Pour que la transition énergétique puisse réellement se concrétiser, il est indispensable que se développent des solutions de stockage à grande échelle afin de pallier la variabilité du vent et du soleil. Une partie de la solution pourrait venir de la multiplication des voitures électriques, dont chacune renferme une quantité d’énergie précieuse qui pourrait venir ponctuellement en aide au réseau. En France, RTE vient de certifier la technologie V2G (Vehicle-to-Grid) qui rend cette solution possible.

A la fin 2021, plus de 500 000 voitures électriques sillonnaient les routes françaises, dont 160 000 ont été immatriculées rien qu’en 2021.
Avec le bonus écologique mis en place par le gouvernement, et l’explosion du prix des carburants qui agit comme un incitant non négligeable, le parc des véhicules 100% électriques est appelé à connaître une croissance exponentielle.
Selon la CRE (Commission de Régulation de l’Energie), la pénétration du parc automobile par l’électrique pourrait s’établir dans une fourchette de 10 à 15 millions de véhicules en 2035, sur un parc automobile de 38 millions de voitures particulières au début 2021.

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Gestion des appels de puissance

La question que sous-tend un tel développement se pose moins en termes d’augmentation de la consommation annuelle qu’en termes de gestion des appels de puissance : dans un scénario de développement à 15 millions de véhicules, selon Enedis, si tout le monde rechargeait le soir au même moment, on verrait le besoin de puissance augmenter de 10,2 GW lors du pic de consommation quotidien, ce qui équivaut à la puissance d’une dizaine de réacteurs nucléaires.

Il apparaît dès lors prioritaire de pouvoir piloter l’alimentation des véhicules à distance, en décalant la recharge de trois heures par exemple pour la démarrer en heures creuses, ou d’inciter les utilisateurs à recharger leur véhicule pendant certaines tranches horaires, grâce à une tarification incitative.

Car, faute d’un renforcement des infrastructures de production pour parer à ces besoins ponctuels, les risques de black-out sur le réseau français deviendraient bien réels.

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Au secours du réseau

Mais la piste de la recharge intelligente semble plus prometteuse. Le V2G, ou ‘vehicle-to-grid’, est une solution véhicule-réseau qui autorise la voiture connectée à injecter dans le réseau une partie de l’énergie stockée dans ses batteries pour soutenir de manière ponctuelle le réseau public.
Il s’agit d’autoriser le gestionnaire de réseau, lorsque la demande d’électricité est trop forte, à solliciter, auprès d’un parc de plusieurs milliers de véhicules électriques, la réinjection d’une petite quantité de l’électricité stockée afin de garantir la sécurité d’alimentation du système électrique.

Le V2G n’est pas nouveau. Depuis 2010, la marque Nissan équipe ses modèles Leaf de prises de type CHAdeMO qui permettent la technologie V2G. La Nissan Leaf a fait l’objet de nombreuses expérimentations, grâce auxquelles 7000 ménages japonais réalisent actuellement des économies non négligeables, tout en lissant les pics de consommation à l’échelle du foyer.

Nissan s’est associée avec Enel, premier producteur d’électricité en Italie, pour le développement de programmes pilotes au Danemark, aux Pays-Bas, ainsi qu’à Rome et à Gênes.
En Europe, les développements autour du système V2G se multiplient, et l’Allemagne a été l’un des premiers pays  à légaliser le dispositif. Mais aujourd’hui, Nissan est encore toujours le seul constructeur automobile à proposer des véhicules électriques dotés de capacités bidirectionnelles.

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Une certification par RTE

Consciente des nombreux avantages tant pour le consommateur, qui peut réduire sa facture d’électricité, que pour l’opérateur public, qui y voit l’opportunité d’équilibrer plus facilement production et consommation d’électricité, RTE vient de certifier la technologie « vehicle to grid » opérée par la start-up Dreev, une émanation du groupe EDF.

Ce serait en effet un non-sens de ne pas tirer profit de l’énergie stockée dans chaque voiture électrique, qui constitue une véritable batterie sur quatre roues, et qui, de surcroît, est immobilisée 90% de son temps.

Comme l’explique Eric Mevellec, patron de Dreev, « pendant ces heures où elles sont immobilisées, une partie de l’électricité que leurs batteries renferment peut participer à l’équilibre du réseau ».

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Un besoin accru de flexibilité

La technologie V2G présente un intérêt majeur car elle peut venir en soutien aux centrales nucléaires, thermiques ou hydrauliques, mais est surtout capable de régler la fréquence du réseau en quelques secondes à peine.
Car la question de la disponibilité de l’énergie se pose de manière accrue avec le développement de l’éolien et du solaire, dont les productions varient en fonction de l’intensité du vent et du degré d’ensoleillement.
Le V2G n’apportera sans doute pas une réponse globale à tous les besoins de stockage, mais il s’agit de toute évidence d’une innovation technologique qui va dans la bonne direction.

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