La Duck Curve est une courbe « en forme de canard » mettant en valeur la demande en électricité à laquelle la production solaire est retranchée. À mesure que les panneaux photovoltaïques sont déployés, elle est de plus en plus creuse à midi ou 13 heures, montrant une production solaire excédentaire.

L’essor des énergies renouvelables, et en particulier de l’énergie solaire, pousse la production à être parfois en décalage avec la consommation. C’est le cas du solaire, par exemple, dont la pointe de production correspond à un début de creux de consommation. Ce développement s’accompagne cependant de défis importants pour l’équilibrage des réseaux électriques. Parmi eux, le phénomène de la duck curve (ou « courbe du canard »). Déjà problématique en Californie, la duck curve commence à s’inviter dans les débats énergétiques français.

À lire aussi C’est la saison des records pour l’énergie solaire en France

Le phénomène de la « duck curve »

La duck curve tire son nom de la forme particulière de la courbe de charge nette observée dans les régions où le solaire est fortement implanté. La charge nette correspond à la demande totale d’électricité après soustraction de la production issue du solaire et de l’éolien. En journée, lorsque les panneaux solaires produisent massivement, cette demande nette chute brutalement, avant de remonter en fin de journée à mesure que la production solaire diminue, et que la consommation domestique atteint son pic.

En Californie, où la capacité solaire installée atteint près de 47 gigawatts (GW), cette courbe est devenue si prononcée que des surplus solaires importants doivent être « écrêtés », entraînant des pertes de production. Le défi pour les opérateurs est double : d’un côté, éviter les déséquilibres causés par une surproduction solaire en milieu de journée ; de l’autre, gérer les montées rapides de la demande en soirée, exigeant une mobilisation accrue et rapide des centrales conventionnelles.

La situation en France : montée en puissance du solaire

En France, l’énergie solaire connaît un développement rapide. Selon le ministère de la Transition énergétique, la capacité solaire installée a atteint environ 19 GW fin 2023. L’énergie produite pour l’année en cours 2024, selon Réseau de transport d’électricité (RTE), s’élève actuellement à 21,7 térawattheures (TWh). C’est déjà 3,5 fois l’énergie produite il y a dix ans. Les projections prévoient un triplement de la capacité installée d’ici 2030, atteignant 60 GW. Et cette montée en puissance n’est pas sans conséquence pour la gestion du réseau électrique.

Contrairement à la Californie, où le phénomène de duck curve est exacerbé par des journées ensoleillées et des pics de production solaire très marqués, le réseau français bénéficie d’un mix électrique diversifié. Le nucléaire, largement dominant, offre une production stable, mais il est peu flexible à court terme. Par ailleurs, l’éolien et l’hydroélectricité viennent compléter la production solaire, ajoutant de la complexité à l’équilibrage global du réseau.

Les flexibilités pour réduire le creux de la duck curve

Pour répondre à ces défis, la France parie sur plusieurs leviers de flexibilité. RTE a lancé des appels d’offres en ce sens pour encourager le développement de solutions permettant d’ajuster production et consommation en temps réel. Ces solutions incluent, par exemple, la gestion de la demande. Le décalage volontaire des consommations électriques, notamment via des dispositifs de réponse à la demande (décalage lors de la pointe solaire des industries notamment), est une piste.

Un autre moyen d’utiliser l’excédent solaire est de le stocker. Les batteries, comme celles utilisées en Californie et les stations de pompage turbinage (STEP) permettent de stocker l’énergie solaire excédentaire en journée pour la réinjecter en soirée. En 2023, la capacité de stockage par batterie en France reste limitée (environ 0,5 GW), mais des projets de grande ampleur sont en cours.

À lire aussi Tout savoir sur Montézic 2, le méga-chantier de stockage d’électricité qu’EDF veut lancer