Des technologies spatiales qui trouvent leur application jusque dans nos maisons, cela arrive plus fréquemment qu’on ne le pense. Nous connaissons par exemple le cas de l’informatique, ou la technologie des panneaux photovoltaïques. Il en est de même pour la technologie dite « nickel-hydrogène » (Ni-H2). Mais comment fonctionne-t-elle ?
Notre série pour tout savoir sur les technologies de batteries
Les batteries Ni-H2 ont équipé de nombreuses applications spatiales : satellites de télécommunications, rover d’exploration, le télescope spatial Hubble, ou encore la Station Spatiale Internationale (ISS). La principale source d’énergie de cette dernière est constituée par 2500 m2 de panneaux photovoltaïques, pour une puissance totale de 110 kW. L’ISS est en orbite à un peu plus de 400 km d’altitude et fait le tour de la Terre en 90 minutes ; lorsqu’elle passe derrière notre planète par rapport au Soleil, ce dernier se trouve éclipsé et la station repose alors sur un puissant système de batteries pour assurer l’approvisionnement en énergie. Lors de la construction de la station, ce sont ainsi 48 batteries Ni-H2 de 4 kWh chacune qui ont rempli ce rôle.
À lire aussi L’Europe veut construire des centrales solaires dans l’espaceUn électrolyseur au cœur de la batterie
Une batterie Ni-H2 est un accumulateur électrochimique, ce qui signifie qu’il va mettre en jeu des réactions chimiques pour stocker de l’électricité ; cette catégorie regroupe la très grande majorité des systèmes de stockage d’électricité de la vie courante. L’électrode positive est constituée de nickel, comme pour les batteries Nickel-Cadmium ou les batteries Ni-MH. L’électrode négative est toutefois ici constituée par un matériau d’électrode catalyseur typiquement utilisée pour produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau ; par exemple le platine.
Les électrodes sont plongées dans un électrolyte constitué d’une solution aqueuse d’hydroxyde de potassium KOH ; dans l’eau, ce dernier se décompose en ions K+ et OH–. L’ensemble est placé dans une enceinte étanche au gaz, et capable de supporter des pressions importantes.
À lire aussi Une nouvelle batterie domestique de 5 kWh lancée par EnphaseLe fonctionnement lors de la décharge
Lors de la décharge de l’accumulateur, ce dernier est une source d’énergie, les réactions chimiques sont donc spontanées. Pour ce faire, il faut connecter l’électrode positive avec l’électrode négative par un circuit électrique extérieur, relié aux appareils que l’on cherche à alimenter en électricité. L’électrolyte permet de transmettre le courant à l’intérieur de la batterie. Le circuit électrique global est donc fermé, permettant la circulation du courant.
À l’état chargé, l’enveloppe de l’accumulateur est mise sous pression par une grande quantité d’hydrogène gazeux. Au cours de la décharge, au niveau de l’électrode négative, cet hydrogène va être oxydé par l’ion hydroxyde OH– contenu dans l’électrolyte, pour former de l’eau, qui va rejoindre cet électrolyte. La quantité d’hydrogène gazeux va donc diminuer dans l’enceinte, dont la pression va diminuer, fournissant un indicateur fiable du niveau de charge. La réaction va également produire un électron, qui va circuler au travers du circuit externe de l’électrode négative vers l’électrode positive.
Au niveau de l’électrode positive, l’oxyhydroxyde de nickel NiO(OH), de niveau d’oxydation +III, va consommer de l’eau et un électron, pour former d’une part de l’hydroxyde de nickel Ni(OH)2, de niveau d’oxydation +II, et d’autre part un ion OH– dans l’électrolyte.
La circulation des ions OH– dans l’électrolyte, consommés au niveau de l’électrode négative et produits au niveau de l’électrode positive, va conduire à la circulation du courant électrique à l’intérieur de l’accumulateur.
À lire aussi Batterie domestique : dans quel type de logement peut-on en installer ?Le fonctionnement lors de la charge
Au cours de la charge, les réactions sont inversées. L’électrode négative, qui, rappelons-le, est une électrode d’électrolyse, va consommer un électron pour réduire l’eau, c’est-à-dire pour en extraire un atome d’hydrogène qui va ensuite s’accumuler sous forme gazeuse H2 dans l’enceinte pressurisée, jusqu’à des pressions pouvant dépasser 80 bars. Cette réaction va en outre produire un ion OH–, lequel va rejoindre l’électrolyte.
Au niveau de l’électrode positive, le Ni(OH)2, à l’état d’oxydation +II, va être oxydé : il va libérer un ion H+, et former du NiO(OH), à l’état d’oxydation +III ; cette réaction va produire un électron qui va circuler au travers du circuit externe, de l’électrode positive vers l’électrode négative. L’hydrogène libéré par l’électrode positive va consommer un ion OH–, pour former de l’eau.
La circulation des ions OH–, produits à l’électrode négative et consommés à l’électrode positive, va conduire à la circulation du courant à l’intérieur de l’accumulateur.
Des batteries robustes et fiables
Les batteries Ni-H2 sont robustes et fiables, et elles ont une durée de vie extrême. Ainsi, les batteries de l’ISS ont été conçues pour 38 000 cycles de charge/décharge. Elles présentent toutefois l’inconvénient d’être peu compactes, puisque l’hydrogène gazeux doit être maintenu dans une enceinte sous pression, et l’ensemble est nécessairement plus volumineux qu’un équivalent solide pour d’autres types de batteries.
Les plus anciennes batteries de l’ISS ont fonctionné 19 ans. Aujourd’hui, elles y ont été remplacées entre 2019 et 2020 par des batteries Li-Ion, plus compactes. Toutefois, cette technologie va trouver une application sur Terre. En effet, la société Enervenue a repris les travaux de la NASA dans l’objectif de commercialiser une solution de stockage stationnaire d’électricité pour des applications industrielles et domestique. Enervenue vise une mise sur le marché en 2024.