La filière du recyclage des panneaux solaires peine à se développer. En cause, une législation floue, des défis techniques, une culture du recyclage encore à développer. Dans le même temps, les objectifs d’installation de panneaux solaire ne cessent de grandir.

Le secteur des panneaux solaires connaît une expansion fulgurante. En France, 14,5 millions de panneaux photovoltaïques ont été mis sur le marché en 2023. Cela représente environ 320 000 tonnes de matériel. Si cette dynamique contribue à la transition énergétique, elle soulève également la question cruciale du recyclage de ces équipements. Avec une durée de vie moyenne de 20 à 30 ans, des millions de panneaux arriveront bientôt en fin de cycle, posant de sérieuses questions environnementales et économiques.

L’éco-organisme Soren, chargé de coordonner la collecte et le recyclage des panneaux solaires, a annoncé avoir récupéré 5 207 tonnes en 2023, une hausse de 35 % par rapport à l’année précédente. Mais ces volumes, bien qu’en augmentation, sont encore modestes face aux prévisions pour 2030, qui tablent sur la récupération de 40 000 tonnes de panneaux en fin de vie, voire 300 000 tonnes d’ici 2050. Ces objectifs s’inscrivent dans un contexte où la production de panneaux solaires devrait être multipliée par dix pour atteindre 100 gigawatts en 2050, conformément aux ambitions gouvernementales.

Si la capacité de collecte peine encore à répondre à la demande croissante, la filière du recyclage elle-même reste à perfectionner. En effet, même si certains matériaux sont facilement récupérables, d’autres posent de réels défis technologiques.

Le cuivre et l’argent, un fort potentiel de recyclage

Les panneaux photovoltaïques sont constitués de divers matériaux, certains très prisés dans l’industrie du recyclage. Le cuivre, utilisé pour le câblage, et l’aluminium, présent dans les cadres, peuvent être facilement séparés des modules et trouvent rapidement preneur sur les marchés des métaux recyclés. Ces matériaux ne nécessitent pas de procédés complexes pour être valorisés.

Cependant, l’élément le plus précieux est sans conteste l’argent. En petite quantité, ce métal est essentiel au bon fonctionnement des cellules photovoltaïques, rendant son extraction très attractive économiquement. ROSI, une entreprise française spécialisée dans le recyclage solaire, a développé une méthode chimique douce pour séparer ces matériaux, évitant les pertes liées aux techniques plus brutales, comme le broyage.

Le défi du verre : la problématique de l’antimoine

Le recyclage du verre, qui représente environ 70 % du poids d’un panneau solaire, est un autre défi. Si ce matériau est en théorie recyclable, les exigences de pureté imposées par les fabricants de panneaux solaires compliquent sa réutilisation. La transparence du verre doit être irréprochable pour assurer la performance des panneaux photovoltaïques. Un obstacle majeur demeure : la présence d’antimoine, un métal toxique utilisé dans la fabrication de nombreux panneaux solaires. Cet élément complique considérablement le recyclage du verre, car il est difficile à éliminer tout en maintenant la qualité nécessaire à une nouvelle utilisation. Selon Wolfram Palitzsch, PDG de Luxchemtech, aucun fabricant européen de verre plat n’est aujourd’hui en mesure de traiter efficacement des panneaux contenant de l’antimoine, limitant ainsi les débouchés pour ce matériau.

Certaines entreprises militent ainsi pour que l’UE impose des panneaux sans antimoine dans le cadre de la directive Ecolabel, afin de faciliter leur recyclage futur.

À lire aussi Des progrès sans précédent dans le recyclage des panneaux photovoltaïques

Une législation à adapter pour accompagner la filière

Face à ces défis, de nombreux acteurs du secteur appellent à une adaptation de la législation européenne. Actuellement, les panneaux solaires sont régis par la directive sur les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE). Cependant, cette réglementation est jugée insuffisante par certains professionnels du secteur. Jan Clyncke, directeur général de PV Cycle, plaide pour une législation dédiée aux équipements d’énergie renouvelable, afin de mieux encadrer leur fin de vie et de favoriser un recyclage plus efficient des panneaux photovoltaïques.

En parallèle, la sensibilisation des propriétaires de panneaux solaires est essentielle pour encourager le recyclage. De nombreux exploitants choisissent aujourd’hui de remplacer leurs équipements encore fonctionnels par des modèles plus récents et plus performants, contribuant ainsi à l’accélération de la production de déchets photovoltaïques. Un effort doit être fait pour prolonger la durée de vie des panneaux, soit par la réutilisation, soit par une maintenance accrue.