La mer de glace fond de plus en plus vite à mesure que le changement climatique s’accélère. EDF, qui turbine l’eau de fonte du glacier de Chamonix, doit adapter ses captages à cause des sédiments de la fonte.

À Chamonix-Mont-Blanc, la Mer de Glace, plus grand glacier français, ne cesse de reculer. Depuis 1995, elle a perdu environ un kilomètre, un symbole alarmant du réchauffement climatique​. Pourtant, sous cette étendue de glace en sursis, une centrale hydroélectrique unique en son genre continue de fonctionner, exploitant l’eau issue de la fonte du glacier pour produire de l’électricité.

À lire aussi La France n’a jamais produit autant d’électricité depuis 5 ans (et elle est ultra bas-carbone)

Une centrale sous-glaciaire menacée

Depuis les années 1970, EDF exploite un captage souterrain sous la Mer de Glace. L’eau de fonte s’engouffre dans un réseau de galeries souterraines, descend à 1 075 mètres d’altitude et alimente la centrale des Bois, qui produit chaque année l’équivalent de la consommation domestique d’une ville de 50 000 habitants​. Mais la fonte rapide du glacier entraîne une accumulation croissante de roches et de débris qui menacent de bloquer le captage actuel​.

« Nous avons une incertitude sur le moment où le captage se bouchera », explique Guillaume Marchal, chef du projet de reconfiguration des captages, à nos confrères des Échos. Initialement prévu pour 2030, ce scénario est désormais avancé à 2025​. Pour éviter une interruption de production, EDF a réhabilité un ancien captage à 1 520 mètres d’altitude, transformé en captage de surface protégé par des grilles​.

L’adaptation de l’installation représente un défi logistique et financier. Les travaux ont nécessité le creusement de nouvelles galeries et l’installation de dispositifs de filtration pour préserver les équipements de l’usure accélérée provoquée par les sédiments charriés par l’eau​. Ce chantier, d’un coût de trois millions d’euros, doit permettre une transition vers le nouveau captage sans interruption de la production​.

À lire aussi 5 228 m d’altitude : cette centrale solaire est la plus haute du monde

La mer de glace devrait exister au moins jusqu’en 2100

La Mer de Glace, longue de sept kilomètres et épaisse de 200 mètres, demeure imposante, mais son avenir est incertain. Selon le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), même dans les scénarios les plus pessimistes, elle sera encore en glace jusqu’en 2100​. Pourtant, la diminution de son épaisseur et la hausse des températures accélèrent un processus qui pourrait bouleverser le paysage alpin dans les décennies à venir.

Chaque année, des milliers de skieurs et randonneurs foulent la Mer de Glace, souvent inconscients de l’infrastructure cachée sous leurs pieds et des enjeux qu’elle incarne. Elle est à la fois un témoin du changement climatique et un acteur de la transition énergétique, qui illustre le besoin d’adapter notre production d’énergie au changement climatique.