De la conception pièce par pièce sur son ordinateur jusqu’à l’assemblage, Lukáš Martinec, un passionné d’hydroélectricité, a créé sa propre turbine Francis. Une réplique parfaitement fonctionnelle, que tout possesseur d’imprimante 3D peut reproduire chez soi.
Les banques de fichiers 3D regorgent de talentueux utilisateurs, qui partagent parfois leurs créations et savoir-faire gratuitement. On y trouve de tout : du bibelot décoratif au basique mais bien pratique dérouleur de papier toilette, en passant par de stupéfiantes répliques de machines et outils complexes.
Parmi les milliers d’objets prêts à être traduits du virtuel à la réalité par une imprimante 3D, nous avons trouvé quelques turbines hydroélectriques. Pelton, Francis ou Kaplan : les technologies de roues hydrauliques les plus populaires sont déclinées. Si la plupart semblent conçues pour décorer des bureaux d’ingénieurs, d’autres sont tout à fait fonctionnelles.
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Vidéo à l’appui, un utilisateur du site de partage de fichiers 3D en open source « Thingiverse », montre sa turbine Francis raccordée à un petit ruisseau. Celle-ci n’est pas forgée en acier, mais imprimée en PET et PLA, des plastiques d’origine pétrochimique pour le premier et végétale pour le second. Il ne l’a pas achetée dans une boutique spécialisée dans la micro-hydroélectricité, mais entièrement conçue sur son temps libre. Un travail si passionné qu’il n’a pas pris soin de compter les heures. « Cela m’a pris beaucoup de temps » admet simplement Lukáš Martinec.
Ce maker (créateur) tchèque connu sous le pseudonyme « Martlu36 » sur Thingiverse a réalisé les différents éléments de la turbine sur le logiciel de modélisation 3D Autocad. « La partie la plus difficile a été de modéliser les pales de la turbine » explique ce designer de 28 ans, qui dit travailler pour une société œuvrant dans l’industrie hydroélectrique. Après avoir créé une première version, Lukáš se résout à utiliser la roue d’un autre maker pour la seconde mouture de sa turbine, plus évoluée.
La bâche spirale et le vannage de la turbine Francis, fraichement imprimés / Images : Lukáš Martinec.
« La deuxième difficulté a été le mécanisme de commande du vannage [le système de clapet qui permet de réguler le débit d’eau, et donc la puissance de la turbine, NDLR]. Pour résoudre les problèmes, j’ai dû modéliser plusieurs fois les pièces jusqu’à ce que j’obtienne une version fonctionnelle » explique ce fils d’employé d’une centrale hydroélectrique. « J’ai eu la chance de voyager avec mon père dans de nombreuses centrales hydroélectriques, et ainsi découvrir leur technologie directement sur le terrain » évoque l’homme, pour qui l’hydroélectricité « est devenue un hobby ».
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Après de nombreuses impressions sur son imprimante 3D Prusa de milieu de gamme et une centaine d’euros de filament dépensé, Lukáš assemble sa turbine Francis puis la teste dans un petit ruisseau. « Je l’ai essayée avec un moteur à aimants permanent, mais c’était uniquement pour placer une charge artificielle sur la turbine » explique-t-il. Un test purement mécanique : le designer n’a hélas relevé aucune mesure électrique ni enregistré la moindre performance sur sa machine. « La capacité de la grande version de la turbine est d’environ 1 litre par seconde. La petite accepte entre 0,25 et 0,5 l/s, mais je n’ai rien mesuré, ce sont des suppositions » avance-t-il.
La turbine Francis en test mécanique sur un ruisseau / Images : Lukáš Martinec
Selon le calculateur du site hydroturbine.info, il faudrait donc brancher la mini turbine de Lukáš sur une chute d’eau de 130 m de hauteur pour obtenir la puissance nécessaire à un petit grille-pain (1 kW). « Ma maquette est vraiment conçue pour de la présentation » admet le jeune homme. Une réplique pour mieux comprendre le fonctionnement de la turbine Francis, un type de roule hydraulique déployée dès 1840 et particulièrement adaptée aux chutes de faible hauteur et gros débit. Cette technologie est notamment installée dans l’impressionnante station de transfert d’énergie par pompage (STEP) de Montézic, que nous avons visité.
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« La durée de vie de ma turbine est courte, car elle n’a pas été conçue pour un fonctionnement continu. Par exemple, son grand défaut est l’absence de joint. Mais si elle est améliorée, elle pourrait s’adapter à une micro source de façon relativement pérenne et fiable » reconnaît le passionné.
D’après Lukáš, la micro-hydroélectricité pourrait être mieux exploitée à l’avenir grâce à l’impression 3D. « Je pense qu’il sera possible d’imprimer de très petits modèles chez soi à un prix raisonnable. L’impression 3D sera possible sur certaines pièces parmi les moins sollicitées. La durée de vie dépendra des conditions d’utilisation : hauteur de chute et débit, teneur en impuretés abrasives dans l’eau. Mais c’est encore impossible pour les plus grandes turbines, en raison de la résistance nécessaire aux composants. Cela pourrait changer avec le développement de l’impression 3D de l’acier » prévoit-il.
Le designer s’attèle désormais à modéliser un autre type de turbine : la Pelton, conçue pour les hautes chutes à faible débit. « Mais je n’ai pas beaucoup de temps libre, et il y a beaucoup de travail à réaliser avec les grosses turbines. Avec la turbine Pelton en particulier, où la vitesse de l’eau dans le jet est élevée, il y aura un problème de résistance du matériau face au phénomène de cavitation » explique Lukáš.
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