Avec 300 MWc, la centrale photovoltaïque de Cestas au sud de Bordeaux est la plus puissante de France. Etalée sur 258 hectares, elle est dotée de 983 500 panneaux qui produisent chaque année l’équivalent de la consommation d’environ 75 500 foyers, eau chaude et chauffage compris. Mais, quelle est son architecture ? Comment est-elle entretenue ? Voici les entrailles d’un géant de l’énergie solaire.
Il faut 28 minutes pour aller d’un bout à l’autre de la centrale photovoltaïque de Cestas (Gironde) à pied. Un trajet de 1 800 mètres très monotone, au décor parfaitement symétrique : d’interminables rangées de panneaux, des postes de transformation à intervalles réguliers et parfois quelques moutons chargés de l’entretien des sols.
La plus grande centrale solaire de France s’étale sur 258 hectares, au milieu des vastes cultures de pins des Landes. La parcelle qu’elle occupe était d’ailleurs une ancienne exploitation forestière ravagée au passage des tempêtes en 1999, selon le récit de Neoen, propriétaire et exploitant de la centrale, qui y a investi 350 millions d’euros. Lancés début 2014, les travaux ont duré 18 mois pour s’achever en décembre 2015.
À lire aussi Visite au cœur de l’unique centrale solaire thermodynamique de FranceD’une puissance de 300 MWc, le site est composé de 983 500 panneaux orientés est-ouest. Une disposition assez originale, uniquement motivée par le gain d’espace. En les plaçant tels une toiture à deux pans, les modules nécessitent deux fois moins d’allées de maintenance.
Par ailleurs, la centrale de Cestas, officiellement baptisée « Centrale Constantin », forme un ensemble de 25 centrales plus petites (12 MW) reliées les unes aux autres. Un découpage comptable, chaque bout de centrale étant enregistré comme une entreprise unique. Cela permet notamment à l’opérateur de se soustraire à l’obligation de transparence des données de production imposée par la réglementation REMIT.
Plan détaillé et vue satellite de la centrale solaire de Cestas / Openinframap, Google.
L’architecture de la centrale
Le site est également articulé de façon à réduire les distances de câbles, et donc à diminuer les coûts. Concrètement, chaque « string » regroupe la production de 30 panneaux en série. Un type de branchement qui permet d’élever la tension, et ainsi d’abaisser la section des câbles. Ici, 30 panneaux en série délivrent environ 800 V, pour une puissance unitaire de 305 Wc.
Les strings sont reliés à des boites de jonction, qui concentrent 30 câbles de petite section en un seul de plus grand diamètre. Ces derniers expédient la production vers des « PV Box ». Au nombre de 200 sur la centrale de Cestas, ces locaux préfabriqués abritent chacun deux onduleurs et un transformateur. Ils permettent, d’une part, de convertir le courant continu produit par les panneaux en courant alternatif compatible avec le réseau public et, d’autre part, de porter la tension à 1 200 puis 33 000 V.
À lire aussi Cette centrale solaire flottante a été construite en quelques moisÀ l’extrémité de la centrale, un dernier poste de transformation élève la tension à 225 000 V, avant d’exporter le courant sur le réseau public géré par RTE. C’est d’ailleurs une particularité du site de Cestas. Contrairement à la plupart des centrales solaires, qui injectent leur production sur le réseau Enedis à 20 kV, la centrale girondine abreuve directement le réseau très haute tension de RTE. La proximité d’un poste de distribution RTE a d’ailleurs motivé le choix d’implantation.
Selon Neoen, la centrale produit 355 GWh en moyenne chaque année. Un montant qui correspondrait à la consommation hors chauffage d’environ 225 000 habitants, soit autant que la ville de Bordeaux. En se fiant à la consommation moyenne annuelle d’un foyer français tous usages confondus (4,7 MWh selon la CRE), le site de Cestas couvrirait plutôt l’équivalent de 75 500 foyers.
Le local vert est une « PV Box ». Les rangées en toit à deux pans et les pieux battus, supports « sans fondations » des panneaux. / Images : RE-HL.
De l’électricité solaire même sous les nuages
Toutefois, cela ne signifie pas que la centrale peut, à elle seule, alimenter en permanence ces foyers, mais que le volume total produit équivaut à leur consommation. Lorsqu’il fait nuit ou que la météo n’est pas favorable, le réseau prend évidemment le relais en l’absence de dispositif de stockage d’électricité suffisamment dimensionné. Même aléatoire, chaque mégawattheure bas-carbone injecté par la centrale de Cestas est autant d’électricité qui n’est pas produite par une centrale au gaz, au fioul ou au charbon, voire par un barrage hydroélectrique (ce qui permet d’économiser l’eau du réservoir).
À lire aussi Notre visite au cœur d’une centrale solaire agrivoltaïqueLe jour de notre visite, le 15 novembre 2022, la météo était exécrable. Le ciel entièrement recouvert d’épais nuages et la pluie battante, la centrale de Cestas développait pourtant une puissance de 5,8 MW, soit 1,9 % de sa puissance maximale. Sur l’ensemble de cette journée maussade, le site a produit un total de 145 MWh.
À l’inverse, une journée idéale en plein été permet de générer 14 fois plus d’électricité. Graphique à l’appui, l’opérateur nous montre la production réalisée le 2 juillet 2022, un jour sans aucun passage nuageux, qui s’est élevée à 2 005 MWh.
Les moutons assurent le contrôle des végétaux. La station de transformation 33/225 kV / Images : RE-HL.
Maintenance de la centrale
La maintenance de la méga-centrale est assurée par une équipe de techniciens présents en permanence la journée. Ils sont notamment chargés de remplacer les panneaux endommagés, notamment par la grêle. Un renouvellement permanent, de 150 à 250 panneaux par an, assure Neoen. Un drone équipé d’une caméra thermique facilite l’identification des panneaux défectueux, ces derniers présentant des points chauds.
Le nettoyage des modules est quant à lui opéré par un engin spécifiquement conçu pour la centrale de Cestas. La machine pilotée manuellement est dotée d’un rouleau comparable à celui d’un lave-auto, pulvérisant de l’eau déminéralisée et frottant la surface des panneaux. Une campagne de nettoyage est lancée chaque année et dure 3 mois, l’engin évoluant à une vitesse de 4 km/h. Enfin, l’entretien des sols est assuré par des troupeaux de moutons en partenariat avec un éleveur local. Les bêtes évoluent librement entre les rangées, où elles broutent les végétaux.
D’ici quelques années, la centrale solaire de Cestas devrait être détrônée par le projet Horizéo, situé à quelques kilomètres et lui aussi porté par Neoen. L’énergéticien français prévoit d’aménager une gigantesque centrale photovoltaïque d’une puissance de 1 GW, soit plus de trois fois celle de Cestas.
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Je n’ai pas encore tout lu car c’est long… mais donc avec à priori une météo assez pourri cela a produit l’équivalent d’une demi-heure de production nominale… êtes-vous sûr qu’il n’y a pas eu à un moment une luminosité suffisante pour cela… car réellement sous les nuages et la pluie, la production avec un panneau (350Wc) et un micro-onduleur (300VA) (solution assez bonne pour pomper le peu qu’il y a à contrario d’un onduleur classique et plusieurs panneaux en série… moins efficace de mon expérience mais je peux me tromper selon certaines marques premium ??? mais cela justifie-t’il la différence… Lire plus »
Je suis bien sûr impressionné par ces méga projets. Mais j’aurais plus de sympathie pour un maillage dense de producteurs petits ou moyen utilisant des toitures. La production au plus près de la consommation limite les pertes sur les lignes électriques. Par exemple l’église la plus proche de mon domicile a tout un pan, dont l’exposition est favorable, couvert de panneaux solaires. A plus petite échelle j’ai aussi un pan de toiture exposé sud sud-ouest en grande partie couvert de panneaux photovoltaïques. Sur un autre pan de toiture un autre type de capteur participe au chauffage du cumulus économisant ainsi… Lire plus »
Je suis entièrement, d’accord, la gestion des surfaces c’est essentiel, alors si une surface peut avoir plusieurs utilités, il faut le faire. Si on commence à réserver des surface pour la production d’électricité seulement, les prix de l’agroalimentaire risque de monter. De plus nous devons replanter des arbres pour stocker le CO2, même si cela n’est effectif qu’après une dizaine d’année de pousse des arbres.