Depuis plus d’un an, le groupe norvégien REC Solar multiplie les petits pas pour ouvrir à Hambach une usine à la pointe qui déboucherait sur la création de 1.800 emplois. Une enveloppe de 680 millions d’euros serait consacrée à ce programme pour lequel le lancement d’une consultation préalable vient d’être validé.
A de multiples reprises, touché par la crise de l’emploi du fait de la fermeture des mines, le recul de la sidérurgie et le départ de contingents militaires, le département de la Moselle ne peut rêver mieux que d’accueillir une activité stratégique dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Une chance pour Hambach
Ce point est même brûlant à Hambach où Daimler est sur le point de céder à Ineos son usine Smart, les citadines électriques cédant la place à des 4×4 bien plus lourds sur la route et l’environnement. Les départs de personnels orchestrés sur place par la filière automobile pourraient être gommés avec l’ouverture de la gigafactory qui se dresserait sur le site de la ZAC Europôle II, à moins de 10 km de Sarreguemines.
9 millions de panneaux solaires par an
Selon REC Solar, l’usine serait composée au final de 2 bâtiments qui formeraient une superficie totale de 150.000 m2. Dès 2022, le premier permettrait de produire 2 GW de structures photovoltaïques par an. La pleine capacité serait atteinte en 2025 lorsque 9 millions de panneaux solaires (4 GW) sortiront des 2 immeubles à chaque exercice. Pour le groupe norvégien, il s’agit de profiter du rehaussement des objectifs de la PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie) en matière de photovoltaïque afin de lancer en France une fabrication de masse. En 8 ans, la puissance du parc solaire français doit être multipliée par 4. La production sur place des cellules nécessitera la réception et le stockage de diverses matières chimiques. L’entreprise compte vendre le matériel sorti d’Hambach aussi bien aux particuliers qu’aux commerçants intermédiaires, en passant par les développeurs de parcs – en particulier les énergéticiens. L’expédition des produits finis aux différents clients sera effectuée depuis le site mosellan.
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Parmi les acteurs publics et assimilés qui soutiennent le projet, la Direction générale des entreprises, Business France, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), la Caisse des dépôts et consignations (CDC), et la Banque publique d’investissement (BPI). Ils entendent ainsi asseoir de nouvelles industries sur un territoire en difficulté socio-économique, favoriser le développement d’une filière française dédiée à la production d’équipements solaires, et profiter de débouchés industriels nouvellement permis par l’hétérojonction. Cette nouvelle technique de fabrication des panneaux solaires développée par le CEA était déjà employée par REC Solar de façon encore expérimentale sur son site de Singapour. Tout comme avec la production de batteries de voitures électriques en Europe, la France joue du coude à coude avec l’Allemagne pour s’affranchir d’une provenance très majoritairement chinoise des ensembles photovoltaïques. L’équipementier suisse Meyer Burger est en train de suivre sa propre feuille de route pour démarrer son activité outre-Rhin, également en 2021.
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La Commission nationale du débat publique (https://www.debatpublic.fr/projet-dusine-construction-panneaux-photovoltaiques-a-hambach-moselle) a indiqué avoir été saisie tardivement par le responsable du projet, au regard des exigences du droit à l’information et à la participation. La demande d’instruction pour les autorisations environnementales et le permis de construire n’ont été déposés que fin août pour des travaux qui débuteraient en juin 2021. Sans doute mis sous pression par l’annonce en juin dernier du projet suisse, REC Solar a déjà prévenu qu’à défaut de pouvoir construire sur le site choisi son usine, il se replierait dans un autre pays. La CNDP a assuré que la localisation pourrait être validée dès cet hiver. Elle a en outre estimé que le dossier déposé par l’entreprise scandinave est suffisamment complet pour lancer la consultation qui devrait s’étaler du 14 décembre prochain au 8 février 2021. Sous réserve des impératifs liés à l’actuelle pandémie de Covid-19 qui empêcheraient la tenue des réunions publiques.
Stratégie de communication
L’adresse d’un site Internet a déjà été choisie, inaccessible à l’heure où nous écrivons le présent article : www.concertation.projetrec.fr. Dans son dossier, REC Solar a prévu, comme il se doit, de commencer la phase de consultation par différentes actions de communication, parmi lesquelles l’insertion d’encarts dans la presse, la distribution de flyers, la pose d’affiches, des expositions sur le projet, des conférences de presse, etc. Suivront des réunions publiques, des ateliers contributifs et une table-ronde à l’IUT de Moselle-Est. Tout ce programme sera soutenu par la création d’un secrétariat permanent dédié à l’implantation de l’usine. Si les contraintes sanitaires venaient à empêcher son bon déroulement, le groupe norvégien a prévu d’intervenir sur le plateau des chaînes de radio et des télévisions locales, et de proposer des ateliers dématérialisés. Trente jours seront nécessaires pour dresser ensuite le bilan de cette consultation. L’entreprise aura ensuite 2 mois pour fournir des réponses justifiées aux questions et problématiques soulevées pendant la phase de consultation. Le planning s’annonce des plus serrés.
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C’est presque trop beau pour être vrai. Comment ces norvégiens peuvent-ils être plus compétitifs que les chinois? J’espère juste qu’on n’a pas affaire à un mirage cousu par des prédateurs de subventions.
La main d’œuvre sera française. Pour être compétitifs, cela nécessitera beaucoup de subventions tant à la production que pour l’achat de ces panneaux. S’ils seront réalisés en France, les ressources minérales servant à la fabrication devront être importés. De plus, l’apport dans la décarbonation de la production de notre électricité et de la lutte contre le réchauffement climatique en France sera nul car le contenu actuel est déjà très faible.
Se pose-t-on la question des ressources minérales que nécessitera une transition de grande ampleur vers les ENR ? La transition énergétique (déploiement des énergies renouvelables, de la mobilité électrique, de l’efficacité énergétique, etc.) se traduit par un besoin accru en diverses ressources minérales (ciment, cuivre, métaux rares, terres rares, etc.). Ce constat s’appuie sur les résultats de plusieurs rapports publiés récemment par diverses institutions internationales : le Groupe international des experts sur les ressources, la Banque Mondiale, la Commission Européenne. Transition énergétique et ressources minérales, les défis à relever (ecologie.gouv.fr)
Le photovoltaique est encore plus stratégique que ne l’était le nucléaire dont la source de l’énergie, l’uranium, était importée à 100% de l’étranger. C’est une folie de ne pas avoir déjà créé cette filière depuis longtemps car le Soleil et ses incidences dérivées comme l’éolien par exemple sont les seules façon de garentir notre indépendance énergétique.
Le meilleur article que j’ai lu sur le sujet! Je n’ai pas vu dans la presse traditionnelle autant de détails. Vous êtres vraiment bien informés. En tout cas c’est formidable pour la région. Vivement les offres d’emplois 🙂
Et vivement les ppv bien de chez nous.