Le gouvernement vient de combler une lacune en publiant mardi dernier un décret portant sur l’agrivoltaïsme. Le texte encadre la pratique consistant à associer agriculture et production d’énergie solaire. Cette base réglementaire devrait donner un socle solide et permettre à la filière de se développer sereinement.
Cela fait quelque temps que la pratique de l’agrivoltaïsme suscitait l’intérêt des parlementaires. En 2022, une mission flash confiée à des députés avait abouti à la publication d’un rapport tentant d’encadrer l’agrivoltaïsme. Cette même année, le Sénat adoptait en première lecture une proposition de loi en faveur du développement de l’agrivoltaïsme, laquelle a été déposée ensuite à l’Assemblée nationale où elle attend encore d’être examinée. De son côté, l’ADEME avait publié une étude sur la filière pour proposer sa définition et un cadre de mise en œuvre.
Un décret pour encadrer la pratique de l’agrivoltaïsme
Sans texte législatif clair pour l’encadrer, à l’exception de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables qui l’évoque, l’agrivoltaïsme peine à accélérer son déploiement. Dans la lignée de la loi précitée, le gouvernement vient enfin de publier mardi 9 avril un décret qui définit clairement les conditions de développement de la filière.
En pratique, l’agrivoltaïsme consiste à installer des panneaux solaires au-dessus des cultures telles que des vignes, des arbres fruitiers ou des parcelles abritant de l’élevage. L’intérêt est double pour l’agriculteur : réduire le risque de gel sur les cultures en hiver et les abriter des fortes chaleurs en été, tout en générant un revenu issu de la revente de la production solaire.
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L’émergence de l’agrivoltaïsme avait fait craindre chez certains une dérive qui aurait conduit à délaisser l’activité agricole au profit des seuls revenus issus de la production d’énergie. Le décret répond à cette inquiétude en encadrant strictement la pose des panneaux solaires sur les surfaces agricoles : un même terrain ne peut pas être couvert à plus de 40 % par des installations photovoltaïques. En outre, la baisse de rendement sur la parcelle dotée de panneaux ne peut aller en deçà de 10 %, comparativement à une parcelle dépourvue de panneau qui assume le rôle de parcelle « témoin » (hors élevage). Afin de ne pas gêner l’activité agricole, le texte prévoit aussi que l’installation photovoltaïque doit être en mesure de permettre « une exploitation normale et assure notamment la circulation, la sécurité physique et l’abri des animaux ainsi que, si les parcelles sont mécanisables, le passage des engins agricoles ».
Enfin, le décret aborde un autre point important : celui de l’installation de panneaux photovoltaïques sur des terrains qui ne peuvent pas être cultivés et dénommés « incultes ». Un document cadre doit être établi dans les 9 mois par les chambres départementales d’agriculture afin d’identifier ces terrains, lesquels pourront faire l’objet d’installations photovoltaïques.
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Ce décret ne constitue qu’un premier pas dans l’élaboration de la législation liée à l’agrivoltaïsme et il est prévu qu’il soit complété par la suite. Du côté des acteurs de la filière, ce décret a reçu un accueil plutôt favorable. La Fédération française des producteurs agrivoltaïques (FFPA) a publié un communiqué indiquant qu’elle « accueille avec satisfaction le décret sur l’agrivoltaïsme ». Elle précise qu’un point d’étape sera indispensable d’ici 3 ans pour vérifier « l’impact du nouveau cadre légal et réglementaire sur le développement de l’agrivoltaïsme en France ». Du côté du syndicat des énergies renouvelables (SER), son président Jules Nyssen déclare que ce texte « est aussi le fruit d’un dialogue efficace entre les acteurs des filières renouvelables et agricoles, dont on ne peut que se féliciter ! ».
Sur la base de ce nouveau texte, la filière va pouvoir accélérer son développement pour devenir un réel acteur de la transition énergétique.