’instant pas de grandes inquiétudes. Un navire dépollueur est d’ailleurs sur place et a déployé un barrage absorbant pour tenter de contenir la nappe. De son côté, l’Aeolus a suspendu ses opérations pour gagner la Hollande, où ses équipements de forage vont être révisés.
Interrogé par Le Télégramme, le Centre de documentation, de recherche et d’expertise sur les pollutions accidentelles des eaux (CEDRE) ne semble pas particulièrement embarrassé par cette pollution. « L’huile s’évapore naturellement au contact de l’air et de la chaleur […] Le soleil et la chaleur devraient permettre de réduire la nappe » indique l’association agréée par l’État. La couche déposée à la surface de l’eau serait particulièrement étendue en raison de la nature du produit. « L’huile a une capacité d’étalement très importante. Une goutte s’étale déjà sur plusieurs cm² » explique le CEDRE, qui précise que cette caractéristique « rend particulièrement difficile sa récupération ». L’épaisseur de la nappe ne serait ainsi que de « quelques microns ».
Une huile biodégradable
Les huiles ne sont pas toutes dangereuses, leur rejet en mer est même légal dans certaines conditions. Sur son site, l’organisme précise « qu’il n’est pas illicite de déverser au large, des eaux huileuses de fond de cale tant que leur concentration en hydrocarbures ne dépasse pas 15 ppm, quelle que soit la quantité en jeu ».
Selon Ailes Marines, la substance rejetée par l’Aeolus serait de l’huile « HLP Synth » commercialisée par le fabricant suisse Panolin. Ce produit est présenté comme « un fluide spécialement conçu et développé pour les travaux en mer et qui est biodégradable ». « Il est considéré dans l’industrie comme l’un des plus respectueux de l’environnement » précise l’opérateur du futur parc éolien offshore. Le CEDRE doit prélever un échantillon dont l’analyse permettra de s’assurer du type d’huile déversé par le navire.
L’éolien reste une énergie verte
L’expert français des pollutions marines est d’ailleurs mobilisé sur un évènement autrement plus périlleux pour l’environnement : le dégazage sauvage survenu le 11 juin au large de la Corse. Une pollution composée de plusieurs tonnes d’hydrocarbures lourds qui génère étonnamment moins d’indignations.
Si le rejet de l’Aeolus n’est probablement pas une catastrophe au regard du type de produit et du volume en jeu, il reste condamnable. La mer n’est pas une décharge, que les déchets déversés soient biodégradables ou non. L’évènement ne doit toutefois pas être un prétexte pour remettre en question le développement de l’éolien, qui est une énergie nettement moins polluante que ses concurrents fossiles et nucléaires.
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Il ne fait aucun doute que ce site est pro-éolien, mais vous pourriez peut-être faire votre travail de journaliste, surtout que vous revendiquez des compétences spécifiques, et vous poser des questions sur les preuves de la biodégradabilité du produit, et plus globalement, sur les tests permettant à une entreprise de revendiquer cette biodégradabilité. Deux indices : OCDE 306 et 1992.
Au-delà de ce point, que cette pollution contamine ou non l’environnement, cette image reste dans la tête des consommateurs de produits de la mer, et donc les pêcheurs, producteurs et restaurateurs sont impactés.
Je ne suis pas un pro-éolien. Mais l’indignation à géometrie variable ça suffit. En a t’on fait un plat? https://actu.fr/bretagne/saint-brieuc_22278/baie-saint-brieuc-navire-peche-coule-pres-grand-lejon_32059431.html
Une tempête d’huile dans un verre d’eau. Cela va-t-il virer en mayonnaise?
Si l’huile en question n’est pas trop dangereuse, vu l’étendue de la nappe, je me pose cependant une question toute bête. Quand la société de forage annonce avoir perdu 100 litres d’huile, n’y aurait-il pas un ou deux zéros manquants à la valeur annoncée?
Pas vraiment. Si on prend la superficie de la nappe d’huile et une épaisseur moyenne de 2 micron (ça varie entre 1 et 4 en fonction de conditions locales), on se retrouve un peu en dessous de 80l. En soit, c’est plutôt un non-événement, habituellement, les marins ne font pas l’effort de reporter ce genre d’incidents. On peut pas dire que je sois un grand défenseur de l’éolien (c’est même plutôt le contraire) . Mais si on pouvait se contenter d’attaquer cette énergie sur ses défauts avérés et non sur tout ce qui passe dans les médias, le débat serait… Lire plus »
De 1975 à 2000, la France a installé environ 2,5 GW de nucléaire par an pendant 25 ans, ce qui fait, avec 75% de fc, une production de 19Twh/an. Ces centrales vont donc fermer au même rythme de 19Twh/an. Pour les remplacer, sans compter les pertes liées au stockage, et les moyens de stockage, il faudrait: 2GW d’éolien offshore à 40% de fc + 5GW de PV à 15% de fc + 1 GW de biogaz/biomasse à 35% de fc. Pour un décarbonation complète de l’électricité, des transports, de l’industrie, de l’agriculture, du chauffage, il faudrait encore multiplier ces chiffres… Lire plus »
Erratum, c’est environ 16,5Twh/an ! Mais les proportions par rapport aux énergies renouvelables restent les mêmes.
Les chiffres peuvent effrayer mais cette production galopante la été par un effet rebond.
Depuis le nucléaire on est juste incapable d’économiser l’énergie car elle est produite en continue, et elle est abordable (enfin était à l’époque).
Cet effet rebond nous a mené à un gaspillage de 15tWh/an.
Pourtant si je divise par 67 millions on tombe sur 223kWh/an, ça me semble bien peu.
Ne vous inquiétez pas, on va rajouter 6 EPR en France, donc 9 GW en plus pour se laisser le temps d’avoir du PV avec un meilleur rendement.
D’après le journal La Tribune, EDF propose d’ « entamer le chantier, en France, de six autres de ces réacteurs de nouvelle génération dans les quinze prochaines années », ce qui fait environ 0,6 GW par an produisant 4 TWh avec 75% de fc.
Comparaison qui vaut ce qu’elle vaut, mais tout de même… Janvier 2012, puissance nucléaire en fonction 60 GW et la France est exportatrice Janvier 2021, puissance nucléaire en fonction 51 GW et la France est importatrice Cela fait une perte de 1GW par an pendant 9 ans… probablement due en partie au vieillissement des centrales, avec des arrêts plus fréquents et plus longs (et bien sûr à l’arrêt de Fessenheim). Alors, regagner 0,6 GW par an, je ne suis même pas sûr que cela compense la baisse de régime du parc actuel dans les 15 ans qui arrivent, sans parler… Lire plus »